Les bidons réglementaires de l'armée française et les variantes de circonstance – 2ème partie : 1918 - 1945
Cette nouvelle partie a pour but de vous présenter les bidons réglementaires qui ont été utilisés depuis la fin de la Grande Guerre jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Le panel n’est pas aussi varié que pendant la période de pénurie des années 1914-15, mais globalement, le phénomène a été le même dans les années 1939-40. Les anciens modèles côtoient allègrement le nouveau modèle, le tout agrémenté d’accessoires de circonstance.
Nous nous attarderons donc sur les modèles spécifiques à cette période et plus particulièrement le mle 35 qui même s’il est loin d’avoir remplacé ses prédécesseurs reste représentatif de la campagne de France.
*Période d'utilisation: tout dépend du modèle, pour le plus ancien, on peut remonter au moins aux années 1900. Le modèle 35 prendra le relais de la fin des années 30 jusqu'au début des années 50 (et plus pour les bidons de l’armée de l’Air).
Les anciens modèles pour mémoire :
*Bidon mle 1850 (ici sans enveloppe et avec une courroie en toile de circonstance. Période 1914-1915) :
*Bidon mle 1867 (sans l'enveloppe de drap réglementaire ici) :
*Bidon d’essai en aluminium et quart attenant il rappelle le bidon mle 1884 pour les troupes montées. Il a été réutilisé comme effet de circonstance lors des pénuries de matériels fin 1914 et début 1915 au moins. Le fabricant est J.J. CARNAUD à PARIS :
*Bidon pour les troupes montées mle 1884. Il manque ici l'enveloppe en drap gris de fer bleuté puis bleu horizon. Elle a été repeinte en marron/orange. J'en ai croisé au moins deux autres avec cette livrée sur le net. Une idée ? :
Bidons mle 1877 de 1 et 2 litres :
Le modèle de 2 litres est encore largement présent jusqu’au moins 1940. Il se décline en plusieurs versions, avec une enveloppe en drap de laine kaki. Elle est fréquemment absente, le bidon est donc peint en marron (de nuances variables). Il est assez rare de croiser des bidons nus, mais cela a probablement existé comme c’était déjà le cas avant 1918.
*Un des mes bidons préférés avec un insigne peint d'un GTP (Groupe de Transport de Personnel) dérivé du 16ème Train:
*Un exemplaire dont la courroie est régimentée du 5ème RI (+ tampon H.I qui indique un équipement dédié à l'instruction). Un petit poinçon d'admission est présent sous la lèvre du goulot:
*Voici un bidon de 2 litres sans enveloppe qui a reçu une couche de peinture marron à la place. Pour info, celui-ci a fini sa carrière dans un atelier militaire, la courroie a été resserrée autour du bidon et celui-ci a servi de contenant pour de l’huile de lin :
Le bidon mle 35Il est le successeur de tous les autres modèles encore en dotation en 1935, sans distinction d’arme, comme cela a pu être le cas auparavant. Cependant, il ne sera probablement pas distribué en masse avant 1939, il côtoiera de ce fait tous ses prédécesseurs.
Sa contenance est de deux litres.
Il ne déroge pas à la règle et se retrouve également en version peinte :
Caractéristiques:
Bidon et bouchon:
Le corps du bidon est toujours en fer étamé en forme de dite « poire » mais ne possède plus que le grand goulot, qui se situe maintenant en haut au centre du bidon. Sa forme est donc parfaitement symétrique.
Le bouchon est le même que pour les modèles décrits dans les sujets précédents.
Enveloppe en drap:
Elle est constituée de 3 morceaux de drap de laine cardée de couleur kaki (drap de réforme) avec plusieurs nuances. Sur le dessous, il est très souvent cousu une étiquette en toile écrue, mais il arrive qu’elle soit absente.
Pour la fermeture, des œillets en fer, laiton, aluminium ou simplement cousus sont ajoutés sur un des côtés de l’enveloppe. Un lacet en cuir ou tissu (aux provenances diverses et variées), permet de serrer l’enveloppe pour la maintenir sur le bidon.
Courroie ou boucleteaux de suspension:
Courroie :
Longueur : environ 150 cm pour une largeur d'environ 25 mm.
