AMÉLIORATION D'UNE REPRO DE FUSIL M1746 (DG)

Bonjour,

Voici des photos qui documentent des travaux qui ont été faits sur une reproduction de fusil réglementaire M1746 offert par Discriminating General (Military Heritage) au Canada. Selon toute vraisemblance, Armea offre le même. En raison de l'absence de bride de bassinet, cela ne peut être un M1728 comme l'annoncent ces revendeurs.

Dans un monde idéal, il faudrait une reproduction à partir d'un kit de chez Rifle Shoppe. C'est un projet long, onéreux et qui demande une bonne expérience en arquebuserie.  Pour une bourse limitée, des gens plus pressés, ou pour se faire la main, améliorer une reproduction made in India est un projet intéressant.

Le plus difficile c'est de savoir quoi faire! La documentation et primordiale. Et avoir observé des originaux pour former son œil est essentiel. J'ai de la chance. Un copain plus expérimenté et très connaissant a fait le gros du travail et m'a guidé dans les autres étapes. Le travail d'amincissement du bois et sur le fini du métal a pris 7 h 30, montre en main. Plus le temps de finition de la teinture qui s'est étalé sur plusieurs soirées, en raison des temps de séchage et de ponçage.

Un mot sur le métal. Sur reproductions faites en Inde,  les pièces de fer et d'acier sont généralement trop polies. On dirait du chrome! Cela se corrige avec une série de tampon abrasifs. On commence avec le plus rugueux, pour bien dépolir. Ensuite, une série de tampons de plus en plus fins permettent d'enlever les petites rayures et de donner un fini satiné.

Suit une série de photo qui expliquent les principales interventions. C'est dans le même esprit que la présentation de Crevette sur les améliorations qu'il a apportées à une réplique de M1717. Les modifications seront plus apparentes parce qu'un copain m'a prêté un exemplaire non défarbé et qui apparaît à titre comparatif.


D'abord une vue générale de la crosse et de la platine.

• Le busc de la crosse est raccourci et plus droit. Cela contribue à la rondeur de la crosse en pied de vache.
  Les sillons qui partent du buck et vont se perdre dans le corps de la crosse sont plus creusés, plus nets.
  La monture est en teck. Il faut virer le fini au vernis. Un travail de teinture et de huilage permet de s'approcher un peu plus du noyer.
  Il ne faut pas hésiter à mettre pas mal de jaune dans la teinture (j'aurais pu jaunir plus) sinon on arrive à un tête rouges trop près de l'acajou.
  

Note: sur mon fusil, la détente est posée trop en avant. J'ai corrigé cela plus tard.



Autour de la platine, le méplat du bois est aminci. Surtout en avant du bassinet. (Je sais, je n'ai pas remis le canon sur mon fusil.)




Ici l'avant de la platine sur le fusil non amélioré. Défaut courant sur le fusils faits en Inde: la platine est enterrée, noyée dans le bois. Désolé le cliché est flou.



Autre défaut, la jonction entre méplat devant le bassinet et le corps de la monture manque de définition.



Il faut donc retirer du bois, pour faire apparaître le biseau de la platine. Et obtenir une démarcation plus franche, bien concave. Pour cela un grattoir rond à petit rayon est le bienvenu.






Corps de la platine

• Le biseau de la platine est trop arrondi. Il faut l'aviver à la lime et repolir.
  Aussi, la pointe postérieure de la platine doit être amincie (en épaisseur).
  Les sillons verticaux sont mal exécutés, mal compris. C'est quelque chose que j'ai amélioré plus tard, clichés à venir.
  

Là, c'est mieux.


Visserie

• Il faut arrondir les têtes de toutes ces vis: contre-platine, batterie, ressort de batterie).
  Idéalement, cela se fait au tour. Mais on y arrive en mettant la hampe de la vis dans le mandrin d'une perceuse en faisant tourner la tête contre une planchette garnie de papier de verre. Attention aux filets! Repolir.
  Sur la repro, la vis de mâchoire a une forme en «crâne de cyclope» trop tardive. Il faut en refaire une en goutte d'eau ou en poire inversées.
  Idem pour la vis qui tient le chien dans la noix. Les repros la donne en jeton épais. Il faut refaire en dôme.
  

La vis est fendue, mais pas percée latéralement.



