Du Maroc à l'Alsace, en passant par l'Italie

René et Charles W. sont issus d’une famille ouvrière de 7 enfants habitant Wittelsheim, en 1939, ils ne sont pas engagés dans l’armée. Après l’annexion de la région par le Reich, les deux frères décident de prendre leur bicyclette et de fuir vers la zone libre, ils évitent ainsi les décrets du 25 et 29 aout 1942 (incorporation dans la Wehrmacht) qui couteront la vie à plus de 30 000 alsaciens et mosellans. Après certainement de nombreuse péripéties pour rejoindre le sud, ils arrivent à Marseille où ils embarquent pour le Maroc. Une fois arrivés, Charles s’engage au sein du 4ème Régiment de Tirailleurs Marocain tandis que René s’enrôle dans les forces du 1er Régiment de Cuirassier en tant que conducteur de char sur le M4 A4 « Marrakech » du 3ème escadron du 1er peloton du Lieutenant de Benoist. Le 4ème R.T.M., équipé avec du matériel américain, part pour l’Italie aux alentours du 20 novembre 1943 après quelques mois d’instruction et de formation. Charles débarque avec ses camarades à Naples quelques jours plus tard. Ils combattent durant tout l’hiver dans les montagnes au niveau de la ligne Gustave, le régiment se repose durant quelques semaines en avril 44 mais repart dès début mai et participe à la Bataille du Garigliano. Après d’âpre combat, le 4ème R.T.M. se pose quelques jours à partir du 15 mai avant de partir pour Rome dès le 22. Le régiment combat à partir du 22 juin sur la ligne Frieda et le 3 juillet, la 6ème Compagnie entre dans Sienne, près de Florence. Il fait ensuite face aux hommes de la 4. Fallschirmjäger-Division et fini par être relevé le 19 juillet. Le 4ème R.T.M. part pour la France le 23 aout, il aura perdu 389 hommes dont 17 officiers ainsi 1277 blessés durant la campagne…


Charles débarque quelques jours plus tard en Provence, rejoins par René et le 1er Régiment de Cuirassier fin septembre 1944. Les tirailleurs libèrent Briançon le 7 septembre puis combat dans le Doubs jusqu’à la mi-novembre. Les deux régiments participent à la bataille pour Belfort jusqu’au 25 novembre. René participe à l’attaque sur Dannemarie le 26, son char est détruit par un Panzerfaust mais heureusement, il arriver à s’échapper du Sherman en feu. La ville est libérée le 28. Pendant ce temps, le 4ème R.T.M. libère Lauw entre le 27 et le 29 novembre puis combat dans la région de Than jusqu’à la fin de l’année. Le 1er R.C, quand à lui attaque Orbey le 15 décembre 1944, René est au commande de son nouveau M4 A4 baptisé « Marrakech II », il est en compagnie de son chef de char Jean M., du co-pilote Gaston R., du tireur Maurice B. et de l’opérateur radio et chargeur Denommey. Le Marrakech II est employé en soutien de l’infanterie (4ème Régiment de Tirailleurs Tunisien) dans la partie nord de la ville. Le char est ensuite ravitaillé en carburant et en munition. Au début de l’après-midi, Le Marrakech II est envoyé vers un pont afin d’aider un groupe de tirailleurs, le char avance et à sa droite, un canon Pak se révèle et tire le premier… Il touche l’avant du véhicule, Le pilote et le co-pilote (René W. et Gaston R.) sont morts à l’impact. Le tireur essaye tant bien que mal de tourner la tourelle vers l’ennemi mais la rotation et lente, et le M4 encaisse plusieurs obus. Le char prend feu, les trois membres d’équipages restant n’ont qu’une solution : fuir. Le tireur (Maurice B.) sort le premier, des tirs de mitrailleuses retentissent… Le chef de char ainsi que l’opérateur radio (Jean M et Denommey) se sauve et arrivent dans le village où ils apprennent la mort de leur camarade Maurice. Au loin, le char explose et continue de bruler… Le 1er R.C. aura perdu 25 chars.

Pendant ce temps, Charles combat avec son unité dans la région de Cernay et de Wittelsheim, qui est libéré le 3 février 1945. Il profite du repos accordé au 4ème R.T.M. pour retrouver sa mère et ses frères. La joie des retrouvailles est vite ternie par l’annonce du décès de René mais aussi par l’absence de leur père et de leurs deux sœurs qui avaient été engagé pour réaliser des travaux de fortification. Bien que libéré depuis novembre 1944, ils n’avaient pas puis rejoindre le reste de la famille, enfermé dans la poche de Colmar. Le destin frappa encore tragiquement la famille qui perdit Marthe, l’une des sœurs de Charles à la suite de problème pulmonaires.

Le 4ème R.T.M. stationne près de Colmar jusqu’à la fin du mois de mars, il part ensuite vers l’Allemagne, franchis le Rhin le 1er avril, prend la ville de Söllingen le 7 et Pforzheim le 8. Le régiment se bat ensuite vers Stuttgart en avril et avance vers l’Autriche. Le régiment reste en occupation en Allemagne. Apres de longs mois, Charles retrouve son village natal.