Bonjour,
voici une étude assez complète sur l'armement étranger acheté par la France en 1870:
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]C'est réalisé par le musée de l'infanterie.
On peut facilement l'imprimer sur 9 pages.
Juillet 1870, la France mobilise. L'armée d'active composée d'engagés et d'hommes que le tirage au sort a désigné pour un service militaire de sept ans, est mise sur le pied de guerre, on rappelle les réservistes et les soldats en congé. Le 17 juillet le Corps Législatif décide la convocation de la Garde NationaleMobile.
Cette Garde Nationale Mobile est l'équivalent français de la Landwehr de l'ennemi prussien, mais elle n'en a ni l'équipement, ni l'entraînement. C'est une organisation de création récente (1868), elle est chargée de suppléer l'armée d'active en cas de conflit et doit lui servir de réserve instruite.
Mais cette Garde Mobile n'existe que sur le papier, organisée au niveau de chaque département, elle ne possède qu'un embryon d'organisation. Elle est impopulaire auprès de la population qui voit là une extension inutile du service armé.
Il existe déjà une Garde Nationale Sédentaire organisée au niveau de chaque canton, ce sont les communes qui en financent l'organisation administrative (commission de recensement, registre, drapeaux, tambours). L'armement est fourni par le Ministère de l'Intérieur, mais soupçonnée de sentiments républicains la garde ne reçoit que des sabres et de vieilles pétoires. Quant à l'uniforme il est à la charge des mobilisés, les communes ont le libre choix de le rendre obligatoire ce qui est rarement le cas.
La Garde NationaleMobile n'est pas mieux lotie, équipée aux frais des départements elle doit recevoir un uniforme formé d'une vareuse noire et d'un pantalon bleu à bande rouge, mais bien souvent les Moblos partiront en campagne, avec pour tout uniforme un képi et un sarrau bleu où on a cousu à la hâte des pattes rouges aux épaules ! Il a été prévu que leur armement sera le fusil à tabatière résultant de la transformation des anciennes armes à percussion, mais celui-ci est en nombre insuffisant.
Dès le début du conflit, les Prussiens et leurs alliés pénètrent sur le territoire national. Très vite ils prennent l'avantage, l'armée française est balayée en Alsace et en Lorraine, plusieurs places fortes sont assiégées et c'est bientôt le tour de Paris. Le gouvernement se retire à Tours, Gambetta s'échappe en ballon et le rejoint.
Le 4 septembre la république a été proclamée. A partir du 14 octobre, on appelle sous les drapeaux les célibataires et veufs sans enfants de vingt à quarante ans, qu'on incorpore dans la Garde Nationalemobilisée.
Il y a également les corps francs et compagnies de francs-tireurs. Ce sont des unités indépendantes de 60 à 200 hommes qui s'équipent et s'arment comme ils peuvent (souvent à leurs frais) ; ils portent souvent des noms pittoresques : les tirailleurs à la branche de houx, les enfants perdus du Beaujolais, le bataillon de l'égalité de Blida, etc... Ils agissent parfois comme éclaireurs de l'armée régulière, mais dans la plupart des cas ils mènent des actions de harcèlement et de coups de main sur l'ennemi, ce qui amène des représailles de la part de celui-ci sur les populations civiles.
Plusieurs armées se forment en province et tentent des contre-offensives. Au sud de la Loire, les troupes de Chanzy se heurtent aux Bavarois et aux Prussiens et reprennent Orléans. Celles de de Pallières franchissent également le fleuve et remontent jusqu'à Beaune-la-Rolande.Mais l'ennemi se ressaisit et reprend l'offensive après avoir renforcé ses effectifs, les Français doivent se replier et les troupes allemandes continuent leur avance vers le sud, ce qui contraint le gouvernement à quitter Tours pour Bordeaux.
Chanzy va former une deuxième armée de la Loire avec des mobilisés bretons réunis au camp de Conlie dans la Sarthe. Il tente une seconde offensive en janvier 1871, mais ses troupes sont mal équipées, chaussées de sabots, mal armées et leur entraînement est très aléatoire.
