Nombre de messages : 798 Age : 61 Localisation : Canada Thème de collection : Tout sur les CWACs, militaria canadiens, médailles tous pays Grande Guerre ,2 iem Date d'inscription : 26/09/2010
Sujet: Re: Correspondance d'un Lieutenant canadien WW2 Mar 15 Jan 2013 - 23:00
Bonne année 2013! Aujourd’hui nous faisons un retour dans le temps de 67 ans et 4 mois! Intéressant que ce mois de septembre 1945! Le retour au pays du Canada approche! Mais avant de déménager de Neede (Hollande) où il était stationné depuis mai 1945, il fera une mission particulière dévoilant un peu l’Allemagne d’après guerre de 1945 et donnera une belle leçon sur le système monétaire hollandais d’après-guerre….
Une chose que je n’ai pas remarquée, c’est qu’à partir de la Mi-août 45 les lettres ne portent plus le sceau du censeur et que la ville d’origine est inscrite à côté de la date. Ce qui n’empêchera pas une lettre d’être censurée.
L’ennui et l’attente font que tout est prétexte à faire la fête :
La fête nationale des hollandais! Ceux-ci la fêtent en grand : jour et nuit!:
« Toute la Hollande est en fête ces jours-ci; c’est l’anniversaire de naissance de la Reine et la grande fête nationale du pays. Toutes les villes et les villages sont décorés et il y a des parades et des processions à toutes les heures du jour et même de la nuit! Lorsque je suis arrivé à Noordwijk mardi, ils achevaient les décorations, et mercredi, jeudi et vendredi ils ont eu les parades et les danses dans les rues. J’ai vu un soir sur un des canaux un défilé de barges décorées et illuminées; c’était magnifique. Les décorations dans le village de Noordwijk sont les plus belles que j’ai vues, et j’en ai vu beaucoup tout le long le long du chemin lorsque nous sommes revenus vendredi. J’aurais voulu en prendre des photos mais il ne me restait plus de poses sur mon film, car j’ai pris Noordwijk beaucoup de photos des fortifications côtières. Toutefois les décorations dans le village ici sont très belles; je vais en prendre des photos demain et je te les enverrai. Ce qu’il y avait surtout de beau dans les décorations de Noordwijk, c’était les fleurs. Dans une rue entre autres il y avait des gerbes de glaïeuls rouges orangées en ronds et attachées aux arbres. » …….. « A mon retour, il y avait le Col. G….. et les majors C…. et A….. du 4 th medium et quelques autres, alors nous avons commencé à prendre un coup et fêter l’anniversaire de la Reine!, et je me suis couché à 4 heures! Hier soir je me suis couché à 10 heures et j’ai été réveillé à 3 heures par le défilé de la fanfare qui revenait de la danse dans la rue en jouant, suivie par tout le monde qui chantait! Cà célèbre encore de la même manière ce soir; quand les Hollandais se mettent en frais de célébrer, ils font les choses en grand! »
Dans mes pérégrinations sur le web, j’avais déjà vue une photo d’époque avec ces décorations, impossible de la retrouver….Pour vous mettre dans l’ambiance j’en mets quelques une de la Hollande d’époque venant de la bibliothèque nationale du Canada.
Même sa conjointe commence à s’impatienter :
« Tu te demandes pourquoi ils ne se dépêchent pas à nous renvoyer en Canada puisque nous nous n’avons rien à faire. La grande raison est parce que nous n’avons de vaisseaux; il traverse chaque mois tout ce que les vaisseaux disponibles peuvent accommoder, et le reste doit attendre son tour. »
La baisse des effectifs avec le retour au pays des anciens… pour ceux qui restent c’est du multi tâches… et défis :
« Nous ne sommes plus que 31 officiers dans le régiment sur minimum de 36 que nous serions supposés avoir, et sur ce qui reste il y en a la moitié sur des « jobs » spéciales hors du régiment ou en passe. Je tien à te dire que le tour d’orderly officer vient souvent. A part cà, le Secrétaire du Mess est un passe en Angleterre, et j’ai été appointé Secrétaire du Messe pendant son absence. J’ai eu à régler ce soir une chicane entre le « cook » et le bombardier en charge du mess! Le cook est très bon et nous mangeons très bien alors nous voulons conserver ses bonnes grâces, mais il est très susceptible; d’autre part, le bombardier est un maudit déplaisant. J’espère que cà va tenir jusqu’à ce que le Secrétaire du Mess revienne. » …… « On vient de m’annoncer que le Brigadier de l’Artillerie de la Division doit venir demain faire une inspection du programme d’éducation du régiment, et je suis supposé; de donner un cours de français à 10 heures. Il ne me reste que deux élèves, le reste sont en congé ou partis en Angleterre, au Khaki College. Je me demande comment je vais m’arranger! »
Enfin la procédure du retour au pays se précise :
« On nous dit que nous serons très confortables dans nos nouveaux quartiers à Amersfoort et je le crois, car nous prenons le quartiers de Quartiers Généraux de la 2ième Divivion, et ordinairement les Quartiers Généraux ne prennent pas ce qu’il y a de pire! » …… « La 1ère Division est à peu près toute partie de Hollande, et on s’attend de déménager la 2ième Division en l’espace de deux semaines à commencer bientôt, et on prévoit que nous déménagerons à Amersfoort au commencement d’octobre. On prévoit aussi que la 3ième Division sera toute partie de Hollande et embarquée sur les vaisseaux ou en route pour le Canada à Noël, … » ….. « D’après le premier plan la 4ième Div. Était supposée partir avec la 3ièmemais maintenant elles vont partir ensemble, comme une seule Division, parce que tous ceux qui ont plus de 150 points sont partis, et ceux entre 130 et 150 partent la semaine prochaine. Ceux entre 110 et 130 points vont partir à la fin du mois ou au commencement d’octobre, et on parle même de rapatrier avant leurs unités ceux entre 90 et 110 points. Ce qui veut dire qu’il ne restera plus beaucoup de monde dans les régiments et on val les fusionner 2 pour un; nous allons être fusionné avec le 23 Field ou le 8 L.A.A. C’est pourquoi la 4ième division va partir avec la 5ième, car les deux après Noël vont avoir à peu près l’effectif d’une Division. D’après ce nouveau plan, on prévoit que le Régiment partirait de Hollande ver la fin de Janvier ou le commencement de février. Une chose toutefois, la question de points n’affecte pas le personnel indispensable, comme les officiers, les sergents-majors, sergents, etc., alors je suis bien destiné à retourner avec la Division. » ….. « Il y a beaucoup de rumeurs qui circulent actuellement au sujet de la rapatriation qui pourrait peut-être avancé d’un mois, ce qui nous mettrait en Canada vers février 46. Il y a aussi des rumeurs au sujet du départ des troupes canadiennes de Hollande; celle qui semble la plus fondée c’est que nous partirions de Hollande pour l’Angleterre dans le cours de novembre, et tous les congés ont été cancellés après le 30 septembre. Pour ma part cà ne fait pas mon affaire du tout, car cà veut dire que je ne pourrai pas retourner à Paris ou Bruxelles, et la perspective de passer 3 ou 4 mois en Angleterre ne m’intéresse pas beaucoup. Mais ce n’est pas moi qui décide! »
Il ne faut pas oublier qu’il a passé les mois d’août 44 à janvier 45 en Angleterre…. cinq longs mois.
Nouvelles de son coin de pays, pour les québécois en 1945 la religion est très présente :
« Le Congrès Eucharistique est maintenant fini. J’espère que vous avez en une belle température et que tout s’est bien passé…. L’autel du Congrès est très beau; je suppose qu’il est démonté maintenant. » « D’après ce que tu me dis, le Congrès a été un grand succès, et le Curé à raison d’être fier du résultat, car il a dû se donner beaucoup de trouble pour l’organiser. »
La deuxième guerre fait que les petites villes du Canada ont « refait» leur ancien monument aux morts et héros de la deuxìeme présents.
« Je vois que vous avez eu de belles fêtes à l’occasion du Centenaire de M….et du dévoilement du Monument à ceux de M…. qui sont morts au Champ d’Honneur. .................Je m’imagine un peu ce que devait ressentir J.C. Forbes et Yvan Desrosiers! Je suis bien contant de voir que ce pauvre Jean-Charles est enfin rendu à M…..; il a bien mérité cà. Il devrait avoir sa décharge prochainement ainsi qu’Yvan Desrosiers. Voudrais-tu me dire où est ce monument. »
La fin de la guerre, le retour des soldats et la fermeture des usines vont changer le portrait de l’emploi d’après-guerre à court terme.
Pour les femmes : « Maintenant que la guerre est finie et que les usines de munitions sont fermées, il va probablement être plus facile de trouver des servantes à des salaires raisonnables et qui ne seront pas trop chatouilleuses! J’espère bien que vous allez pouvoir vous en trouver une prochainement pour vous donner une chance de vous reposer. »
Un site très intéressant sur le Canada en guerre, une belle section est réservées aux travailleuses des usines à munitions. Si la paie était bonne, les risques étaient à la hauteur. http://www.veterans.gc.ca/content/collections/lff/flash/hs/f/?s=0
Pour les soldats :
« Ce qu’on disait à la radio que les militaires qui veulent retourner à leur emploi d’avant-guerre peuvent le faire vient dire que lorsqu’ils sont parti sortis de l’Armée leurs employeurs sont obligés de les reprendre s’ils veulent retourner à leur emploi, mais ceci ne donne pas de priorité pour le retour en Canada. La seule chose qui donne priorité pour le retour en Canada sont les emplois qui sont considérés comme essentiels au pays, comme des mineurs, les ouvriers spécialisés, les fermiers s’il n’ s’il n’en reste pas assez à la maison pour faire l’ouvrage mais l’application pour ceci doit être faite pour l’employeur et non l’employé, car c’est l’employeur qui peut dire si une personne lui est essentielle pour son industrie. C’est l’information à ce sujet que j’ai envoyée à papa lui disant d’essayer de me faire passe comme essentiel. Il est bien clair que je ne peux pas rien faire pour retourner plus vite en vertu de cette loi. Je n’ai pas besoin de faire une demande pour retourner à mon ancien emploi, car avant d’entrer dans l’armée je pratiquais seul, alors je n’ai pas besoin de demander la permission à personne pour ravoir mon bureau! »
Mon lieutenant donne à son épouse le détail du nouveau système monétaire hollandais en fin 1945 : la cigarette!
