Bonjour,
voici les différentes opérations nécessaires pour fabriquer une arquebuse XVII°.
Pour faire une arme quelqu'elle soit, il faut toujours d'abord avoir un canon.
La platine sera fabriquée ou choisie en fonction de l'époque bien sûr, mais aussi du canon.
Ce n'est qu'en étant en possession de ces deux éléments qu'on peut commencer à ébaucher la monture en bois.
Platine de fusil algérien:
C'est une platine à la miquelet italienne dont le principe et la fabriquation n'ont pas changé depuis le début du XVI° siècle.
On voit nettement que ce fusil est un remontage de pièces de divers autres fusils (canon, platine et monture):
Le plateau de poirier bien sec a été découpé en forme selon un gabarit lui-même dessiné en prenant modèle sur une arme de musée.
De haut en bas, l'ancien fusil, le nouveau canon et la nouvelle crosse:
Le canon a été ébauché extérieurement, octogonal au départ, cylindro-cônique ensuite, tulipé à la bouche.
Il est lisse intérieurement, de calibre 12mm, l'âme est polie miroir: c'est un canon de précision prévu pour une arme de championnat de tir.
La lumière est cônique à l'intérieur pour un départ de coup instantané et donc une précision extrème.
Le bouchon de culasse est brut et devra donc être taillé en queue.
Canon et son bouchon dévissé:
Le canon en place pour visualiser l'espace libre de chaque côté.
C'est juste mais suffisant car la platine ne s'encastre que de 1 mm, les ressorts étant extérieurs:
Le mécanisme de détente est à l'arrière et aura toute la place nécessaire, seul le bassinet s'encastre de 5mm et la place y est tout juste:
Par contre ça va prendre un peu de temps car mon atelier n'est guère chauffé, tout sera fait à la main, et le poirier est un bois bien plus dur que le hètre que j'utilise habituellement!
Dans un premier temps, installer mon étau en bois, long, pour bien maintenir le bois sans le marquer:
Marquer en gros l'emplacement du canon, de la platine, de la queue de détente, des découpes à faire:
Définir un peu la forme de la queue du bouchon de culasse qui sera encastré:
Définir approximativement le profil du talon de la crosse:
Tout ça est fait d'après un dessin de crosse , en bas:
Définir la longueur du fût, seul le tulipage dépassera:
Commencer par délimiter au ciseau droit les bords de la saignée, ça évitera de déborder:
Creuser légèrement un sillon étroit au milieu de la saignée, il servira à guider le rabot:
Attaquer au rabot à lame convexe dans le sillon, la lame ne fait que 10mm:
Vue de cette lame:
Quand le sillon est suffisamment profond, changer de rabot pour un plus large:
Et voilà ce que ça donne:
En bout du côté culasse le rabot ne peut pas aller jusqu'au bout, il faut alors faire le travail à la gouge:
Quand le sillon est suffisamment large, faire les bords au ciseau plat plus ou moins large. La délimitation préalable facilite la découpe bien nette:
Attention à ne pas déraper à l'extérieur, ôter de la matière est plus facile à faire qu'en rajouter!
Le dessus n'est pas encore plané et on peut tout de même corriger une bavure.
Il faudra encore de longues heures de travail avant d'atteindre la profondeur requise, entre 20mm et 10mm selon le côté considéré.
En inclinant plus ou moins le rabot on arrive à faire la quasi totalité de la saignée:
Le canon est quasiment encastré:
Et voilà la saignée presque terminée:
On peut maintenant dresser le dessus:
Et fignoler le fond au papier de verre:
La forme de la crosse est maintenant affinée:
Je commence à ébaucher la sortie du canal de baguette:
Après quelques coups de rabot et de gouge, le canal a pris forme:
Voilà ce que ça donne vu du bout:
Maintenant que le canal de baguette est correctement creusé, il faut percer en bout pour loger la totalité de cette baguette.
Pour ça j'utilise une perceuse et un très long foret à bois (en fait un normal emmanché au bout d'un tube d'alu, ce qui fait une longueur de 115 cm):
Voilà ce foret à queue hexagonale, de 10 mm, emmanché sur le tube de 10 mm également:
Le logement de la baguette étant terminé, je passe à l'encastrement de la platine.
Percage des trous pour ébaucher le logement du bloc de détente:
J'ajuste le logement au ciseau et à la gouge:
Le bloc est encastré, je repère bien les autres découpes et creux à faire:
Découpe à la scie pour le logement du bassinet, il sera terminé au ciseau:
La platine ou tout du moins son mécanisme est désormais en place.
On constate qu'un jour d'un millimètre existe entre le bassinet et la lumière.
C'est ce qui était prévu au tout début:
Il faudra maintenant encastrer d'un millimètre le corps (plaque) de la platine.
Voilà déjà ce que ça donne une fois assemblé:
L'emplacement de la platine est précisément repéré au crayon:
Le contour est ensuite mieux marqué au tranchet:
Il est détouré à la Dremel équipée d'une fraise dentaire en trapèze:
L'empacement peut alors être creusé au ciseau sans risquer de déborder:
Voilà qui est fait:
La vis arrière de platine sera à bois, elle est montée au suif pour le premier vissage:
Les vis avant et milieu traverseront la crosse. Pour ça je retaraude la platine à un pas plus sûr et plus moderne, le 7 x 100:
Ces deux vis sont taillées dans deux vis poêlier de manière à les transformer à empreinte droite:
Les empreintes ébauchées à la scie sont finies à la petite lime plate:
La vis avant passera au travers du canon, ce dernier étant plus épais que le canon d'origine.