Bousculées par les prussiens, elles refluent vers l'ouest et la Normandie. De l'autre côté, Bourbaki attaque en Franche-Comté mais il est contraint de se réfugier en Suisse.
Un armistice intervient le 28 janvier 1871et le traité de paix est signé le 10 mai 1871 à Francfort.
Pourtant l'armement n'aurait pas du manquer aux troupes du général Chanzy, mais elles ont seulement reçu des Springfield à percussion débarqués de l'Érié, "les derniers venus et les pires" dit un chroniqueur de l'époque, ainsi que quelques armes à tir rapide.
Cette question de l'armement des mobilisés bretons du camp de Conlie va entraîner une enquête parlementaire en 1872, celle-ci est effectuée dans le cadre de l'examen des actes du Gouvernement de la Défense Nationale qu'effectue la nouvelle chambre à tendance conservatrice, issue des urnes le 8 février 1871. Elle mettra en lumière les difficultés qu'a pu rencontrer le gouvernement de la Défense Nationale pour acheminer les armes achetées en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, ainsi que la profonde désorganisation de l'administration et de ce qui restait de l'armée.
Le Gouvernement de la Défense Nationale avait pris des dispositions pour acquérir des armes à l'étranger, ces fournitures étaient financées par un emprunt contracté auprès de la maison Morgan de Londres : 250 millions de francs-or empruntés au taux de 9%.
Plusieurs navires assurent le transport des précieux chargements vers les grands ports de la Manche et de l'Atlantique et c'est à partir de ce moment là que les choses vont se gâter. On met parfois plusieurs jours à décharger la marchandise, les armes sont dans la plupart des cas dispersées par petits groupes, envoyées à des unités de mobiles de tous les coins de France mais loin des théâtres d'opérations, restent stockées dans les arsenaux ou placées dans des wagons de chemin de fer qui n'arrivent jamais à destination.
La commission d'enquête parlementaire qui examine les événements a fait une laborieuse recherche sur les armes en provenance d'Amérique, examinant chaque cargaison et chacune des expéditions qui a été faite. Ses conclusions sont consignées dans un rapport rédigé par M. Boreau-Lajanadie.
LES ARMES A TIR RAPIDE Le navire La Fayette effectue un premier voyage qui l'amène à rentrer à Brest le 1° octobre 1870, sa cargaison est réceptionnée par l'Artillerie le 4, elle comprend 11 300 fusilsRemington du modèle égyptien et 1 350 carabines de même marque mais dont le modèle n'est pas précisé. Les expéditions des fusils se sont effectuées de la manière suivante :
- 1 172 fusils aux Mobiles du Maine-et-Loire,
- 2 700 à ceux du Loir-et-Cher,
- 2 450 à ceux d'Indre et Loire,
- 3 778 envoyés à la préfecture de Lyon pour une destination analogue,
- 5 637 fusils sont distribués à des corps francs (Francs-tireurs américains, Enfants trouvés de Paris, Légion hellénique, etc...)
- 330 sont envoyés au préfet de la Sarthe pour le même usage,
- 500 restent à l'arsenal de Tours.
En ce qui concerne les carabines, 500 sont distribuées (par lots de 47) à des corps francs comme les Enfants Perdus de Paris, la Légion franco-argentine, etc ; mais 850 vont aller de l'arsenal de Brest à celui de Saumur (au passage on en laisse vingt à la disposition du sous-préfet), puis à l'arsenal de Rennes sans connaître d'affectation.
Le premier voyage du Ville-de-Paris, l'amène à débarquer à Brest le 17 octobre 1870. Il a à son bord 2 380 fusils Remington égyptiens, 2 000 Remington espagnols, 520 fusils Springfield transformés Remington, 3 760 fusils Spencer et 2 700 fusils Sharps.
Les Remington espagnols furent expédiés à M. de Kératry chargé d'organiser l'armée de Bretagne et le reste de la cargaison connut des destinations variées:
- 2 300 Remington sont envoyés à Tours pour être distribués aux corps francs évoqués plus haut,
- 520 Remington se retrouvent à l'arsenal de Tours après avoir transité par Brest et Le Havre,
- 80 fusils Remington restent à Brest pendant toute la guerre et ils n'arrivent à l'arsenal de Bordeaux que le 24 février 1871.