Les origines du système, la façon d’opérer, ses avantages et …inconvénients et les moyens pris par les autorités pour retourner à la vie normale. Voici le premier extrait d’un seul jet dans cette lettre : « Je te disais dans une lettre écrite il y a quelque temps que je te donnerais une idée du système monétaire ici. L’unité monétaire ici est le « Guilder » qui avait avant la guerre une valeur de 42 cents de notre monnaie. Lorsque les Allemands sont arrivées ici, ils ont imprimé des guilders en quantité, avec le résultat qu’il y a a actuellement en circulation 10 fois plus qu’avant la guerre, de sorte que ceux qui sont dans le marché noir et presque tout le monde ici est dans le marché noir! Les gouvernements Alliés ont fixé le taux d’échange du guilder à 42 cents lorsqu’en réalité il ne vaut plus que 4 ou 5 cents, et comme les gens ici n’ont pas de cigarette et de tabac, entre autres choses, ils les achètent des soldats. Le prix régulier des cigarettes est un guilder la cigarette. Alors tu peux t’imaginer que les soldats ont des guilders en quantité et ne retirent pas d’argent sur leur paye. Pour ceux qui n’ont pas de cigarettes à vendre, on peut acheter des guilders des soldats au taux de 50 pour une livre sterling (quand le paie-maître nous en donne 10). Lorsque je suis allé à Paris, j’avais 1 000 guilders, ce qui représente $420. Au taux officiel, mais qui ne coûtait 20 Livres ($88), et je les ai changés en francs français à Paris. Cà m’a donné 24 000 francs; j’en ai changé 600 à Paris, qui m’ont donné 11 000 francs, et en passant à Bruxelles, j’en avais changé 400 en francs belges qui ont à peu près la même valeur que le franc français au taux officiel et qui valent le double sur le marché noir. Cà m’a donné 6 600 francs belges que j’ai échangé sur le marché noir pour 13 000 francs français. Pendait tout mon congé à Paris j’vais 24 000 francs français! Je continuerai sur une autre lettre. »
La suite…
« Tu dois te dire qu’environ 24 000 francs, qui représentent au taux officiel d’échange $528. j’avais amplement d’argent pour passer un beau voyage. J’en avais amplement, mais j’aurais pu le dépenser facilement. Après t’avoir donné toutes ces explications sur le système monétaire actuel en Europe, je peux te dire que j’ai payé ton « bed-jacket » 4 000 francs ($88). Je sais que si je t’avais dit cà sans te donner ces explications, tu m’aurais cru fou, mais en réalité, il ne me coute que «$18. de ma paye. Je ne me rappelle pas les prix de dentelles achetées à Bruxelles, mais les prix sont à l’avenant. A Paris une bouteille de champagne coûte 800 francs, plus 100 francs pour le service; alors on donne un billet de 1 000 francs au waiter et on lui fait signe de garder le change! Comme tu peux le voir, il est facile de se débarrasser de quelques milliers de francs en pas grand temps! Je me suis acheté à Paris un caméra et une cellule photo électrique. J’ai payé le tout environ $80. au taux d’échange officiel. Cà vaut pas cà, mais cà me coûte environ « 15., alors! Ils essaient par tous les moyens actuellement d’arrêter cette spéculation sur la monnaie. Il est question actuellement d’une nouvelle émission de guilders qui cancellerait ceux qui sont actuellement en circulation, alors ceux qui ont leurs poches pleines seront obligés de donner des explications sur la provenance de ces guilders. Cà va probablement ramener les choses à la normale. A part cà, il est de plus en plus difficile de changer des guilders à Paris, Bruxelles et à Calais, pour aller en Angleterre. On nous autorise à changer seulement ce que nous avons retiré en guilder sur notre paye dans les derniers deux mois; comme personne n’en retire jamais, il faut user d’expédients! Les Canadiens sont assez habitués à ce genre d’expédients maintenant qu’il va être difficile de les arrêter complètement! Cà va toutefois être difficile de se réajuster à la vie civile après avoir mené cette vie pendant un certain temps. Il va être difficile de s’habituer à ne pas demander lorsque nous irons acheter quelque chose « Combien de cigarettes », car les cigarettes sont ici la monnaie courante. On peut se procurer n’importe quoi ici avec des cigarettes. J’ai acheté cette semaine du blé d’inde en épi pour le mess, et j’ai payé 2 cigarettes l’épi! Le prix courant pour les œufs est de 3 cigarettes chacun, et nous en avons toujours une ample provision. Demande à Mémère combien elle vend ses œufs de ce temps-ci! Il y a un type qui m’a offert l’autre jour un camera pour 2 200 cigarettes; je lui ai demandé combien de guilders et il m’a dit qu’il n’était pas intéressé à le vendre pour des guilders! » ……
Et la solution :
"Je t’ai aussi expliqué le système monétaire du pays. Il était question depuis longtemps d’échanger les guilders pour arrêter le marché noir. Ce changement se fait actuellement. Les civils ont été obligés de déposer à la banque tous leurs vieux guilders et on leur donne un nouveau par jour en échange jusqu’à ce qu’une commission du Gouvernement ait examiné tous les comptes de banque et se soit rendu compte comment cet argent a été acquis. Alors tu peux t’imaginer qu’ils n’ont pas d’argent pour le marché noir! Pour nous l’échange n’est pas encore fait, il doit se faire la semaine prochaine, et il va être très serré, alors si on veut des nouveaux guilders il va falloir les payer! Cà a l’air que le beau temps est fini ici, et que cà va commencer à coûter cher. Nous garderons toutefois un bon souvenir des congés de 3 jours que nous passions à Noordwijk et òu nous dépensions 150 à 200 guilders! C’est bien tant mieux pour la Hollande cependant s’ils réussissent à arrêter le marché noir de cette manière; ils vont pouvoir se remettre sur pieds assez vite.
Le dernier tiers du mois de septembre apporte une mission particulière :
« ….mais on m’a annoncé hier que je parts lundi pour la Tchécoslovaquie pour un voyage de deux semaines! Je pars avec environ 30 chauffeurs du régiment pour aller délivrer des camions canadiens en Tchécoslovaquie et de là, peut-être en Pologne ou en Roumanie; nous le saurons lorsque nous serons rendus là-bas. Un officier du régiment qui est allé la semaine dernière ne s’est rendu qu’à Pilsen, et a fait 1 400 milles, aller et retour. C’est à Pilsen qu’on nous dit si nous devons aller plus loin ou laisser les camions là. Il dit que c’est un très beau voyage mais très fatiguant. Cà va me donner une chance de voir du pays. Je ne pourrai probablement pas t’écrire pendant tout ce temps, car nous allons vivre dans nos camions tout le temps. Nous passons par Colongne, Frankfort, Nuremberg, mais à ces endroits on ne nous donne qu’à manger; il faut coucher dans nos camions pour être sûrs qu’ils sont encore là le lendemain matin! Comme le régiment va probablement être parti d’ici à mon retour, il va falloir que je fasse mes bagages avant mon départ. » ….. « Hier et aujourd’hui tout la journée, j’ai passé mon temps à organiser mon voyage en Tchécoslovaquie et j’ai bien de la misère, car il me faut 29 chauffeurs et 1 motocycliste; et il ne faut pas qu’ils aient plus que 110 points, qu’ils soient sur un emploi spécial, etc! Tout semble arrangé ce soir. ….. « Je suis revenu de mon voyage hier soir. Nous ne nous sommes rendus qu’à Pilsen en Tchécoslovaquie, et des chauffeurs tchèques ont pris les camions là pour les rendre à destination. » …..
Une belle description des villes allemandes en fin 1945 et les conséquences :
« J’ai fait un très beau voyage et très intéressant, mais aussi très fatiguant. Le premier jour nous nous sommes rendus à l’aéroport de Deelen, entre Apeldoorn et Anheim et on nous a donné nos véhicules. La deuxième journée s’est passée à leur donner un « overchalange » et à les remettre en état, et nous sommes partis le troisième jour, mercredi. Nous avons 100 camions divisés en 4 groupes de 25 avec un officier en charge de chaque groupe. J’avais 29 camions en tout dans mon convoi en comptant les 4 camions que j‘avais. Nous avons passé dans la région où on s’est battu dans l’offensive préliminaire à la traversée du Rhin; c’est complètement rasé. Il ne s’est rien produit d’extraordinaire ce jour là, excepté qu’après diner un des chauffeurs à laissé un bol de café sur le couvert du moteur à côté de lui, à l’intérieur. En partant il a frappé un trou et le bol de café lui a volé dans la figure. Il a perdu lumière et le contrôle, et il est allé s’arrêté dans le champ à 100 verges du chemin, dans une tranchée. Nous ne pouvions pas arrêter pour lui et nous l’avons laissé là. Un des groupes suivants l’a tiré de là et il nous a rejoint. Nous sommes arrivés à Cologne vers 4 heures et nous avons traversé toute la ville pour nous rendre au camp. Il faut voir Cologne pour croire comment s’est détruit; pour des milles de long, il n’y a pas un seul édifice debout, ce ne sont que des débris qui ont été enlevés de la rue par les tracteurs et empilés de chaque côté. Les rues sont pleines de monde dont la plupart portent sur leur dos un « pack sack» avec probablement tout ce qui leur reste. Je me demande où ils vivent. »
Cologne 1945
Cologne 1960 …….
Le soir que j’ai passé à Cologne, je suis allé faire un tour à pied dans la ville , et je suis arrêté dans une espèce de taverne pour prendre un verre de bière. C’est dans un édifice à 3 ou 4 étages, dont seulement le premier est debout, et les fenêtres ont été remplacées par des panneaux! Pendant que je prenais mon verre de bière, il est entré 2 filles, et comme les seuls sièges libres étaient à ma table, elles sont venues s’assoir. Après un certain temps je leur ai parlé en anglais et elles ont levé les épaules en faisant signe qu’elles ne comprenaient pas. Je leur ai alors parlé en français et elles parlaient toutes deux très bien français. Nous avons causé un peu et elles ont été polies, mais par la manière qu’elles nous regardent, il n’est pas difficile de voir que les allemands ne nous aiment pas!. Il n’y a pas de danger que ces deux là « fraternisent »! Le lendemain nous sommes allés de Cologne à Frankfort, en passant par Boon, Coblence, Mainz et Bingen, le long de la rive ouest du Rhin. C’est une contrée magnifique, ce que j’ai vue de mieux en Europe jusqu’à date. Tout le long du parcours toutes les villes de quelqu’imprtance sont en ruines et partout c’est la même senteur de cadavres enfouis sous les ruines. C’est une senteur qu’on n’oublie pas! Le soir à Frankfort, nous sommes allés au « Château », un centre de congé et un club d’officiers américains à environ 5 milles de la ville. C’est un château qui a été construit par la fille de la Reine Victoria mariée à un prince allemand. C’est une bâtisse immense, très belle et très riche et aussi très moderne. Comme club d’officiers, c’est idéal
Le lendemain nous nous sommes rendus à Nuremberg. Entre Frankfort et Nuremberg, c’est très montagneux et le paysage est magnifique, mais cà a été très dur pour les camions car j’en ai perdu 3, dont 2 avec des « clutch » brulées. A peu près à mi-chemin il y a la ville de Würzburg qui est très vieille et très belle, mais qui est très endommagée. Il y avait! là les usines de moteurs d’avion Mercedes-Benz et une usine de pétrole synthétique. La ville de Nuremberg est très endommagée presqu’autant que Cologne.