En cuir fauve avec les parties métalliques soit en laiton soit en fer (peint en noir, étamé...).
Il existe des versions de circonstance en toile et cuir (pour la partie accueillant le bouton à gorge) et probablement tout en toile mais je n’en ai pas encore croisé.
Exemple de courroie parfaitement réglementaire, elle est fabriquée à Lyon, et réceptionnée en 1933 par la 14ème région militaire :
Boucleteaux de suspension :
La nouveauté dans les années 30 est l'apparition de boucleteaux de suspension. Ils visent à répartir le poids des équipements associés de manière homogène et permettent ainsi d'éviter de surcharger le fantassin de toutes sortes de courroies autour de sont buste. L'origine de cet équipement remonte au moins aux début des années 1900, à une époque où l'on tente d'optimiser le paquetage du soldat.
Il y a trois types de boucleteaux, ceux du modèle 34 (à gauche), ceux du modèle 35, puis ceux du modèle 35/37 (à droite) :
Boucleteaux de suspension pour l’équipement modifié 1934 :
Ils sont fabriqués dans un morceau de courroie (décrite précédemment) d’une longueur de 20-25 cm pour 2 cm environ de largeur. Un mousqueton du type pour les effets d’officiers est ensuite cousu à une extrémité, l’autre reçoit un bouton à gorge pour régler la longueur.
Cette version est fabriquée dans les ateliers militaires
Boucleteaux de suspension pour l’équipement mle 35 :
Version hybride entre le mle 34 et 35/37 qui reprend le mousqueton du premier et le cuir du dernier. C'est une fabrication en usine et non plus en atelier régimentaire.
Boucleteaux de suspension pour l’équipement mle 35/37 :
D’une longueur de 20-25 cm pour moins de 2 cm environ de largeur. Un mousqueton du type pour les effets du modèle 35/37 (musettes, sac inférieur, etc.) est ensuite cousu à une extrémité, l’autre reçoit un bouton à gorge pour régler la longueur.
Cette version est fabriquée par des fournisseurs de l’armée, à l’instar des autres effets en cuir.
J'ai pu constater que tous les types de bidons ont été utilisés avec les boucleteaux de suspension des trois modèles.
*Les variantes simplifiées et de circonstance:
Les variantes simplifiéesJusqu’à présent, la seule simplification du bidon que j’ai pu constater se situe au niveau des passants pour la courroie. Ils sont fixes au lieu d’être mobiles. Cette simplification n’a été croisé que sur des bidons clairement post 1945 ou peut-être fabriqués pendant l’occupation (voir photo plus loin).
La courroie en cuir est sujette aux mêmes simplifications qu’en 14-18 (rivetage, emploi de plusieurs pièces de cuir…). Les parties métalliques (boucle et bouton) sont en tombac au départ puis en fer (peint, étamé ou vernis à l’aspect marron brillant). Les formes varient en fonction des approvisionnements.
Pour ce qui est du bouchon, je ne connais pas d’exemplaires simplifiés du type réglementaire. Il m’est arrivé de croiser plusieurs fois des bidons nus et souvent à l’étain quasi neuf (sans courroie) mais avec un bouchon en liège dans le style de ceux pour les bouteilles de champagne.
Les variantes de circonstanceElles sont moins nombreuses que pour la période 14/18 et sont souvent méconnues et pas identifiées comme telles. Ce sont pour la plupart des remplois de modèles réglementaires anciens ou remis au goût du jour avec les draps et les courroies disponibles. Dans le cas du bidon mle 35, on fait appel à une courroie et (ou) une enveloppe en toile.