- 1 040 fusils Spencer sont distribués du 3 novembre au 13 décembre à l'Armée des Vosges (Garibaldi),
- 410 à des mobilisés et des mobiles,
- les 2 310 autres transitent par l'arsenal d'Angers et entre le 3 novembre à Tours où ils étaient disponibles pour les mobilisés de Bretagne,
- 1 320 Sharps sont envoyés à Clermont-Ferrand à M. de Jouvencel chargé de constituer un corps spécial dont l'organisation de fut jamais achevée,
- les 1 380 autres fusils Sharps sont divisés en petits lots qu'on attribue entre le 3 novembre et le 1er décembre à une dizaine de corps francs.
Ce navire ramène également 1 720 carabines Remington, 6 680 carabines Spencer et 717 carabines Sharps, qui furent dispersées de la manière suivante :
- 720 carabines Remington rejoignent leurs semblables du La Fayette pour être séparées en lots de 47 armes qu'on attribue aux francs-tireurs,
- 320 sont expédiées directement de Brest au préfet de la Drôme,
- 500 sont envoyées à Tours à la disposition de la Commission d'Armement,
- les 180 carabines Remington restantes restent sans emploi à Brest et sont expédiées le 27 décembre à l'arsenal de Rennes,
- les 717 carabines Sharps reçues à l'arsenal de Tours le 2 novembre, furent distribuées du 11 au 25 de ce mois à onze corps de francs-tireurs.
- on expédie 30 carabines Spencer à la Commission d'Armement à Tours,
- 5 000 carabines sont envoyées au Camp de Conlie, centre de regroupement des mobilisés bretons,
- les 1 650 restantes sont envoyées le 28 octobre à Tours et on distribue 1 520 d'entre elles par petits lots à trente corps divers, la plupart étant constitués de corps-francs : la Phalange Niçoise, la Légion Dauphino-provençale, les Tirailleurs du Rhône, etc ; et les 130 armes restées disponibles entrent le 13 décembre à l'arsenal de Bordeaux.
Le Fairey-Quenn venant de Londres, arrive au Havre le 18 octobre, sa cargaison est réceptionnée le 1er novembre. Elle comprend 300 fusils Remington qui restent sur place pendant deux mois et n'en sortent que pour entrer le 30 janvier - soit deux jours après l'armistice - à l'arsenal de Bordeaux.
Le Saint-Laurent fait son entrée dans le port de Brest le 31 octobre et sa cargaison est réceptionnée deux jours plus tard. Il transporte11 500 fusils Remington de modèles divers, 130 fusils Spencer et 19 161 carabines.
Il y a dans ce lot, 500 fusils du modèle espagnol qui sont expédiés au préfet de la Sarthe.
Les 11 000 fusils restant sont principalement du modèle égyptien, sauf mille d'entre eux qui sont des Springfield transformés. Ils sont divisés en trois groupes :
- 2 989 sont expédiés à Tours où on les fractionne en vingt-cinq lots qui sont dispersés dans les Corps-Francs,
- 2 011 sont également envoyés à Tours mais n'y restent pas et sont ensuite stockés à Bordeaux,
- 1 000 autres transitent par Le Havre et arrivent le 21 novembre à Angers,
- les 5 000 restant sont expédiés le 2 décembre au Préfet du Rhône.
- quant aux 130 fusils Spencer, ils vont rejoindre ceux du Ville-de-Paris à l'Armée des Vosges.
Les carabines se répartissent en quatre modèles : 8 487 Remington, 2 724 Spencer, 4 990 Sharps et 2 960 Joslyn.
Mille carabines Remington furent expédiées à Tours le 10 novembre, mais à l'arrivée il en manquait 350 ! Sur les 650 qui restaient, 363 furent distribuées à divers corps-francs, les 287 autres sont envoyées le 13 décembre à Bordeaux où selon les termes du rapporteur "elles prirent asile"...