« La ville de Nuremberg est très endommagée, il y a des milles carrés où tout n’est que débris. C’est probablement la ville la plus endommagée que j’ai vue après Cologne. Le Camp Canadien est près du fameux stade où Hitler tenait les congrès du parti nazi. On dit qu’il y avait jusqu’à 500 000 personnes à la fois dans ce stade, et je n’ai pas de misère à le croire. Il y a un grand champ de baseball dans un coin et un champ de softball dans l’autre coin. Ces deux champs ne couvrent pas le quart de la superficie du stade! Toutes les croix gammées ont été enlevées, et c’est maintenant le « Soldiers Field ». Cà n’a pas été endommagé du tout. Tout près il y a la piscine des jeux olympiques, où je me suis baigné, et la piste de course des jeux olympiques. J’aurais voulu prendre ma photo sur la tribune d’où Hitler parlait, mais les deux fois que j’y suis allé je n’avais pas mon camera! Après cà il s’est brisé, et je n’ai pu prendre que 2 films dans tout mon voyage, et je ne sais pas s’ils vont êtres tous bons.
Entre Nuremberg et Pilsen nous traversons les Sudètes qui ont été annexés par Hitler en 1938. C’est un pays très montagneux et il y a un bout de chemin très mauvais. Nous ne traversons pas de ville importante sur ce chemin, et le paysage est très beau dans les montagnes. Le Camp Canadien est à 7 milles en dehors de Pilsen , dans un petit village. La ville de Pilsen est une grande ville industrielle; c’est là que sont les fameuses usines Skoda. Les usines ont été très endommagées par les bombardements, mais certaines parties sont en opération maintenant. La ville a été beaucoup moins endommagée que les villes allemandes, mais il y a des marques de bombes. »
Un cadeau bien spécial pour son épouse:
« Tu me dis que tu as hâte de recevoir des photos. Je vais t’en adresser ce soir ou demain. Je t’envoie aussi un cendrier fait avec la base d’une cartouche de 25 pdr. Et avec au centre une « fuze » d’un obus allemand de 88 millimètres. Ne laisse personne essayer de démonter la fuze, car il y a à l’intérieur un mouvement d’horlogerie et ils peuvent perdre des morceaux. »
Le 30 septembre c’est le départ de Neede, Hollande où il a passé 5 mois :
« Ceci est la dernière lettre que je t’écris de Neede. Notre déménagement à Amersfoort est un premier pas vers le retour au Canada; quand se fera le deuxième pas est encore le secret des dieux. » …… « Les gens de la maison m’ont donné en souvenir une jolie cuillère en argent. Je vais te l’envoyer prochainement. »
A bientôt pour Octobre 1945.
slacas Je viens d'arriver !
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Sujet: Re: Correspondance d'un Lieutenant canadien WW2 Mar 5 Fév 2013 - 19:59
Bonjour dans un premier temps bravo pour la retranscription des lettres de votre lieutenant vraiment très intéressant. Pour ce qui est de Mme Russell elle est décédé en 1974 dons ce n,est pas elle qui était voisine de votre belle-mère. il serait quand même intéressant de savoir c'est qui, si jamais vous avez une chance de le découvrir.
J'espère que vos recherches concernant les héritiers du lieutenant vont porté fruits et qu'éventuellement vous pourrez être en mesure de nous mentionné son nom.
merci encore pour ces beaux récits
CWAC Lieutenant-Colonel
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Sujet: Re: Correspondance d'un Lieutenant canadien WW2 Sam 16 Fév 2013 - 20:19
Merci de vos commentaires, j'ai eu le nom de la personne qui était voisine de ma belle-mère. Elle faisiait partie des "Flyying seven" et son nom était Mme Alma Gilbert-Gaudreault. Je vous mets en lien des sites que j'ai trouvé à ce sujet. Une histoire très intéressante de l'aviation au féminin.
Je ne sais pas pourquoi Mme Gilbert ait pu se retrouver au Québec, alors qu'elle était à Vancouver. Est-ce suite à son mariage? Qui prend mari, prend pays.
Miss Tosca Trasolini, Mrs. Alma Gilbert, Miss Jean Pike, Mrs. Elizabeth (Betsy) Flaherty, Miss Margaret Fane, Miss Rolie Moore (Mrs. Barratt) and Miss Elianne Roberge
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Sujet: Re: Correspondance d'un Lieutenant canadien WW2 Dim 17 Mar 2013 - 21:16
Bonjour de retour pour le résumé des lettres du lieutenant du mois de octobre 1945.
Je sens dans ces dernières lettres une certaine « lassitude » malgré les sorties, les permissions et le travail en tant « orderly officer ». Ses lettres sont moins longues que d’habitude, peut-être que cela est dû à la routine du quotidien.
Moi-même j’ai une certaine lassitude à recopier ces lettres dont le quotidien n’apporte presque plus rien de nouveau. Mais il reste malgré tout quelques moments spéciaux et ces lettres décrivent bien « l’attente du retour au pays » après ces mois et années à vivre à 100 à l’heure. Je peux comprendre maintenant que certains ont trouvé difficile le retour à la vie civile. Ce n’est pas le cas de mon lieutenant qui s’étant engagé à presque 30 ans ne considérait pas faire carrière avec l’armée, mais a fait son devoir de citoyen selon ses convictions.
Nous commençons le mois par le déménagement de Neede (petit village près de la frontière allemande où il était stationné depuis mai 1945 soit 5 longs mois) vers Amersfoort (on se rapproche de l’Angleterre).
« Comme tu peux le constater, nous sommes déménagés Ma Batterie et les Quartiers Généraux du Régiment sont déménagés aujourd’hui, et les deux autres Batteries déménagent demain. Simard arrivera demain. Nous sommes partis à 9 heures ce matin et sommes arrivés vers 11.30; il faisait beau et nous avons fait un bon voyage. Ici, les officiers logent dans l’Hotel « Birkoven » où nous avons nos chambres et le mess. C’est assez confortable; nous sommes deux par chambre et avons de bonnes chambres avec eau courante. Les hommes sont installés dans un ancien camp allemand tout près d’ici. Nous sommes à peu près 2 milles du centre de la ville d’Amersfoort. »
Il termine dans cette lettre son voyage en Tchécoslovaquie :
« Maintenant, le reste de mon voyage. Je t’ai parlé de Pilsen. Il n’y a rien de bien remarquable là et je n’ai pas le temps de visiter beaucoup. Nous sommes passés à travers la ville l’après-midi et nous avons été occupés au Camp jusque vers 10 heures du soir. Nous sommes ensuite allés au « Grand Hotel » à Pilsen. C’est un Club pour les Américains (Pilsen est dans la ????? américaine) et il y a de la danse avec un très bon orchestre. Nous avons dansé jusqu’à minuit et nous sommes retrouvés au Camp. Les Tchèques ne parlent pas beaucoup anglais et avec la plupart de celles avec qui j’ai dansé nous nous comprenions mieux en français qu’en anglais. Le Tchèque est une langue très douce et très agréable à entendre; cà fait une différence avec l’allemand! Les femmes sont plutôt noires il y a quelques blondes, mais c’est un blond plus foncé que les Hollandaises ou les Allemandes. Je ne suis reparti de Pilsen que le lendemain après-diner, car nous avions un camion brisé et nous l’avons échangé là pour un autre qu’il a fallu remettre en ordre. » « …… Mon camera n’est pas très bon. Pendant mon voyage à Pilsen, il s’est brisé; il ne roulait que la moitié du film, et ensuite cà ne voulait plus, alors j’ai pris quelques films avec seulement 3 ou 4 portraits, et je n’ai pas pu en prendre beaucoup. Je regrette beaucoup, car il y avait des endroits magnifiques. »
Ce que j’ai remarqué des voyages que le Lieutenant a faits dans l’Europe de 1945 c’est qu’il avait plus de facilité à se faire comprendre en français qu’en anglais. Le français à cette époque semblait être la « langue seconde ».
Dès le début du mois il profite d’un congé pour aller à sa station balnéaire favorite Noordwijk :
"C’est très probablement la dernière fois que je viens ici, car l’hôtel ferme le 15. Il y aura probablement un party de fermeture et j’aurai peut-être la chance de venir, mais c’est mon dernier congé ici. Il commence à faire froid, mais il fait très beau et l’hotel est chauffé. C’est trop froid pour se baigner dans la mer quoiqu’il y en ait encore quelques-uns à l’eau de temps en temps! Vendredi soir un de mes amis qui est sur le staff de l’hotel a invité deux gardes-malades de la Croix Rouge hollandaise qui demeurent à Noordwijk, et j’ai passé la soirée avec eux. Elles se baignent tous les jours à la mer! Elles sont très gentilles et toutes les deux parlent le français très bien. Elles ont été plusieurs années à l’école en France avant la guerre. ............ Samedi je suis allé à Amsterdam, et j’ai vu Eisenhower comme il arrivait au Palais Royal sur Dam Square, en face du Club des Officiers. »
Destin tragique que Dam Square
http://en.wikipedia.org/wiki/Dam_Square
Et j’ai trouvé un beau site de photos d’époque
http://life.time.com/world-war-ii/page/1/
Le reste du mois est parsemé de soirées dansantes ou soupers que ce soit au Marmond Country Club, au Officers’ Club à Zeist et Lido Club d’Amsterdam sans compter les soupers au Mess avec la possibilité d’invitées.
Mais toutes ces sorties ont des conséquences:
La fameuse altercation d’Utrecht dont je n’ai presque rien trouvé sur le web :
« Pour ce qui est de l’affaire d’Utrecht, il y a eu de l’exagération dans les journaux et surtout dans les rumeurs qui ont couru avant. S’il n’y avait pas eu ces rumeurs, l’affaire ne serait jamais arrivée. Mais il est sûr que la police a eu tort de commencer à tirer, car lorsque cà commencer à tirer les Canadiens deviennent « rough ». Cà a l’air bien tranquille maintenant. »
Extrait doc pdf que j'ai trouvé: Quand le Canada a gagné la guerre D.Morton 1995
« En septembre, le maire d’Utrecht accu d’être à l’origine d’une rixe opposant des Canadiens, des policiers néerlandais et des civils un bouc émissaire familier : les femmes. »
Et l'autre conséquence:
« Depuis la fin de la guerre, il a y a eu beaucoup d’accidents d’automobile dans l’Armée Canadienne. Les provosts sont maintenant très sévères, et il y a toutes sortes de règlements. Il faut un chauffeur avec tout véhicule, et les officiers n’ont pas le droit de conduire entre 6 heures du soir et 6 heures du matin; on assume que tous les officiers sont saouls pendant ce temps. Lorsque les provosts arrêtent quelqu’un pour vitesse, ils font parquer le véhicule dans certains parcs gardés par eux, et le véhicule y est immobilisé pour 2 heures! 3 capitaines et l’adjudant du régiment revenaient d’Amsterdam hier soir et se sont fait arrêter; ils sont arrivés ici à 1 heures du matin, et le capitaine en charge du véhicule va être paradé au Brigadier! »
Une situation particulière semble s’être créé avec un autre officier de son régiment :
"Il est 4 heures de l’après-midi et je t’écris de l’orderly room où je passe presque toutes mes journées. Le Major n’y est jamais et je suis le seul officier disponible pour rester ici."