*Voici un modèle 1884 de cavalerie avec les mousquetons des équipements modifiés 34 et une housse en drap kaki. Le quart emboîtable a disparu :
*Le même modèle qui a gardé sa configuration d'origine mais a été peint en kaki :
*Mle 1877 de 1L ayant été attribué aux personnels des Hopitaux Militaires (H.M.) en 1938. L'enveloppe est bien-sûr en drap de laine kaki:
*Un mle 35 avec une sangle en toile et cuir ainsi qu’une enveloppe en toile beige. Le bouchon n'est pas réglementaire mais est d'origine :
Les fabrications après 1945Elles concernent dans 90% des cas des contrats pour l’armée de l’Air ou peut-être la Gendarmerie. Le bidon reçoit ainsi une enveloppe en drap de laine bleu nuit et une courroie en cuir noirci. On trouve très souvent au niveau de l’étiquette en toile écrue une petite étiquette du fabricant (LOREILLE) avec une date de contrat (56 pour 1956) ainsi que la petite étiquette « MITIN » indiquant un traitement antimite définitif.
Pour les 10 autres pourcents, ce sont des bidons avec une enveloppe en drap de laine kaki (avec œillets peint en vert armée) et une courroie en cuir fauve (parfois en deux pièces cousues). Le bidon a quasi systématiquement les passants de courroie simplifiés.
*Exemplaire en avec drap de laine kaki et œillets peints, courroie faite à partir de deux pièces de cuir (elle est datée 1945) et passants simplifiés :
*Exemplaire bleu nuit pour l’armée de l’Air :
*Marquages: Ils sont très variés et se retrouvent sur tous les éléments constituant le bidon, à l’exception des bouchons. En voici quelques exemples ci-dessous :
Marques apposées par l'Armée ou le soldat:
Elles ont tendance à être de moins en moins apposées ou tout simplement supplantées par le timbre d'admission à date de l'expert quand cela est possible.
Pour ma part, je ne suis pas convaincu que l’apposition de ce type de marquage ait été aussi fréquente qu’avant la Grande Guerre, je n’en ai croisé que sur des effets anciens réutilisés. Je n’en ai jamais constaté sur le bidon mle 35.
Marques d’admission (lettres « C » ou « A » dans un cercle ou hexagone, parfois seules). On les trouve sur le col du bidon ("A" et "C") et la courroie ("C") :
Timbre de la Commission de Réception (apparaît dès 1893). On le trouve sur l'étiquette en toile écrue au-dessous de l'enveloppe : A VENIR
Timbre d'admission à date de l'expert (vise à remplacer l’ancienne version de la commission de réception), il apparaît au début des années 20. Il est visible sur le revers de la courroie :
Attribution à un corps, un régiment ou autre (tampon ou poinçon) :
Matricule d'un soldat, généralement agrémenté d'une lettre de compagnie : A VENIR
Nom du propriétaire :
Marques apposées avant ou pendant la fabrication:
Tampon du fabricant : Il est poinçonné plus ou moins au centre d'un des côtés du bidon. Pour la courroie il faut regarder au verso.
Quelques exemples de fabricants, pour le modèle 35 nous avons la chance d’avoir parfois l’année de la fabrication :
J.J. Carnaud – Basse-Indre ou Paris :
S.I.A.E – PARIS - 1938 :
De Pruines – Plombières :
S.I.F - 1940 ou 1946 :
Marquages de la tannerie sur la courroie : A VENIR
*Cotation: de 1€ jusqu'à X€ selon le modèle, la variante, l'état, l'époque et la demande...
*Risque de rencontrer des copies: Peu courant, c'est le plus souvent l'enveloppe qui est refaite, il est moins aisé de les repérer car il existe des exemplaires originaux neufs de stock. Je n’ai pas de vrais conseils, il faut se fier à l’allure générale et éviter les anachronismes (par ex : fil de nylon pour la couture de l’enveloppe, alors que celui-ci n’existait pas dans les années 30/40). Il faut aussi toujours aussi prudent sur l'authenticité des bouchons et sur l'allure de la courroie. Elle peut être originale mais pas adaptée à l'époque (exemple caricatural mais déjà vu : bidon mle 1877 ou 35 avec courroie en cuir jaune des années 60 "jus de grenier"...)
*Complément:
Bibliographie et liens utiles : A VENIR
La première partie du sujet, consacrée aux bidons du Second Empire à 1918, est disponible via le lien ci-dessous :
https://www.passionmilitaria.com/t182366-les-bidons-reglementaires-de-l-armee-francaise-2nd-empire-1918#1599422N'hésitez pas à poster votre exemplaire, à me corriger ou a compléter mes propos !
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