Il reste encore 7 487 carabines Remington qui sont stockées un mois à Brest et qu'on retrouve à La Rochelle le 2 décembre, elles connaissent alors des fortunes diverses :
- 1 564 sont distribuées à des unités qui n'ont pas été identifiées,
- 5 300 sont envoyées d'arsenal en arsenal sans connaître d'affectation,
- 623 ne bougent pas et se trouvent encore à l'arsenal en octobre 1872.
C'est également le cas de 4 500 carabines Sharps, stockées elles-aussi un mois à Brest, puis envoyées à La Rochelle où on les retrouve encore le 8 mai 1872. Le sort de 290 armes de même modèle est identique mais le lieu de destination est l'arsenal de Bordeaux. Les 200 armes restantes partent directement de Brest à destination de Clermont-Ferrand pour le corps de M. de Jouvencel.
Les 2 724 carabines Spencer sont mieux employées car on les attribue en totalité aux mobilisés bretons. Il en est de même pour 2000 carabines Joslyn mais l'ensemble de ces armes arrive à la Conlie après le départ du général de Kératry.
Les 960 carabines Joslyn restantes ont été réparties comme suit :
- 98 à la gendarmerie de la Sarthe,
- 3 à la gendarmerie du 19° corps,
- 3 aux francs-tireurs de la Gironde,
- 356 voyagent de Brest à Tours, puis à l'arsenal de Bordeaux,
- 500 vont de Brest à Lyon en passant par La Rochelle.
Le Pereire arrive au Havre le 9 novembre avec 3 204 fusils et 13 316 carabines. Les fusils sont des Remington d'un type non précisé et des Spencer. Leur destination laisse elle aussi à méditer, si on en juge par l'usage qui en fut fait :
50 Remington aux francs-tireurs du Havre,
- 500 autres envoyés à Bordeaux à la Commission d'Armement qui voulait s'en réserver l'usage (ils y étaient encore le 6 janvier 1871),
- 1 860 fusils prennent la direction de Bordeaux puis celle de Toulouse,
- les 450 derniers Remington et les fusils Spencer restent stockés au Havre jusqu'au 9 janvier.
Les 5 967 carabines Spencer que transportaient aussi ce navire ont été séparées en deux lots :
- l'un comprenant 2 980 armes fut expédié directement du Havre à la Conlie le 21 novembre,
- l'autre de 2 987 carabines fut expédié à Tours le 25 novembre, mais n'arriva jamais à destination.
Restaient 6 469 carabines Remington dont il existait trois modèles : 280 Remington Geiger dites ancien modèle (Split Breech), 100 carabines égyptiennes et 6 089 du modèle ordinaire (sans doute en .50 Spencer). Elle séjournèrent au Havre pendant un mois, le 22 décembre on expédie à Bordeaux 280 carabines ancien modèle qui sont distribuées le 17 janvier
- 222 aux mobilisés des Landes,
- 10 aux francs-tireurs du Cantal,
- 48 aux Francs-tireurs de Montevideo.
Cent carabines du modèle égyptien, parties le même jour pour Bordeaux disparaissent dans la nature...
Deux cents carabines du modèle ordinaire sont distribuées à divers corps d'artillerie :
- 100 à la 2° batterie mobilisée des Basses-Pyrenées,
- 100 au commandement de l'artillerie à Bernay (Eure).
Cent vingt-cinq autres restent au Havre, tandis qu'on expédie à Bordeaux les 5 764 carabines Remington restantes et du 11 au 30 janvier 1871, l'arsenal les affecta de la manière suivante :
- 500 à la place de Grenoble (10 janvier 1871),
- 290 aux mobilisés de la Gironde (11 janvier 1871),
- 212 aux mobilisés de la Creuse (13 janvier 1871),
- 400 aux mobilisés de la Dordogne (13 janvier 1871),
- 1 000 à la place de Bourges (15 janvier 1871),
- 250 aux mobilisés des Landes (17 janvier 1871),
- 978 à la place de Perpignan (20 janvier 1871),
- 500 à la place de Toulouse (20 janvier 1871),
- 300 à l'armée des Vosges (21 janvier 1871),
- 264 aux mobilisés du Gard (23 janvier 1871),
- 360 aux mobilisés de l'Hérault (23 janvier 1871),
- 360 aux mobilisés de l'Ariège (30 janvier 1871),
- 350 aux mobilisés de la Haute-Vienne (28 février 1871).