Vers le milieu du mois nos 2 hommes remetttent ça à l’occasion d’un congé spécial pour la fermeture de Noordwijk, une situation assez cocasse entre deux têtes fortes :
« Je ne sais pas si je t’ai parlé du grand « party » qui devait avoir lieu à Noordwijk hier soir à l’occasion de la fermeture de l’hotel. D’abord, je n’étais pas supposé y aller parce que j’étais orderly officer ce jour là. J’ai réussi à me trouver un remplaçant et j’ai demandé au Major si je pourrais y aller. Il s’est fait prier. (C’est un trou de cul de la plus pire espèce) et à la fin a décidé que je pouvais y aller à condition que je sois de retour pour le lendemain matin à 9 heures, pour la parade! ...., j’ai demandé une fille d’Amsterdam qui travaille au « Leave Center » d’Amsterdam et que j’avais rencontrée là. Je suis allé la chercher mardi après-midi à 6 heures et nous nous sommes rendus à Noordwijk. Le « party » commençait par un souper à 7.30. Cà a duré 3 heures, et je n’ai jamais tant mangé de ma vie. Nous avons eu hors d’œuvres, soupe, entrée au poisson, de l’oie, du gâteau crème à la glace, le tout copieusement arrosé de champagne et de bourgogne mousseaux. C’était parfait, et les Hollandises pour une fois sont mangé à leur faim. Il y avait environ 250 personnes. Après le souper, il y a eu la danse jusqu’à 4 heures du matin, avec du liquide en quantité. La plupart sont restés à l’hotel jusqu’au lendemain midi avec les femmes, car il y avait accommodation pour tous. Moi je suis parti à 4 ½, ai reconduit ma fille à Amsterdam et suis revenu à 7 heures. J’étais sur la parade à 9 heures, pas mal endormi. Je me suis couché cet après-midi et je t’écris avant de me coucher. »
Et encore une fois à la fin du mois lors d’une permission.
« Comme tu le vois, je t’écris d’Amsterdam. Je suis arrivé ici hier après-midi et je suis en congé jusqu’à samedi soir. J’ai eu bien de la misère à obtenir ce congé, car le Major lorsque je lui en ai parlé a essayé d’en trouver un autre pour envoyer à ma place! Enfin ceux à qui il a offert le congé l’ont refusé! »
Les tentatives de sa famille d’essayer de la rapatrier plus vite.
« Tu me dis que le médecin de l’Unité Sanitaire est venu au sujet de l’application qu’a fait papa pour me faire revenir. J’attends toujours les résultats ici. Si cà arrivait d’ici un mois, je pourrais être à M..... pour Noël. Si ca retarde plus que cà, cà ne vaudra presque plus la peine, parce qu’alors nous allons nous mettre en marche nous-mêmes. » ….. « Je suis revenu ce matin à 1.30. En arrivant j’avais le télégramme de papa en date du 24 me disant que les Quartiers Généraux veulent que je fasse application par écrit à mon Commandant. Le Colonel est parti vendredi, et c’est un Major qui est Commandant maintenant. Il n’est pas ici aujourd’hui, mais je vais le voir demain. Je te dis bien franchement d’avance que je n’ai pas grand confiance dans les réussites des démarches de mon côté. Tous les officiers sont considérés comme personnel essentiel, et on les laisse aller un par un à mesure que le nombre d’hommes diminue, et naturellement ce sont ceux qui sont le plus grand nombre de points qui partent. Si la demande pour mon retour arrivait du Canada on me laisserait partir, mais si elle part de moi?....Enfin cà ne coute rien d’essayer et je te tiendrai au courant. »
Les rumeurs et vérités du rapatriement:
« Au dernières nouvelle la 3ième division ne commencera pas à partir avant la fin du mois,… » « …Nous avons eu de bonnes nouvelles ce matin au sujet du rapatriement. On nous dit que le « Queen Elizabeth » et l’ « Aquitania » vont être employés pour les troupes canadiennes. Cà avancerait peut-être un peu notre retour, mais il ne faut pas partir en peur, car avant cà, on nous avait dit que nous n’avions à peu près plus de vaisseaux pour octobre et novembre, avec bien peu d’espoir d’amélioration en décembre. Avec ces deux vaisseaux, le programme a une chance de marcher normalement. Par ailleurs, les Américains sont en maudit et pourraient bien essayer de se le faire remettre, alors il est mieux d’attendre les évènements. » ….. « Je te disais dernièrement que nous serions en Angleterre pour Noël; nous avons reçu ce matin une lettre circulaire disant que nous passerons Noël en Hollande. J’aime mieux comme cà, car le fait de passer Noël en Angleterre ne nous fera pas revenir plus vite en Canada, et nous serons beaucoup mieux ici. Entre autres choses, nous avons le chauffage central ici, et la fournaise chauffe! »
Les baraquements anglais ne semblent pas être 4 étoiles…
« Les dernières nouvelles sur le rapatriement sont que la 4ième Division commencera à partir de Hollande le 31 décembre. Sous sommes supposés être un des premier régiment à partir. J’espère que nous ne serons pas sur le chemin le Jour de l’An. Nous avons plusieurs de nos officiers qui doivent partir prochainement. Le Colonel Walker part vendredi, et nous aurons jeudi soir un diner d’adieu à l’Hotel Amstel à Amseterdam. Le régiment va bientôt être fusionné avec le 23 Field, et c’est le Col. Hogart du 23 rd qui va être Commandant des deux régiments. » ….. « J’ai rencontré au souper hier soir un type que je connais bien et qui est « Aid O.P. ». Il est attaché à Army Headquaters alors il est un peu au courant des secrets; il me disait que notre départ de Hollande pourrait bien être avancé, ce qui voudrait dire que nous pourrions bien passer Noël en route pour l’Angleterre ou dans un Camp de Rapatriement en Angleterre. Toutefois ceci n’est qu’une rumeur comme il en court tant actuellement. Il m’a cependant fait une prédiction qui s’est réalisée ; il m’a dit que nous aurions une grosse tempête de vent et de pluie. Il a plu toute la nuit passée et toute la journée il fait un vent à « écorner les bœufs », et cà a l’air parti pour durer plusieurs jours! »]
En homme pratique il ne critique pas la situation :
« Il y a en bien des critiques du plan de rapatriation, mais je crois que dans l’ensemble il était difficile de faire mieux. Il y a bien des gens avec peu de points revenus avec la 1ière Division, mais ce sont des gens qui se sont battu avec la Division, et comme disait le Gén. Simonds, si on les avait enlevés et remplacés par d’autres avec plus de points, les régiments auraient été composés de parfaits étrangers. »
Le marché noir et les cigarettes ça continue dans l'Armée :
« Le guilder n’a pas été aboli, mais changé pour une nouvelle émission. Cà a arrangé les choses un peu, car les prix ont baissé, les cigarettes se vendent maintenant 25 guilders pour 100. Un autre changement de monnaie étoufferait probablement le marché noir. » …. « Continue à m’en faire envoyer au nom de différente personne, par lots de 300 ou 600 (pas plus que 600) et je les recevrai mieux. Cà va me permettre de me faire des fonds pour aller à Paris! Les cigarettes se vendent maintenant 25 nouveaux guilders le 100, mais le nouveau guilder vaut maintenant 35 francs belges et 45 à 50 francs français sur le marché noir, comparé à l’échange officiel de 17 et 18.45 respectivement, alors nous n’y perdons pas beaucoup. »
A la fin du mois une permission lui permet de visiter Amsterdam :
« Jeudi après-midi j’ai demandé à la « réceptionniste » au Club des Officiers si elle pourrait me trouver une guide pour visiter Amsterdam avec moi. Je l’ai rencontrée à 10 ½ hier matin et nous sommes allés visiter le Musée où il y a toutes les peintures de peintres hollandais, Rembrandt, Van Dyk, etc. C’est très intéressant. Dans l’après-midi nous sommes allés faire le tour d’Amsterdam en bateau à travers les canaux qui traversent la ville et le port. J’ai bien aimé cà. Je n’avais pas mon camera pour prendre des photos, mais c’était aussi bien, car il pleuvait à plein ciel. Au souper nous avons rencontré deux officiers du régiment qui allaient à une joute de hockey à La Haye et nous sommes allés avec eux. C’était une partie entre la 3ième Division et l’artillerie de la 4ième Division. La 4ième Division a gagné 4-0 et cà a été une très belle partie. L’Aréna était remplie et les Hollandais ont bien aimé cà. Nous sommes revenus à minuit, et j’ai laissé la guide chez elle en revenant, ce qui m’a évité une bonne marche! »
Les premiers voyages d’avions trans-atlantique de passagers[b] (c'est bien d'avoir du gallon!) :
"Il est 11 ½ , et je t’écris à ma chambre. Nous avons eu ce soir un souper d’adieu pour [b]le Colonel qui part demain et qui s’en retourne au Canada par avion; il sera probablement chez lui à Montréal dimanche!"
Donc il part le vendredi 26 octobre 1945 et sera à Montréal dimanche! C’est la fin des traversées en bateau.
Il reçoit quelque chose de spécial durant ce mois
« Nous avons eu nos médailles il y a quelques jours; j’ai la « Italy Star », « France & Germany Star » et la C.V.S.M. que tout le monde a. »
39-45 star, France-Germany star, Italy star:
Defence medal, 39-45 medal, CVSM médaille du volontaire canadien avec barette du service outre-mer.:
J’ai toujours cru que les médailles étaient envoyées par la poste…. Au Canada.
Mais toute ces sorties, soupers et congés ne mettent qu’un léger baume de l’ennui qu’il ressent et de sa hâte à revenir à la vie civile.