Finalement, la partie antérieure du fut doit être bien amincie latéralement, à l'image des pièces originales. Il faut porter une attention particulière à arrondir le sommet pour revenir vers le canon dans une courbe douce vers le canon en ne laissant qu'un méplat d'un cheveu et demi.












Il est donc possible d'améliorer ces fusils en y mettant un peu d'huile de coude.

Autres améliorations possibles, mais qui demandent l'aide d'un soudeur:

Plaque de couche
La vis qui est dans la partie postérieure du retour de plaque de couche est souvent placée trop en avant.
Il faut faire recharger à la soudure (attention pas d'inox!).
Ensuite, percer et fraiser un nouveau trou, plus en arrière, presque dans l'angle.

Embauchoir
Sur l'embauchoir (le bracelet d'en haut), le trou qui reçoit le pivot du ressort de retenue est carré sur les originaux. Sur la plupart des réplique, il est rond.
Idem. Recharger le trou à la soudure. Poncer par l'intérieur et par l'extérieur pour faire disparaître l'apport de métal.
Repercer un petit trou qui sera délicatement agrandi en carré avec une lime de bonne section (un carreau!).

Bonjour,
beau travail en effet!
Un seul problème subsiste: la platine de type mitigé 1717-1746.

J'ai eu encore l'occasion de voir de très près le beau 1717 du musée de Joux et le bois est vraiment hyper fin.
Je devrais revoir leur tout aussi beau 1728 sous peu.

J'hésite à acheter une copie 1728 Armaé car d'une part il y a du boulot dessus, et d'autre part j'ai un authentique 1728 pas trop vilain sur lequel je viens de faire une cémentation de feuille de batterie.
Cordialement,
CG

Crevette a écrit:

Bonjour,
beau travail en effet!
Un seul problème subsiste: la platine de type mitigé 1717-1746.

Merci!

En effet, l'absence de bride de bassinet en fait quelque chose dans le genre M1746. Je corrige mon intervention dans ce sens. Un habile travail de soudure ou de brasure permettrait d'ajouter la bride. Sinon, c'est inapproprié pour Fontenoy (1745).

Pour Fontenoy il y a largement moyen de prendre un 1717 à baguette fer ou même bois.

En effet les français avaient encore le 1728 à baguette bois à Rossbach en 1757 alors que la baguette fer était sortie en 1741 et que les fusils 1746 et 1754 existaient déjà.

De même qu'on voit nettement un soldat armé d'un fusil 1717 sur une gravure datant de la Guerre de Sept Ans!

Les armes d'un modèle ancien étaient utilisées tant qu'elles fonctionnaient encore et ça n'a pas changé jusqu'au XX° siècle!

Beau travail mais ce qui me chagrine sur ces copies c'est la forme de crosse qui est exagérément pentue et l'angle de la plaque de couche trop prononcée. J'ai un 1728 indien fabriqué en 1979 (track of the wolf) avec lequel je tire de temps en temps. Je viens de le faire éprouvé a St Etienne pour 117 €.

cresus250 a écrit:

Beau travail mais ce qui me chagrine sur ces copies c'est la forme de crosse qui est exagérément pentue et l'angle de la plaque de couche trop prononcée. J'ai un 1728 indien fabriqué en 1979 (track of the wolf)  avec lequel je tire de temps en temps. Je viens de le faire éprouvé a St Etienne pour 117 €.

Bonjou, vous êtes certain de la date de fabrication de 1979? À cette époque, il n'y a avait pas encore sur le marché de fusils d'Ancien Régime faits en Inde. En fait, à cette époque ce qui était fabriqué de plus ancien comme fusils français c'était des M1766 (Navy Arms/Miroku, puis Pedersoli).

Salutations,

La forme en pied de vache exagéré de certaines reproductions récentes, notamment Armaé, est plus représentative de la période des années 1740.
Les 1717 et 1728 datant de ces années ont une forme nettement plus droite.

Les premières fabrications pour Armaé avaient une forme correcte, mais leur fournisseur asiatique leur fait depuis quelques années cette forme trop en pied de vache.
Mon 1717 est un ancien Armaé, et il a la bonne forme de crosse.

Ce serait pourtant simple qu'Armaé dise à ce fournisseur que la forme n'est pas bonne, mais bon...

C'est fait de ce matin..

cresus250 a écrit:

C'est fait de ce matin..