Le 25 novembre, l'Ontario fait son entrée au Havre et il est déchargé le jour même. Il ramène 3 000 fusils et 23 939 carabines.
Les 2 500 fusils Peabody restent à l'arsenal local jusqu'au 16 décembre, on les envoie alors à Bordeaux où ils arrivent le 6 janvier et ensuite on perd leur trace. Les 500 fusils restant qui sont des Remington sont stockés à l'arsenal local jusqu'au 9 janvier, ils sont alors envoyés à Bordeaux où ils arrivent le 30.
Sur ce navire, on trouve aussi 10 598 carabines Spencer dont 50 étaient encore à l'arsenal du Havre le 28 juillet 1871. On en distribue 1 028 à divers corps :
- 70 aux Eclaireurs vendéens (4 décembre 1870),
- 320 au commandement du génie à Rouen (9 décembre), puis 42 autres (2 janvier 1871),
- 50 aux Eclaireurs à cheval du Havre le 9 décembre 1870 et 120 autres le 7 janvier 1871,
- 73 à la batterie mobilisée de Rouen (29 janvier 1871),
- 115 à la gendarmerie de l'armée du Havre (18 février 1871),
- 63 à la batterie de mitrailleuses Gatling du Havre (18 février 1871).
Les 9 520 autres, après avoir séjourné trois semaines au Havre partent le 16 décembre pour l'arsenal de Bordeaux où on en réceptionne 9 160, un groupe de 360 armes s'étant perdu en route... On en affecte 1 000 au 1er régiment de mobiles à cheval, 100 aux Eclaireurs de Dordogne et 600 à l'armée des Vosges. Le reste de ces armes, soit 7 460 exemplaires (complété par un autre groupe de 28 armes de même type provenant de l'Avon), séjourne plus ou moins longtemps à Bordeaux, puis est affecté à diverses places :
- 1 000 à Lyon,
- 1000 à Bourges,
- 500 à Grenoble,
- 500 à Valence,
- 3 988 à Lille
- 500 à Toulouse.
L'Ontario transporte encore 160 carabines Joslyn, 1 080 carabines Sharps, 2 500 carabines Warner et 2 500 carabines Gallagher qui ne connurent jamais l'épreuve du feu car après un séjour au Havre jusqu'au 16 décembre 1870, elles partent pour Bordeaux et n'en sortent que bien après la fin de la guerre le 27 septembre 1871.
Le même sort attendait les 6000 carabines Lindner, dites interchangeables, stockées à Bordeaux on interdit leur usage car elles ne tiraient pas la cartouche Spencer.
Le La Fayette, revient d'un deuxième voyage le 27 novembre et il accoste à Brest. Sa cargaison est prise en compte le 30. Il ramène cette fois 10 740 fusils et 2 140 carabines.
Les fusils sont des Remington de plusieurs types : 8 480 fusils égyptiens, 1 200 espagnols et 1 060 Springfield transformés. Ils sont envoyés en plusieurs direction :
- 1 060 partent pour l'arsenal du Havre où ils ne sont jamais arrivés,
- 1 200 sont expédiés le 10 décembre pour l'arsenal de Rennes qui les réexpédie le 31 vers celui de Bordeaux,
- 8 480 partent le 12 décembre pour La Rochelle, de ce groupe on en prélève 6 200 qu'on envoie à Lyon mais il n'en arrive que 3 140, le reste s'est perdu en route, toujours de ce même groupe 1 260 sont remis au délégué du Gouvernement et 1 020 envoyés le 5 janvier 1871 à l'Arsenal de Bordeaux.