« Ce sera ta fête le 7 novembre. Je te présente mes meilleurs vœux de santé et de bonheur. L’an dernier à la même époque nous n’avions pas été séparés depuis longtemps, mais tu avais l’inquiétude de me voir aller au combat et exposé à toutes sortes de danger; à part cà tu étais enceinte et tu avais raison d’être inquiète de ce côté. Cette année la situation est meilleure; S... est né et tout s’est bien passé et vous êtes tous deux en bonne santé. D’autre part la guerre est finie et ce n’est qu’une question de 3 mois avant que nous soyons réunis. Cà aurait pu mieux aller, mais je crois que nous avons raison d’être satisfaits de la tournure des évènements. Je te souhaite que cà continue à mieux aller cette année. J’espère que nous pourrons enfin dans le cours de l’année nous installer réellement chez nous et vivre une vie normale. ....."
A bientôt pour le mois de novembre 1945. Je mettrai ici et là des images pour agrémenter ce message
Dernière édition par CWAC le Ven 3 Mai 2013 - 20:22, édité 1 fois
CWAC Lieutenant-Colonel
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Sujet: Re: Correspondance d'un Lieutenant canadien WW2 Ven 3 Mai 2013 - 20:21
Bonjour me revoilà afin de vous offrir le mois de novembre 1945 de la correspondance d’un lieutenant d’artillerie de l’armée Canadienne.
En novembre 1945 mon lieutenant est toujours en Hollande à Amersfoort plus précisément. Il a été dur pour votre humble serviteur de vous offrir ce mois, car mon ordinateur à « crashé ». Merci Windows!. J’ai dû ré écrire ce mois de novembre…. De plus dans ce mois (grâce à la numérotation du lieutenant) j'ai constaté qu'il me manque 2 lettres et 1 est censurée! Je croyais cela fini. J’aimerais avoir un labo à la « CSI » pour savoir ce qu’il est écrit….
C’est un mois où l’on voit le rapatriement des troupes se faire de plus en plus rapidement. Le départ des effectifs font que ceux qui restent doivent « s’adapter » à de nouvelles tâches :
« Tu dois être surprise de voir arriver une lettre de Bruxelles. Lundi on m’a dit que l’officier qui s’occupe de la cantine part prochainement pour le Canada et que c’est moi qui le remplace. Alors j’ai travaillé avec lui lundi, mardi et mercredi pour me mettre au courant de la comptabilité, et aujourd’hui je suis venu à Bruxelles avec lui pour acheter la bière et la boisson, pour voir où il fait ses achats, etc. La plupart des établissements étaient fermés aujourd’hui à cause de la Toussaint, et il va falloir nous dépêcher demain si nous voulons tout faire, car il nous faut retourner demain soir. »
Et aux peines d’un gestionnaire de cantine :
« J’ai eu ne journée assez mouvementée aujourd’hui. Hier dans notre distribution de boisson il nous manquait une caisse de 12 bouteilles de « liqueur à l’orange », quelque chose du genre de la « bénédictines » et assez dispendieux. Ce matin le sergent est retourné à l’entrepôt, ils ont pris leur stock et se sont aperçus qu’ils en avaient 2 caisses de trop! Mous en avons pris une, et quelqu’un court encore après l’autre! »
http://www.finestandrarest.com/liqueurs.html
Quand ce n’est pas l’inventaire ce sont les camions de l’armée qui tombent en panne (une impression de déjà vu chez nous):
« Je suis revenu de Bruxelles hier soir à 10 ½. Lorsque je t’ai écrit jeudi soir, tout avait bien marché jusque là. Vendredi matin le chauffeur d’un des camions me dit que son camion ne marche plus. Nous l’avons amené à un garage « linney », et il n’a pas été prêt avant 2 heures de l’après-midi , quand nous aurions pu charger notre bière à 10 heures de l’avant-midi. Avec l’autre camion je suis allé chercher le gin et le cognac, et les factures n’étaient pas prêtes, ils n’avaient pas l’approbation de la douane, etc, de sorte que je n’ai pas pu l’avoir avant 1.30. Il a fallu charger notre bière à 2 heures, et nous n’avons pas été prêts à partir avant 3 ½. Pour comble de malheur, notre gros camions a manqué de pétrole à 10 milles d’Anvers où nous devions nous remplir. Il a fallu aller en chercher et revenir , car il ne nous en restait pas assez pour les deux! Nous avons soupé à Anvers et sommes repartis à 6 ½ . »
Il manque une belle occasion de voyage :
« Je voulais aller dans le sud de la France, et j’ai manqué mon coup pendant mon voyage à Bruxelles. Le Major qui est commandant du régiment est parti hier matin pour 12 jours, avec un autre officier et ils cherchaient quelqu’un qui parle français pour aller avec eux. Comme j’étais absent, ils vont amener le Dr P…… notre médecin. La « bad luck » me court! ….. »
Il compense par un 2ième voyage à Paris :
« Je suis parti un lundi et me suis rendu à Nijmegen en automobile. On m’avait dit qu’il y avait un train pour Bruxelles à 4.15 p.m., mais ce train avait été cancellé et le seul train de congé était à 2 heures le lendemain matin, et venait de Hanovre en Allemagne. Il était 2 ½ en retard et est arrivé à 4 1/2. Nous avons attendu tout ce temps sur la plateforme! Nous sommes arrivés à Bruxelles vers 10 heures du matin, pas mail fatigués, et nous sommes partis pour Paris le soir à 10.30. J’ai pu avoir un lit, alors cà m’a reposé de la nuit précédente. La première chose que j’ai faite en arrivant à Paris a été de me retenir un lit pour mon retour! Comme j’y étais déjà allé, il y a quantité de choses que mes amis voulaient voir et que j’avais vues, alors je ne les ai pas suivis beaucoup. Je suis allé voir Fontainebleau. C.est un magnifique château dont certaines parties sont tr`s anciennes, mais qui est très bien conservé. Je l’ai aimé beaucoup plus que le château de Versailles. Tu remarqueras sur les cartes postales que je vais t’envoyer la salle de bal de Henri II. C’est ce que j’ai vu de plus beau à date. Nous n’avons pas visité les jardins, mais on dit qu’ils ne sont pas aussi beaux que ceux de Versailles. » …….
http://www.musee-chateau-fontainebleau.fr/
Une dernière belle description des lieux visités. Son « kodak » doit être toujours en panne….
« Je suis allé à la Monnaie, Bibliothèque Nationale, Musée de la Marine, Musée des Colonies, Sorbonne et Faculté de Droit à l’Université, et une revue de modes! A la Monnaie nous avons vu le métal fondu, la lamination, le découpage en rondelles, la recuite et l’étamage. Ils font là la monnaie pour l’Afrique du Nord et l’Indochine, qui n’est pas la même que pour la France; j’ai essayé d’en avoir une pièce de chaque comme souvenir, mas cà a été impossible! Nous avons ensuite visité l’endroit où ils font les médailles de toutes formes et grandeurs, jusqu’à environ 6 pouces de diamètres.
La bibliothèque Nationale est très intéressante et très bien organisée. Il y a là je crois plus d’un million de volumes de toutes sortes, et c’est très intéressant de voir comment ils peuvent se retrouver dans tout cà!
Le Musée de la Marine nous montre différents modèles de vaisseaux depuis les galères jusqu’aux vaisseaux de guerre modernes et vaux vaisseau de la marine marchande comme la Normandie.
Le Musée des Colonies nous montre toutes sortes de produits des colonies et toutes sortes de choses typiques sur chacune. Il faisait très froid à l’intérieur du Musée, alors vers la fin nous somme passés assez vite.
Je suis allé à la Sorbonne et à la Faculté de Droit avec la guide qui est venue avec moi au Musée de la Marine. C’est une licenciée en lettres de la Sorbonne, qui a étudié un an en Angleterre et prépare son doctorat; elle fait une thèse sur Shakespeare! Elle est très intéressante. C’était l’inscription des étudiants, alors il y avait beaucoup de monde partout. »
http://fr.wikipedia.org/wiki/Sorbonne ....... « Je n’ai pas fini de te raconter mon voyage à Paris; je t’ai raconté ce qui j’avais fait l’après-midi. Le premier soir je suis allé chercher la guide que j’avais connue au mois d’août, et je l’ai amenée souper au Club de Officiers et nous avons passé la soirée là. Sa mère est malade au lit et elle m’a dit que c’était d rhumatisme et qu’elle devrait avoir le résultat de la radiographie. Sa mère a un cancer de la colonne vertébrale et il y a déjà une vertèbre de disparue! Le médecin lui dit que c’est une question de temps, un an ou deux, et qu’il n’y a absolument rien à faire excepté lui donne de la morphine pour apaiser al douleur. Je tiens à te dire qu’elle n’était pas très joyeuse. Elle demeure seule avec sa mère et est seule enfant; son père a divorcé sa mère lors qu’elle avait quelques mois et elle ne l’a jamais connu. C’est un avenir peu réjouissant. Je suis allé un soir avec des amis voir la représentation au « Bal Tabarin », je suis allé un soir à un théâtre « Potinière » voir « Le printemps de la St-Martin » avec Meg. Lemonnier et Jeanne Aubert, deux actrices bien connues. Il y avait une scène où elles prennent une « baloune »* ensemble; c’était rendu à la perfection. J’ai essayé d’aller voir « Faust », mais je n’ai pas pu avoir de billet. Je suis allé au ballet à l’Opéra. C’était très bien. L’artiste principale dans l’un des ballets était Yvette Chauviré, une des meilleures danseuses au monde; elle jouait dans le film « La mort du cygne ». Je suis allé à « La Potinière » et à l’Opéra, avec G….. S……
http://fr.wikipedia.org/wiki/Bal_Tabarin
http://fr.wikipedia.org/wiki/Jeanne_Aubert
http://fr.wikipedia.org/wiki/Meg_Lemonnier
http://fr.wikipedia.org/wiki/Yvette_Chauvir%C3%A9
*Prendre une baloune= prendre un petit coup de boisson
Ces voyages lui permettent de voir que les gens des pays libérés font déjà des pèlerinages vers les cimetières militaires. Un geste qu’il apprécie :
« Tout le long du chemin cet avant midi; en Hollande et en Belgique, il y avait des foules dans les chemins avec des fleurs se dirigeant vers les cimetières, et toutes les tombes des soldats et les cimetières militaires étaient garnis de fleurs. Ces gens là réalisent ce que les alliés ont fait pour eux et ne nous oublieront pas de sitôt …. »
Qui dit voyage dit argent et le « système » des cigarettes est de retour
« Comme je vais retourner à Bruxelles chaque semaine, je vais avoir beau à acheter toutes sortes de choses. Alors voudrais –tu me faire envoyer environ 1 800 à 2000 cigarette aussitôt que tu pourras et au nom de différentes personnes. Cà me permettra de me procurer l’argent. »
Et il déchante vite face à l’inflation à Bruxelles…Paris et les « dommages collatéraux » que cela apporte :
« La fête de St-Nicolas au commencement de décembre est une fête pour les enfants en Belgique et en Hollande comme Noël chez nous. Il y a beaucoup de décorations dans les vitrines, mais les jouets sont plutôt rudimentaires et à des prix exorbitants. Cette fête va probablement être triste pour bien des enfants en Belgique et en Hollande! » …… « Ce soir avant souper, je suis allé faire quelques commissions à pied et je suis passé dans quelques rues commerciales de la ville. Les vitrines ici sont magnifiques et sont remplis de jouets presque comme en Canada en temps de paix, mais il faut voir les prix! On peut se procurer de tout en Belgique, comme par exemple des bas de soie naturelle à 600 francs la paire ($15.00) et le resto à l’avenant. Je me demande quand la situation économique va se stabiliser en Europe. »
15$ canadien c'est le prix que j'ai payé en 1990.