Pas ici en tous cas, comme ça devrait être fait:
https://www.passionmilitaria.com/f1-bureau-de-recrutement

Bonjour,


Et ben dit donc quelle  patience vous avez!

C'est vraiment tentant de faire pareil quand on voit la rareté de ces modèles souvent vendus très abimés et d'un prix conséquent.  

La plupart des anciens modèles sont souvent modifiés aussi et curieusement on en trouve pas mal  vendu en provenance des  Etats Unis, guerre d'indépendance oblige?

La véritable rareté commencerait  disons à partir du 1777 pur  ...

La seule chose qu'il  manquerait  en priorité c'est d'avoir un original sous les yeux avant d'attaquer les modifications.

Pour la crosse le bois est trop rouge.


(Pas question a mon avis de travailler sur photos).

Et oui hélas ,dés qu'on passe à l'ancien régime tout ça n'est pas évident.

En tout cas continuez à nous dévoiler votre tour de main et secrets .

 Peut être allez vous éveiller des vocations à tous ceux qui hésitent avant de se lancer...

En tout cas c'est assez encourageant!

PS: Peut on tirer avec les armes vendues par ARMAE?

J'ai entendu parler d'accident de tir avec les repros en provenance d'Inde et du Pakistan.
De mon coté j'ai un 1728 made in India avec lequel j'ai tiré à balle sans problème depuis 15 ans mais pour plus de sécurité, j'ai fais éprouver le canon à St Etienne pour 117 € frais de port inclus.
ça ne vaut pas la peine de prendre des risques a ce prix là.

C'est très nettement moins cher à Ulm et à Munich, 15€ de frais de dossier valable indéfiniment, plus 25€ par arme à éprouver, plus bien sûr un petit voyage touristique en Allemagne d'une journée.

Il faut seulement que la lumière fasse moins de 1,5 mm de diamètre, au delà ils n'éprouvent plus.
Mon 1717 a été éprouvé à Munich et mon 1756 à Ulm.

Le dit accident de tir n'a strictement aucun rapport avec la qualité de l'acier, c'est simplement une mauvaise utilisation d'un fusil prêté.
Ce n'est pas le canon qui a éclaté, mais le bois car la platine était mal montée et la poudre s'est accumulée entre canon et monture.

Les aciers indiens sont très nettement plus performants que les aciers d'époque, tout comme les épaisseurs de canons et les procédés de fabrication.

Il faut plutôt se poser la question en tirant avec une arme qui a 2 ou 300 ans derrière elle, des conditions de conservation parfois douteuses et des chargements d'époque au pif!

A l'époque de ce sujet (l'an passé) j'hésitais à acquérir un 1728 Armaé, tout compte fait quelqu'un est venu chez moi il y a deux semaines pour m'en proposer un et je le lui ai pris.

D'une part il fait un très beau 1746 avec ce bassinet sans bride, et d'autre part c'est celui là même qui a été éprouvé à Ulm.
Finalement il était très nettement moins cher que le fusil neuf acheté chez Armaé, car il est "d'occasion" et en plus c'est un tireur PN qui l'avait.

Quelques modifs avaient déjà été faites (aspect général), j'ai continué avec les vis, la grenadière et il me reste le bois à affiner plus tard.
Je constate aussi que le bois, bien que trop épais, est nettement moins épais que celui de mon 1717, auraient ils aminci leurs productions...
Il doit s'agit d'une production de 2007/2008.
Sa platine est correctement encastrée.

Par contre sa baïonnette était très mal ajustée et flottait beaucoup.
Il m'a fallu revoir le diamètre de la douille.
Je l'ai laissée à fente en Z.

La forme de la crosse en pied de vache accentué est parfaite pour un 1746.
J'ai donc bien fait d'hésiter à l'époque

Bonsoir,

Oui, à la rigueur en trouver un d'occasion qui a été habilement amélioré...

En tout cas tout ça demande de l'expérience et de la minutie et ça c'est une qualité rare , pas beaucoup de personnes la possèdent.

Comment ne pas résister à l'esthétique de ces fusils de la 1ère moitié du xviiième siècle  qui à mon sens sont les plus réussis (Attention là ça n'engage que moi!)


La différence de prix pour le faire éprouver est vraiment importante entre St Étienne et Ulm et Munich, à ce tarif là effectivement ça vaut  vraiment  le coup.

En tout cas merci du tuyau!

Et si vous entendez parler d'un à vendre...