Ce bâtiment apporte aussi 150 carabines Spencer qu'on attribue à la gendarmerie de Quimper et 1 990 carabines Remington sont envoyées à plusieurs arsenaux, celui de Rennes en reçoit 70 qu'il affecte à des hommes des 7° et 8° régiments d'artillerie, à la Rochelle on en réceptionne 420 qui s'y trouvaient encore le 6 octobre 1872, enfin 1 500 à l'arsenal de Nantes sont réparties de la manière suivante :
- 118 à la garde mobile des Basses-Pyrenées (4 janvier 1871),
- 93 à la garde mobile de la Gironde (10 et 12 janvier 1871)
- 60 à la garde mobile de la Vendée (12 janvier 1871),
- 98 à la garde mobile de la Charente (13 janvier 1871),
- 5 à la garde mobile du Maine-et-Loire (23 janvier 1871),
- 40 à la garde mobile des Basses-Pyrenées (29 janvier 1871),
- 104 à la garde mobile des Deux-Sèvres (22 février 1871),
- 900 à la place de Rennes (13 mai et 11 octobre 1871),
- 4 pour l'armement des navires (10 août 1871),
- 77 restaient en stock au 3 octobre 1872.
L'Avon arrive au Havre le 1er décembre 1870. Son chargement de 4 980 fusils Peabody reste pendant trois semaines au Havre d'où ils partirent le 22 décembre pour l'arsenal de Bordeaux, lequel après les avoir gardés un mois les expédie à Nantes en lots successifs entre le 24 janvier et le 16 mai 1871. Il transportait également 40 fusils Spencer qu'on envoya à Brest, ils quittèrent cet arsenal le 15 décembre pour celui de Bordeaux où on ne les vit jamais.
Sa cargaison comprenait également 10 090 carabines Spencer qui arrivèrent à Bordeaux le 30 décembre, elles n'ont été d'aucune utilité dans le conflit car expédiées trop tard à leurs destinataires :
- 330 à la place de Nantes (21 janvier 1871),
- 4 000 à la place du Havre (8 février 1871),
- 5 372 à la place de Chartres (25 mars 1871),
- 350 à la place de Nantes (31 mars 1871).
Dix armes étaient absentes à l'arrivée initiale du chargement à Bordeaux et 28 autres ont été utilisées pour compléter un stock venant de l'Ontario, comme il a été dit plus haut.
Le second voyage du Ville-de-Paris devait l'amener à regagner la France le 10 décembre, date à laquelle il arrive à Brest.
Il transporte 6 220 fusils Remington égyptiens, 2 100 Springfield transformés Remington,
5 760 fusils Berdan, 3 000 fusils Winchester 1866, 2 600 carabines Joslyn et 3 000 carabines Winchester 1866.
Après l'inévitable stage dans le port d'arrivée qui dura plus de quinze jours, 3 240 fusils Remington traversèrent l'arsenal de La Rochelle pour arriver à celui de Bordeaux le 5 janvier 1871 ; 2 100 autres arrivés de Brest aboutirent à ce dernier arsenal le 2 janvier et ils en ressortent le 20 pour aller à Lyon qui en avait déjà reçu 2 980 en provenance de Brest le 31 décembre, ces derniers furent immédiatement distribués à des mobiles.
Les 5 760 Berdan, après être entrés le 28 décembre à l'arsenal de Rennes en ressortent trois jours plus tard pour Lyon.