La date du retour se précise avec 3 semaines d’avance…. :
"Il y a plusieurs officiers avec un grand nombre de points qui partent cette semaine et la semaine prochaine. Ils ont touts plus d 130 points, et je n’en ai que 90, alors! Tout de même, c’est encourageant de les voir partir, cà veut dire que notre tour viendra bientôt. J’ai dû te dire que la 4ième Division commence à partir de Hollande le 8 décembre; le Régiment devrait partir vers le 12 ou 15, et être en Angleterre avant le 18; nous aurons probablement d’autres détails sous peu."
Le cuisinier travaille fort afin d’épuiser son stock de Noël :
"Nous avons ce soir un grand party au mess en l’honneur de ceux qui partent. Nous avons cocktails à partir de 6 heures, dîner à 7.30 et danse de 9.30 à 3 heures. Nous aurons un souper au poulet. C’est S….. qui est secrétaire du mess depuis 2 semaines, et il a une petite grange en arrière de l’hotel remplie de poulets, oie, lapins, etc. Il s’était préparé pour Noël, alors comme nous ne serons pas ici, nous allons bien manger jusqu’à notre départ."
Mais l’oie ne semble pas nourrir son homme :
« Je t’ai écrit hier soir avant souper. Nous avons eu le souper à 6 heures, de l’oie; c’était très bon, mais j’avais encore faim après souper. Nous sommes allés avec un groupe à Hilversum, au Grand Hotel, vers 8 heures, et nous avons pris un deuxième souper à 9 heures; c’était une espèce de volaille qui ressemble à la perdrix et nous avons pris un lunch avant de partir à 12 ½ . J’ai mangé à ma faim! »
Et ce départ devancé causera aussi un problème avec le système des cigarettes…
« Je te remercie beaucoup des cigarettes que tu n’as envoyées, mais avec notre départ avancé de 3 semaines, j,ai bien peur de ne pas les recevoir avant mon départ de Hollande! »
Tous ces partys d’adieu en galantes compagnies font que son épouse a des questions à ce sujet. On cerne bien le Québec puritain des années 40-50 :
« Tu me demandes dans une de tes lettres comment ce serait vu si tu allais danser avec des amis et si tu en recevais chez vous. Cà ferait parler bien du monde, tu peux en être sûre! Ici c’est une chose admise qu’une femme dont le mari est absent peut aller à des danses avec des amis sans que personne ne jase, et le fait est que celles qui veulent bien se conduire se conduisent bien; la seule différence est pour celles qui sont de moralité plutôt douteuse; chez nous elles doivent se cacher, tandis qu’en Europe elles ne prennent pas la peine de le faire!"
Mais je m’interroge sur ce commentaire, les cancans et jugements devaient avoir cours aussi en Europe…. Et j’ai lu lors de mes recherches que la présence des soldats et l’attente de leur retour auraient causé des tensions parmi les populations civiles avec les soldats.
Mon lieutenant désespère à l’idée de passer Noël sur le sol anglais et il n’est pas le seul :
« Il fait très beau aujourd’hui, mais cà commence à être froid; il y avait un peu de glace sur les étangs ce matin. Plusieurs officiers sont partis cette semaine, et je suis convaincu que la plupart aimeraient mieux rester pour revenir avec le régiment, car ils ne seront pas chez eux pour Noël, et arriveront en Canada probablement une semaine seulement avant nous. Tout le monde ici est d’accord pour dire que nous aimerions beaucoup mieux passer Noël en Hollande qu’en Angleterre! »
Il ne faut pas oublier qu’il avait passé juillet 1944 à janvier 1945 en Angleterre…. A attendre…
À bientôt pour le dernier mois, décembre 1945, de cette correspondance qui aura duré 16 mois. J’y mettrai l’écrit de la seule lettre de sa conjointe qui me soit parvenue.
CWAC Lieutenant-Colonel
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Sujet: Re: Correspondance d'un Lieutenant canadien WW2 Ven 31 Mai 2013 - 1:59
Bonjour à tous pour vous offrir le DERNIER MOIS de cette correspondance de 18 mois entre un lieutenant de l’artillerie canadienne et son épouse durant la 2ième guerre mondiale. Soit de fin juillet 1944 à la fin décembre 1945.
J’ai décidé de vous mettre en ligne le scan intégral de certaines lettres et la seule lettre (que j’ai en main) en réponse de son épouse.
Ce mois de décembre se termine abruptement sans que je puisse savoir la fin de l’histoire car il semble qu’il me manque 1 mois et plus de correspondance. Mais je me compte chanceuse de pouvoir avoir mis la main sur ce lot de 70 ans presque complet.
Souvent les couples brulaient leurs lettres « d’amour » après les avoir lues une dernière fois pendant que les enfants dormaient. Mes parents l’ont fait.
Ce lieutenant a fait presque partie de ma vie durant les quelques mois qu’a durée la retranscription de ses lettres. C’est spécial.
J’espère que vous aurez apprécié cette capsule du temps de l’histoire du quotidien des gens souvent oubliée au contraire de l’Histoire avec un grand H! A tous ceux qui ont ces papiers fragiles et éphémères de bien les conserver ou du moins les transmettre à d’autres pour leur conservation.
Donc je reprends en décembre 1945.
Les lettres sont maintenant plus courtes et fébriles. C’est les derniers jours en Hollande, un pays important dans l’histoire militaire canadienne. Les relations avec les Hollandais sont toujours vivantes, les tulipes du parlement d’Ottawa en témoignent. De nombreuses rues hollandaises portent le nom de soldats canadiens.
Je mets en intégral cette lettre qui résume bien la fébrilité et les petits problèmes des derniers instants :
"-229- Nijmengen, 9 Déc 45 Mon cher petit amour Enfin je suis sur le chemin du retour! Ce sera peut-être long, mais du moins je suis parti. La dernière fois que je t’ai écrit c’était mercredi soir je crois. J’ai été très occupé depuis à finir mes rapports de cantine, fermer mes livres, remettre l’argent, paqueter et déménager. J’ai remis mon dernier rapport financier à 3 ½ vendredi après-midi et je suis parti à 4 heures pour aller au 5th Anti Tank. On m’a donné une chambre et montré le mess. Ils ne sont pas aussi bien installés que mous; ils ont le chauffage central dans leur bâtisses et du charbon, mais ils sont trop cocos pour s’en servir et comme il fait très froid depuis vendredi, nous avons gelé. Il est tombé quelques pouces de neige vendredi, et la terre est gelée dure; c’est une température comme nous avons au Canada au commencement de l’hiver. Samedi midi j’ai téléphoné au 15th Field pour leur demander si j’avais de la malle. On m’a dit que j’avais une lettre et 600 cigarettes. Je suis allé dans l’après-midi et j’ai trouvé la lettre, mais pas les cigarettes; tout le monde les a vues sur la table le midi et elles étaient disparues! Tu peux t’imaginer si j’étais de bonne humeur. Samedi soir les officiers allaient presque tous à Hilversum au Grand Hotel, pour souper et passer la soirée. J’aurais bien aimé y aller, mais il fallait que je m’occupe du transport pour ce matin et il nous fallait nous lever à 6 heures, alors j’ai décidé de rester tranquillement au mess et de me coucher de bonne heure. Ce matin nous avons eu le déjeuner à 7 heures et sommes partis vers 9 heures pour venir ici. Comme je suis en charge des bagages pour la batterie, j’ai fait le voyage dans le devant d’un camion et ce n’était pas chaud! Je suis arrivé ici les pieds gelés, mais je me suis réchauffé depuis, car la bâtisse est assez bien chauffée ici. Il se pourrait que nous passions quelques jours ici, car il y a 4 ou 5 drafts en avant de nous, mais enfin nous pourrions compter être en Angleterre avant le 15 décembre. Ma nouvelle adresse est celle que j’ai au dos de l’enveloppe et la malle adressée au 15th Field est supposée me suivre. Je me demande combien cà va prendre de temps! Bonsoir mon petit amour. Je t’embrasse bien fort. Amitié à tous. Embrasse S… pour moi. A…."
C’est un dernier party, un party d’adieu à la Hollande et il y avait un peu de sa chère station balnéaire de Noordwijk (il y a été environ 4 à 5 fois en congé) de quoi donner le goût de la visiter:
« Notre party samedi soir a été parfait. Nous avons eu le diner de 7.30 à 9.30. Pendant le diner, St-Nicolas (le Santa Claus des Hollandais) est venu distribuer des cadeaux. Nous étions supposés donner un cadeau à notre compagne et elle était supposée nous en donner un, et les deux étaient supposés composer quelque chose en vers si possible. J’ai donné à ma compagne un mouchoir brodé de Bruxelles, ils je n’ai pas eu le temps de composer des vers! , alors je lui ai mis ceci : « I am not suggesting that you will have to dry your eyes when I leave Holland ». C’était mieux que rien, mais j’ai eu honte de ma prose lorsque j’ai lu ce qu’elle avait composé pour moi; je l’ai gardé comme souvenir et je te le montrerai; elle m’a donné un petit coupe-papier qui est supposé être une réplique de l’épée de Napoléon. Nous avons eu le champagne au diner, une entrée aux crevettes, du poisson cuit dans le vin blanc, de l’oie, dessert, etc. Nous avons eu un très bon orchestre de 10 à 3 heures du matin toutes les sortes de cocktails et « drinks » inimaginables, un « lunch » à minuit; avec sandwiches assorties, et entre autres, sandwiches au foie d’oie cuit dans le cognac!, etc. Nous avons comme « barman » Jos. , le barman que nous avions à Noordwijk cet été, et c’est lui qui s’occupait aussi des waiters pendant le diner, et nous avions aussi le « cook » de NoordwijK! Ce party a coûté 1 500 guilders ($600.), et nous n’avons rien eu à payer, par un des prodiges de finances de Simard! Nous étions 30 couples, et l’Ambassadeur Canadien en Hollande, Pierre Dupuis était présent."