Elle est donc amincie afin de pas trop le fragiliser:
L'entaille à faire est repérée sous le canon, il restera suffisamment de matière pour ne pas risquer quoi que ce soit:
Un petit auget est fait à l'étain et à la lampe à souder sous la lumière afin d'éviter la perte des grains de poudre d'amorçage:
La détente dite "en queue d'arbalète" est mise en forme en partant d'une tige d'acier. Le gland à l'extrémité a été façonné à la lime:
Il s'agit maintenant de lui donner sa forme définitive en chauffant pour ne pas affaiblir le métal:
Il est temps de façonner le bouchon de culasse et sa queue, marquage des parties à enlever:
Les deux premiers coups de disqueuse de 230 mm sont faits, il faudra les poursuivre jusqu'au bout:
Après quelques coupes sauvages dans le bloc, le bouchon et sa queue sont ébauchés:
Dressage des faces à la lime:
Et voilà ce que ça donne quelques coups de lime plus tard, toujours utiliser des mordaches (ici en tôle) pour éviter de marquer les pièces:
Le bouchon est vissé sur le canon, mais pas encore serré:
Pour changer un peu je passe maintenant à la détente, traçage de la position du trou:
Le trou est percé, la tige passe à l'endroit prévu dans l'emplacement de la platine pour pouvoir déclencher la percussion:
Vue de dessous:
Marquage de l'encastrement du bouchon de culasse.
L'encastrement sera fait comme les autres, au ciseau:
C'est presque fini.
La queue a été chauffée au chalumeau pour être courbée selon le bois:
Une deuxième chauffe a été nécessaire au bout:
Perçage du trou destiné à laisser passer la vis du milieu de platine à travers le bouchon de culasse:
Limage du dessous du canon pour laisser passer la vis avant de platine:
Bois canon et platine sont assemblées pour la première fois:
Préparation de la fixation du canon sur le bois, faire un logement de queue d'aronde à la lime tiers point:
Et voilà:
Il faut alors faire la partie mâle qui est taillée dans une barre d'acier étiré puis emboitée:
Une petite soudure à l'étain fixe le tout assez solidement:
Une seconde fixation identique sera faite vers l'extrémité du canon.
Traçage du logement du premier tenon du canon:
Le logement est creusé, de l'autre côté il aboutit dans le canal de baguette:
Le canon est monté, l'ensemble est fixé dans un étau puis tout est percé: bois-tenon-bois:
Le tout a été bien percé, une goupille faite dans un clou viendra solidariser le tout:
La deuxième fixation a été faite selon le même principe et les deux goupilles sont placées:
La baguette est taillée dans un rond de 10 mm, l'extrémité qui entre dans le fût doit être amincie en léger cône.
Pour cette opération j'utilise un rabot à lame concave puis du papier de verre:
Et la baguette entre pile poil dans son logement:
Fabrication du guide de baguette en partant d'un morceau de tôle fine de boite à gateaux dont on replie les bords:
Quelques coups de burin pour faire un petit filet décoratif:
Mis en forme autour d'un mandrin de 11 mm et coupé à la bonne longueur:
Le fond du canal de baguette est fendu pour recevoir le guide. Il sera fixé ultérieurement par deux fines goupilles:
Un second guide est placé à l'entrée du tunnel de baguette:
Le bois et les guides sont percés pour y placer deux goupilles chacun:
La queue de détente et le bois sont percés pour y placer l'axe:
Et la percussion est règlée afin qu'elle se fasse parfaitement. La tige est limée pour qu'elle appuie parfaitement sur la détente (petite tige que l'on voit sur le bloc):
Ce type de détente dite "latérale" se voit sur les platines à la Chenapan et à la Miquelet depuis le début du XVI° siècle.
L'action de la queue de détente se fait d'avant en arrière.
Elle sera remplacée par la noix pivotante sur la platine à silex dite "à la française" au début du XVII° siècle.
L'action se fera désormais de bas en haut.
Dernière opération avant la mise en forme de la crosse, l'embout de baguette.
Il est taillé dans un cône de récupération, enfilé au bout de la baguette et serti par un petit coin de bois:
Le bout est alors égalisé, puis la baguette sera teintée car elle est en sapin:
Moins 2 degrés, ça va encore, je passe à la mise en forme de la crosse:
Ca commence à prendre forme.
Rabot et ponçeuse à bande électriques conviennent très bien à condition de faite attention car ça va vite:
Heureusement que je suis dehors car les copeaux volent partout:
Mise en forme de l'emplacement du pouce:
Le gros du travail est fait, je rentre pour fignoler à la main:
Et voilà le travail bien avancé, il reste encore quelques heures de fignolage à la main pour que tout soit parfait, et bien sûr à cirer le bois:
Une bague a été installée pour plus de solidité:
Voilà donc, c'est pratiquement fini.
Il m'aura fallu 6 jours à raison de 3 ou 4 heures par jour, donc une vingtaine d'heures pour arriver là.
Sur ces photos elle est toujours montée "à blanc" car il reste pas mal de finitions à faire dessus.
La platine fonctionne parfaitement, elle allume à la perfection et elle est très douce.
Coût de l'opération: un ancien fusil algérien à 111€ duquel je n'ai utilisé que la platine ( le canon peut servir ultérieurement), un canon à 100€, le bois m'a été donné, donc environ 160/170€ l'arquebuse.
http://www.armae.com/ en vend pour 380€, mais la platine n'est pas du tout aussi belle (c'est un Chenapan anglais très simple), et j'aurai eu le plaisir de la faire moi même.
Le canon a été fait par http://arquebuserie-smgb.monsite.wanadoo.fr/ qui est membre de notre groupe de reconstitution et accessoirement champion du monde au tir à la poudre noire.
Premiers essais:
Cordialement,
CG