En ce qui concerne les fusils Winchester, ils connurent une diffusion particulièrement variée : - 100 aux francs-tireurs de Quimper,- 800 au Corps de l'Etoile de l'Italien Frapoli qui n'acheva jamais de s'organiser (31 décembre 1870),- 230 aux flanqueurs de l'armée régulière (11 janvier 1871),- 47 aux francs-tireurs de la Haute-Garonne (6 janvier 1871),- 400 aux mobilisés du Cantal (18 janvier 1871),- 39 aux francs-tireurs du Gers (23 janvier 1871),- 300 aux francs-tireurs de Paris (26 janvier 1871),- 50 au directeur du télégraphe (28 janvier 1871),- 250 à l'armée des Vosges (29 janvier 1871),- 784 à la place de Chartres où ils arrivent le 25 mars 1871,Les 2 600 carabines Joslyn partent pour l'arsenal de La Rochelle et s'y trouvent encore le 8 mai 1872.. Quant aux carabines Winchester, on les expédie à l'arsenal de Bordeaux où elles connaissent les affectations suivantes :- 500 au Corps de l'étoile (21 décembre 1870),- 1 000 aux Francs-corsaires de Gironde (8 janvier 1871),- 300 à la Légion d'Alsace-Lorraine (13 janvier 1871),- 200 à des corps de cavalerie détachés (6 février 1871),- 1 000 à la place de Chartres (25 mars 1871). Assez curieusement, le rapport ne signale aucune anomalie concernant l'acheminement des munitions correspondant aux diverses armes utilisées. Il semble que de ce côté là, les choses se soient plutôt bien passées. La Commission d'Armement avait aussi acheté en Grande-Bretagne des fusils Snider, tous ne connurent pas l'épreuve du feu, car 32 272 d'entre eux, arrivés en France entre le 17 septembre et le 15 décembre 1870 restèrent stockés dans les arsenaux. LES ARMES A PERCUSSION Au 15 décembre 1870, on avait également réceptionné 232 673 fusils rayés à percussion provenant de l'étranger, où on trouvait 192 013 Springfield et 39 760 Enfield. Exception faite de 10 180 exemplaires qui reçurent des affectations spéciales (arsenaux, armée des Vosges, etc..) les autres ont été envoyés aux préfets de cinquante-trois départements pour leurs gardes nationales mobiles sédentaires ou mobilisées. Nous épargnerons à nos lecteurs le détail fastidieux de chaque chargement et nous contenterons d'indiquer la répartition départementale qui fut faite lors de ces expéditions :- Ain, 3 260 Enfield le 18 octobre et le 12 novembre 1870,- Basses-Alpes, 4 500 Springfield le 15 décembre 1870,- Hautes-Alpes, 3 000 Springfield le 1er décembre 1870,- Alpes-Maritimes, 6 260 Springfield le 15 décembre 1870,- Ardèche, 8 000 Springfield le 15 décembre 1870,- Ariège, 3 400 Springfield,
- Aude, 4 040 Springfield le 15 décembre 1870,
- Aveyron, 4 000 Springfield,
- Calvados, 4 000 Springfield,
- Cantal, 3 940 Enfield, 18 octobre et 12 novembre 1870,
- Charente, 5 000 Enfield, 20 novembre et 1er décembre 1870,
- Charente-Inférieure, 1 548 Enfield, le 1er décembre 1870,
- Cher, 4 000 Enfield,
- Corrèze, 5 000 Enfield le 1er décembre 1870,
- Côte-d'Or, 180 Enfield le 18 octobre 1870,
- Côtes-du-Nord, 2 000 Springfield,
- Dordogne, 10 000 Springfield le 1er décembre 1870,
- Drôme, 2 620 Springfield,
- Eure, 700 Springfield le 28 novembre 1870,
- Eure-et-Loir, 1 500 Enfield le 18 octobre 1870,
- Finistère, 2 000 Springfield,
- Gard, 3 000 Enfield le 12 novembre 1870,
- Haute-Garonne, 5 500 Springfield le 17 octobre 1870,
- Gers, 620 fusils Enfield le 17 octobre 1870,
- Gironde, 8 000 Springfield,
- Hérault, 8 000 Springfield,
- Ille-et-Vilaine, 2 000 Springfield,
- Indre, 2 000 Springfield le 1er décembre 1870,
- Landes, 4 000 Springfield,
- Loire, 9 000 Springfield le 20 novembre,
- Loir-et-Cher, 1 000 Enfield et 2 000 Springfield le 18 octobre 1870,
- Lot, 5 465 Springfield le 21 novembre 1870,