Il est bien conscient que ce genre de vie n’est pas « normal » et tout s’est déroulé selon les prévisions de l’Armée:
« Nous sommes presque partis de Hollande maintenant, car ici nous sommes dans un camp et ne pouvons pas sortir. Notre séjour en Hollande va laisser chez les Canadiens le souvenir d’un rêve agréable. Je dis un rêve, car tout là-bas était si loin de la vie réelle. Nous avons vécus dans les meilleurs hotels et les meilleurs clubs de Hollande sans qu’il ne nous en coûte rien. Nous avons eu du transport avec chauffeur tant que nous avons voulu sans qu’il ne nous en coûte rien, nous avons eu une bonne nourriture, pas aussi bonne que ce qu’on peut avoir en Canada, mais beaucoup meilleure que ce à quoi nous étions habitués en Angleterre et en action. Tout cela ne nous a rien coûté et même on nous payait pardessus le marché. Le même train de vie en temps de paix coûterait énormément cher et il faudrait probablement être millionnaire pour pouvoir se le permettre. Ceci revient à dire que le plan de l’Armée pour nous faire passer aussi agréablement que possible notre séjour obligatoire en Europe a bien réussi. Nous n’avions rien à faire, et s’il n’y avait pas eu ces distractions là, nous en aurions cherché ailleurs ou nous serions devenus fous! On ne peut pas s’assoir toute la journée et la soirée dans son coin et écrire des lettres ou penser qu’on a bien hâte de s’en retourner chez nous! »
Il y a de nouveaux bateaux à la disposition du Canada pour le rapatriement :
« On nous annonce aujourd’hui sur le « Maple Leaf » que nous avons 2 nouveaux vaisseaux : le « Monarch of Bermuda » et le « Duchess of Bedford », qui peuvent transporter 3,000 hommes chacun. Si nous gardons les autres, nous pourrons avoir une chance d’arriver en Canada avant la fin de janvier. »
Ma belle mère qui avait 24 ans en 1945 se souvient très bien de l’arrivée des bateaux au port de Québec. Les soldats dans leur hâte de retrouver leur famille « s’entassaient » du même côté du bateau et faisait pencher ce dernier!
Les dernières semaines d’attente sont intenables et il a hâte de commencer sa nouvelle vie et de fêter un vrai Noël avec son épouse :
« Je n’ai jamais eu bien confiance de pouvoir passer Noël avec toi cette année, mais j’entretenais toujours un secret espoir. C’est maintenant certain que je ne serai pas avec toi, mais la certitude d’être réunis sous peu atténuera la tristesse de la séparation. Nous n’avons pas encore passe un Noël ensemble depuis que nous sommes mariés. Le premier Noël j’ai dû rester au camp à Petawawa et je ne suis allé te rejoindre que l’après-midi, et l’an passé j’étais en Angleterre, sur le point de partir pour l’Italie. Les perspectives sont certainement plus intéressantes cette année. Je te souhaite donc un Joyeux Noël, aussi joyeux qu’il peut être dans les circonstances et une Heureuse Année. Nous serons réunis au commencement de l’an prochain et nous commencerons un nouveau genre de vie auquel il nous faudra nous adapter. Lorsque nous nous sommes promenés de chambre en chambre et de camp en camp jusqu’à mon départ, alors nous ne connassons rien du nouveau genre de vie que nous allons commencer. Ensuite il y a S….que je ne connais pas et qui ne me connait pas! »
Ce sont les préparatifs du départ de la Hollande et les risques :
« Il n’y a pas grand nouveau ici, excepté qu’il fait plus chaud aujourd’hui et que la neige fond. Il a plu hier soir et on dit que les chemins sont à la glace partout. Il y a eu plusieurs accidents ce matin; une « draft » du 8th Light Anti-Aircraft Regt. S’en venait dans 5 camions; le premier a glissé et tourné de travers dans le chemin; les autres n’ont pas pu s’arrêter et lui ont rentré dans le corps; Il y en a plusieurs qui boitent et qui ont des bandages, mais pas de blessure sérieuse. Un des camions du 15th Field s’est fait frapper ce matin aussi par un Ford hollandais qui a glissé dans une courbe; personne n’a été blessé dans le camion, et les occupants du Ford s’en sont tirés avec quelques coupures. Tout le 15th Filed est arrivé aujourd’hui et on m’a remis ta lettre No 201 en date du 2 décembre. »
Et les détails du voyage vers l’Angleterre la dernière étape avec le Canada :
« Nous sommes partis l’avant-midi en camions pour le « Hook », un port près de Rotterdam, où nous sommes arrivés l’après-midi gelés dur! Il y a un camp là, et nous nous sommes réchauffés et avons mangés. Nous sommes embarqués sur le bateau à 6 ½ et sommes partis vers 8 heures. Comme je me couchais vers 10 heures, cà commençait à être pas mal « rough », et il était temps que je me couche, car mon souper commençait à remonter! Nous sommes arrivés à Harwich dans la nuit et sommes débarqués dans l’avant-midi et avons pris le train pour venir ici; nous sommes arrivés vers 4 heures, fatigués et affamés car nous n’avions rien mangé depuis le matin. Nous sommes installés ici dans des vieilles casernes pas plus confortables que celles de Bordon, mais du moins nous avons du charbon. Nom compagnon de chambre et moi tenons notre feu de foyer allumé tout la journée et toute la nuit. Hier soir il y avait une espèce de petit « party » au mess, bridge, courses de chevaux, etc.; cà passe le temps. »
Et les détails du retour vers ce CHER retour au Canada se précisent :
« Quant à notre retour en Canada, on ne nous fait pas de promesses, mon on nous dit que nous devrions nous embarquer vers le 15 janvier et peut-être avant, mais cà il ne faut pas trop y compter. Ceci voudrait dire que j’arriverais à Montréal vers le 25 janvier. Nous aurons le temps d’en reparler et j’aurai la chance de te donner la date exacte plus tard, mais que penses-tu de venir me rencontrer à Montréal; je devrai y passer une journée ou deux et nous reviendrions à M…. ensemble. Nous pourrions prendre une chambre à l’hotel ou si tu aimes mieux, aller chez ton oncle. Quant à la question d’amener S…., je laisse cà à toi, car je sais qu’il est très difficile de voyager avec des jeunes enfants; à part cà, comme il faudra que je voyage pas mal, il serait peut-être mieux de le laisser à M…... Je retournerai à Québec après mon mois de congé, pour avoir ma discharge, pas à Montréal. »
Il est à Sheffield chez des amis pour passer Noël 1945, il compte bien « rapporter » de l’Angleterre des idées pour meubler sa future demeure :
« Cà fait drôle de penser que ce sera Noël dans 4 jours, et qu’il ne fait pas plus froid que cà ici. L’herbe est encore verte sur le gazon en avant de la maison, et les poules de Mme C… sont dehors tous les jours. Je vais certainement trouver un contraste en arrivant en Canada, mais il y a une chose que je vais apprécier, c’est qu’il va y avoir moyen de se réchauffer dans les maisons. Ici il fait souvent plus froid dans les maisons que dehors. Depuis que je suis ici, je trouve un bon côté aux foyers; ils ne donnent pas de chaleur, mais c’est joli; si nous nous construisons jamais une maison, nous aurons un beau foyer et à part cà un bon chauffage central! »
Et ces festivités de Noël 1945 semblent être moins faciles qu’en temps de guerre :
« Les gens ici en Angleterre disent que le rationnement est plus sévère et pire depuis la fin de la guerre que pendant la guerre. De ce temps-ci c’est une ruée pour les dindes pour Noël. Le prix officiel est de $1.00 la livre, alors on peut se demander quel est le prix sur le marché noir! Les journaux sont remplis d’histoires de vols de dindes, whiskey, gin, etc. Ils n’expédient plus la boisson par chemin de fer maintenant, car elle se fait voler dans le voyage d’Écosse à Londres; on l’expédie par camions dans lesquels on a des gardes armés! C’est te dire que l’Angleterre aussi a ses problèmes et n’a rien à envier au canada et aux États-Unis pour la « vague de crimes ». »
En passant 1.00$ la livre c’est le prix que j’ai payé en 2012 pour la mienne…
Voici la seule correspondance (que j'ai en main) de son épouse et la réponse du lieutenant :
« 202 ou 203 M……, 12 xxx Les taches d’encre ont caché le reste. Cher A.........; Ca fait plusieurs jrs que je ne t’ai pas écrit. Ca ce comprends, S… a la grippe. Il fallait bien qu’il soit malade pendant mon séjour chez-nous. Il a percée une dent la nuit dernière, alors tout ensemble, il est plutôt maussade. J’ai téléphoné à Maurice lundi, il était lui-même bien grippé. J’ai fait ce qu’il m’a dit. Il est venu le voir à midi. Il ne fait pas 100 de temp. Il tousse et il a le cerveau embarrassé. 13 déc. Je n’ai pas eu le temps de finir ma lettre hier au soir. S..... a dormi tout la soirée et l’avant-midi ce matin mais il a pleuré presque toute la nuit. Il a mal aux dents. Il me mordait le bras avec ma robe de chambre par-dessus. Il parait mieux aujourd’hui. Mlle L…….. vient de venir et ne l’a pas trouvé magané. Excuse les deux placards d’encre sur l’autre côté. J’ai laissé ma plume dessus- que veux-tu je n’ai pas le temps de recommencer. Je m’excuse de ne pas t’avoir écrit pendant presque une semaine. Tu dois te préparer à quitter la Hollande. C’est la deuxième étape s de ton voyage vers le Canada. Enfin, peut-être dans un mois tu t’embarqueras pour revenir. Quel bonheur de nous retrouver et quel soulagement de ne plus être seule a veiller sur S…... R….. O….. est arrivé. Sa mère était montée le rencontrer à Montréal et ils ne se sont pas rencontrés. Lui est arrivé dimanche matin et a pris un taxi pour M……. Il est remonté à M…… avec Robert la chercher. Tu comprends son désappointement. Alors, j’ai décidé de ne pas aller te chercher à M……ou M……, nous serons certains de nous rencontrer. R…… dit qu’il est pas mal certain qu’Albert va arriver avec Dédé le 23 à New-York, que Dieu le veule! Il fait très froid depuis hier. J’avais autre chose à te dire et ma mémoire fait défaut. S…… est dans sa bassinette près de moi. Par intervalles, il s’asseye debout sans se tenir les mains sur les côtés. Comme tu vois qu’il n’est pas trop faible. Il est pas mal certain qu’il marchera dans un mois. Bon, je me rappelle!... Tu as un paquet parti hier. Une autre can de poulet avec une can de poires. C’est pas mal bien qui que tu reçoives ton poulet pour Noel. Je n’ai pas eu le temps de répondre à Pierre. J’ai reçu une lettre de Jeannette me demandant son adresse. Elle n’avait pas eu de ses nouvelles depuis qu’il est à St-Jean. Au revoir cher mari, S…… embrasse son papa. Je t’embrasse.
F…………. »
Et la réponse du lieutenant par cette lettre qui EST LA DERNIÈRE :
« -237- Aldershot, 28 Dec. 45 Mon cher petit amour Je suis revenu de Sheffield hier soir. A mon retour j’ai trouvé ta lettre No 203 en date du 13 décembre, une lettre de Maman et une lettre de W….. qui m’invite à aller le rencontrer à Londres. Je n’ai pas de nouvelles d’Albert, alors je suppose qu’il est parti pour le Canada; je le lui souhaite bien! J’ai reçu aujourd’hui ta lettre du 17 adressé à ma nouvelle adresse, mes lettres vont probablement arriver plus régulièrement maintenant. Toutefois je n’ai pas encore reçu de cigarettes ou de paquets. J’espère qu’ils vont se retrouver bientôt et arriver. Je croyais t’avoir donné dans une lettre l’attribution de la dentelle, etc. pour cadeaux de Noël; cette lettre a peut-être été écartée. Je te disais que le centre et les petites serviettes étaient pour toi, la dentelle pour A…… et distribuer les mouchoirs. Toutefois si tu juges bon de faire une autre distribution tu es parfaitement libre. Je regrette beaucoup que la dentelle ne soit pas ce qu’A…. voulait; je leur ai demandé de la dentelle pour garnir de la lingerie et on m’a donné cà; ils en avaient tout un assortiment du même genre. Comme je ne suis pas un expert en la matière, j’ai cru que cà ferait l’affaire. Mr P…. et Mme G…… sont partis; ils auraient pu toffer 2 ou 3 semaines de plus et sauter le temps de fêtes! S……. a eu la grippe et t’a pas mal empêché de dormir! Je te souhaite bien qu’il se rétablisse promptement pour que tu puisses dormir la nuit! Si tu veux venir me rencontrer à Montréal, et pour qu’il ne nous arrive pas la même aventure qu’à R….. et Mme O……, tu peux prendre une chambre à un Hotel, comme le LaSalle et avertir chez ta tante et Jean, alors si je rencontre personne à la gare, je pourrai téléphoner et savoir où tu es. Je te propose cà si cà te convient, car il se pourrait que je doive passer 2 ou 3 jours à Montréal, car je ne veux pas y retourner; je veux aller à Québec pour ma décharge et je veux tout arranger en passant à Montréal. Le fait que je n’ai pas de nouvelle d’Albert semble bien confirmer ce que R……O…..disait qu’il retournerait en même temps qu’Addie. Bonsoir mon petit amour. Je t’embrasse bien fort. Amitié à tous. Embrasse S……pour moi. A..... »
FIN.
Au revoir et à bientôt pour les « statistiques » en long et large de cette correspondance. Le nombre de lettres, les lieux visités et mis sur une carte. Le nombre de mots par lettre, le temps pris pour recopier et scanner ces lettres.
CWAC Lieutenant-Colonel
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Sujet: Re: Correspondance d'un Lieutenant canadien WW2 Jeu 6 Juin 2013 - 20:05
Bonjour, voici ma dernière contribution pour cette correspondance d'un lieutenant canada à sa femme pendant 1944-1945. Les statistiques, petite déformation professionnelle.
Lieux visités par Alex
En gras sont les lieux visités pour des raisons militaires. Les autres sont des villes visitées au cours de ses nombreuses permissions. Et ses coups de coeur, celles qu'il aimerait visiter avec son épouse.
De sa Gaspésie au Québec, Canada
Ontario camps Canada
Pembrooke Petawawa Brockville
Nouvelle Écosse Canada
Debert Truro Hallifax pour son embarquement vers l'Angleterre
Angleterre
Gouroch débarquement l’embouchure le la Clyde Bordon Camp Londres gare de Waterloo pour ses permissions bien qu'il ait aimé Londres, cette ville ne fait pas partie de celles qu'il a le plus décrit, peut être une destination qu'il a vue trop en temps de guerre. Daiileurs il relate en tant que témoin l'explosion d'une V1. Horley Aldershot Farnham Petersfield Liphook Havant Brighton Lewes Seaford camp Pour sa formation complémentaire d'artilleur White Cliffs of Dover Alfriston camp Sheffield congé 9 jrs où il va habiter chez des amis. L'épouse est d'origine canadienne. Il ira en décembre 44 et 45. Alton Woking camp Whitley Bramshot travail dans le cadre d'une cours matiale, son expertise en droit civil est mise à contribution. Sunningdale pour un entrainement sous la tente Gouroch embarquement l’embouchure le la Clyde pour son départ en action en tant que régiment de réserve vers l'Italie
L'Italie Il me maque plusieurs lettre de l'Italie, plus d'une douzaine. Donc moins de précision sur ce pays.
EBOLI camp Naples Pompéi ... sans commentaire Salerne Montevergine Mone de Santa Virgine pour le "cordial" des moines AVELLINO camp renfort Naples embarquement
Départ pour Nord ouest Europe
détroit entre la Corse et la Sardaigne à essayer de ne pas rencontrer les U Boats allemands
France Marseille débarquement et il y a peu de précision sur son voyage car il part en action et sera des derniers combats en Allemagne
Travaverser la France en train Belgique Gand camp Opéra Royal Bruxelles Il y fera plusieurs voyages lors de ses congés et pour le travail après guerre.
Hollande
Anaheim Arnhem
Allemagne
En combat direct, officier d'artillerie en support à l'infantrie, déminage... sur le terrain. Il enlèvra plus de 100 mines et éviter les Air bust allemandes
15 milles au nord-ouest d’Altenbourg à environ 30 milles du sud de Wilhelmshaven. Kusten Canal Bad Zwischenahn Friesoythe
Retour en Hollande à la fin de la guerre pour la gongue attente d'un retour au Canada
NEEDE camp Nijmegen transit train voyage Almelo Club officiers AMERSFOORT Hilversum Club officier ZUTPITEN APELDOORN UTRECHT ROTTERDAM RIJSSEN bal du régiment!!Il y fait une longue description de cette fête. L'évènement l'a marqué. Plus de 500 convives invitées. ENSCHEDE club officier NOORDWIJK AAN ZEA station balnéaire qu'il visitera 5 fois!
France Paris congé 9 jrs qu'il visitera 2 fois. Il y a de très belle description et de l'ambiance de cette ville se remettant de la guerre et l'occupation.
Hollande Zeist club officiers Amsterdam
Tchécoslovaquie livraison camions et nombreuses pannes en chemin Hollande Deelen entre Apeldoorn et Anheim départ Pour traverser la région où les alliés se sont battus dans l’offensive préliminaire à la traversée du Rhin
Traverser Allemagne Colongne par Boon, Coblence, Mainz et Bingen Frankfort Nuremberg il a visité le Stade et s'est tenu sur l'estrade où Hitler donnait ses discours.
Tchécoslovaquie Traverser les Sudètes Pilsen
Hollande
Neede retour pour un transfert vers Amersfoort camp La Haye
Belgique Bruexelles travail comme officier responsable de la cantine France Paris pour son deuxième voyage.
Décembre 45 c'est le départ vers l'Angleterre Hollande Nijmegen camp Oostende embarquement par train Hook port d’embarquement
Angleterre Harwich port d’arrivée
Aldershot camp Camp d’attente pour retour au Canada Sheffield pour le congé de Noël Aldershot
A partir de ce moment je n'ai plus de lettres, mais il discutait avec son épouse de scénario possible lors de son retour vers le Canada
Gouroch port d’embarquement New-York ou Montréal Montréal Québec pour sa discharge Et retour en Gaspésie
242 lettres écrites pour une moyenne 550 mots par lettres. Mon lieutenant n'était pas avare en mots. 20 lettres de perdues sur ce lot sans compter celles après décembre 45.
Pour retranscrire cela m'a pris environ 80 heures. Dans une de ces lettres le lieutenant voulait en faire un journal de guerre. Il ne pensait pas attendre si longtemps avant l'action. Mais ce qu'il a vu ... en était assez pour lui.
15 heures pour les scans et copie de sécurité. Il me restera quelque chose si j'amais je décide de les donner à un musée.
pour un 100 heures minimum minimum de travail. Donc comme je le disait au début "crazy Cannuck"
Aurevoir, merci de m'avoir lu. Et peut être à la prochaine car j'ai un autre projet, cette fois pour la prériode de 1918 à 1922.
CWAC Lieutenant-Colonel
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Sujet: Re: Correspondance d'un Lieutenant canadien WW2 Mer 17 Juil 2013 - 0:11
Ah oui j'oubliais... Il me restait une dernière information à transmettre à cette histoire de mon lieutenant d'artillerie. Boucler la boucle en somme.
Malgré mes recherches sur internet, je n'avais trouvé que la date de naissance du lieutenant, sa date de mariage, le nom de sa conjointe et de leurs trois enfants. Je désirais savoir ce qu'il était advenu de lui et de sa conjointe.
Étant originaire de la région où il a vécu j'ai attendu mes vacances estivales pour aller voir ma famille et faire mon petit pelrinage. J'espérais y trouver quelques informations en visitant le cimetière de la ville. On trouve plein d'infos dans les cimetières et si on a un peu d'imagination on peut grâce à ces noms et dates refaire une petite histoire.
Avec de l'intuition et de la chance ? bouhhh! j'ai retrouvé sa pierre tombale dans un cimetière de centaines de tombes... après quelques minutes de recherches.
Pour une famille influente de ce ville, il a une pierre bien humble et ne se détachant pas du lot.
Il est mort à 62 ans en 1975...et sa conjointe lui a survécu 30 ans. Je dois avouer que cela m'a fait bien de la peine de savoir qu'il est mort si "jeune" cela m'a fait pensé à mon père.
Merci encore à tous ceux qui ont partagé cette lecture avec moi.
Invité Invité
Sujet: Re: Correspondance d'un Lieutenant canadien WW2 Mer 17 Juil 2013 - 11:39
Un grand bravo pour ton travail ! Tu as fait la un sacrée boulot très intéressant.
Merci d'avoir retranscrit ces lettres et d'avoir redonné vie a ce Lieutenant. Grâce a toi on ne l'oubliera pas !
CWAC Lieutenant-Colonel
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Sujet: Re: Correspondance d'un Lieutenant canadien WW2 Sam 7 Nov 2015 - 3:29
Un conseil à tous , prenez des sauvegardes de vos fichiers informatiques. Une à crypté mes documents. J'ai nettoyé le tout mais horreur mon dernier backup manquait de fraîcheur, ce qui m'obligera à retaper une vingtaine de lettres....mais J'ai toujours mes originaux.
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Sujet: Re: Correspondance d'un Lieutenant canadien WW2