- Lot-et-Garonne, 1 000 Enfield le 18 octobre et 5 000 Springfield le 15 décembre 1870,
- Lozère, 4 500 Springfield le 21 novembre et le 1er décembre 1870,
- Maine-et-Loire, 6 000 Springfield les 21 et 30 novembre 1870,
- Manche, 5 530 Enfield les 15, 16, 27 octobre et 23, 24 novembre 1870,
- Haute-Marne, 1 600 Enfield les 19 et 27 octobre 1870 puis 2 000 Springfield le 15 décembre 1870,
- Mayenne, 2 800 Enfield les 19 octobre et 12 novembre 1870 puis 1 000 Springfield le 15 décembre 1870,
- Morbihan, 900 Springfield le 15 décembre 1870,
- Nièvre, 3 000 Springfield,
- Pas-de-Calais, 4 070 Enfield, le 18 octobre et le 23 novembre 1870,
- Puy-de-Dôme, 10 000 Springfield le 21 novembre et le 1er décembre,
- Hautes-Pyrenées, 6 000 Springfield le 1er décembre 1870,
- Saône-et-Loire, 2 000 Enfield le 18 octobre 1870 puis 3 000 Springfield,
- Sarthe, 1 000 Springfield,
- Seine-et-Marne, 1 320 Enfield le 17 octobre 1870 puis 1 500 Springfield,
- Seine-Inférieure, 3 800 Enfield le 17 octobre puis 9 700 Springfield le 10 décembre,
- Tarn, 3 000 Springfield le 1er décembre 1870,
- Tarn-et-Garonne, 2 800 Springfield le 1er décembre 1870,
- Vaucluse, 3 000 Springfield,
- Vienne, 440 Springfield,
- Yonne, 1 000 Springfield. Le rapport de l'assemblée a comptabilisé 78 704 fusils et 84 713 carabines, soit un total de 158 237 armes à tir rapide achetées aux U.S.A., dont 6 837 ont été égarées sur le territoire national lors des transports et 44 007 sont restées stockées dans les arsenaux jusqu'à la fin de la guerre. C'est plus qu'il n'en fallait pour armer les 25 000 mobilisés bretons du camp de Conlie. Le rapporteur fait également remarquer qu'il eut mieux valu donner les Spencer et autres carabines à tir rapide aux corps-francs et réserver les fusils à l'armée de Bretagne.C'est peut-être vrai, mais cette troupe était-elle en mesure de s'opposer avec force aux troupes prussiennes, saxonnes, bavaroises et autres ? Rien n'est moins sûr car elle étaient mal entraînée et manquait de cadres. Mais si elle avait pu résister un peu plus longtemps, elle aurait obligé l'ennemi à dégarnir d'autres secteurs, ce qui aurait peut-être permis alors à d'autres unités en formation d'organiser des contre-offensives et aux places fortes assiégées (dont Paris et Belfort) de tenter des actions analogues.M. Boreau-Lajanadie fait également remarquer que 71% des armes à percussion ont été envoyés à des départements du midi ou d'outre-Loire, tandis que les mobilisés de Conlie restaient sans équipement. Il insiste aussi sur le fait que le sud de la France prit tout son temps pour mettre sur pied ses mobilisés, certains d'entre eux n'étant que des paysans habillés incapables de rendre à la défense aucun service.(4) Pire encore, certaines unités ne furent constituées qu'au mois de février c'est à dire bien après l'armistice.L'idée de Gambetta et de son adjoint M. de Freycinet, était d'organiser la nation en armes comme en 1792, mais ni la population, ni la classe politique n'étaient de cet avis. L'opinion publique se divisait alors en quatre tendances : les bonapartistes, les monarchistes, les républicains modérés et les républicains partisans de mener la lutte jusqu'au bout. Cette tendance n'étant pas majoritaire, Léon Gambetta démissionne le 6 février 1871 et cède la place à Adolphe Thiers qui négocie les conditions du traité de paix avec Bismarck.Voici deux ouvrages qui permettront d'en savoir plus sur ce sujet:Les armes à feu de la Défense nationale et leurs baïonnettes : 1870-1871Par Christian Méry et Jack Puaud:Les armes américaines de la défense nationale 1870-1871 par Pierre Lorrain:
Cordialement
CG