Lyautey à Madagascar, forger la légende

Bonjour à tous,

J'espère que les amateurs de papiers se portent bien en cette fin d'année ! J'ai quelques tonnes de jolies choses à vous présenter mais qui prendraient trop trop de temps pour le moment, j'espère trouver le temps pendant les vacances, en attendant une petite anecdote qui va plus vite :

J'ai eu la chance de récupérer une partie de archives de Max Leclerc (1864-1932) journaliste, écrivain, et directeur des éditions Armand Colin; il était également l'un des amis intimes du Maréchal Lyautey, ce qui lui a permis d'écrire ou de faire éditer une grande partie des ouvrages lui étant consacrés dans les années 20-30: "Lettres du Tonkin et de Madagascar" "Vers le Maroc : Lettres du Sud Oranais" "Lettres du Sud de Madagascar" "Au Maroc avec Lyautey mai 1921"

L'immense majorité de la correspondance du futur Maréchal n'existait déjà plus au moment de la publication de ces ouvrages, en effet, le décès d'Eugène Melchior de Vogue son principal correspondant en 1910 et la perte de ses archives dans la succession, puis la guerre de 14 (la famille Lyautey est originaire de Nancy) font qu'en 1920 Lyautey pensait qu'il serait impossible de publier un jour celle-ci tant elle se révèlerait lacunaire; Max Leclerc entreprit néanmoins ce travail auprès notamment de la soeur de Lyautey et de ses propres archives avant de les regrouper au sein des ouvrages cités ci-dessus. Les témoignages inédits de cette période sont donc particulièrement rares

Ce qui est intéressant, c'est que nous sommes ainsi en mesure de comparer la version publiée à la version originelle écrite par Lyautey; tout en sachant qu'il a probablement lui même contribué à certaines "coupes" car certaines feuilles de notes sont écrites sur son papier personnel ... ! Et en particulier je dispose de tous les textes des lettres envoyées à Max Leclerc, et voici rapidement un modeste exemple :



Retranscription (en italique-souligné les passages supprimés) :

Une solution comme celle de Toutée (*), parmi des gens qui sont anti-coloniaux, parmi des idées et des théories auxquelles je ne crois pas, me tente peu. Que voulez-vous ? Je ne suis pas et n'ai jamais été convaincu comme un militaire - au bout de très peu d'années j'ai perdu la foi dans la tactique, les manoeuvres, les stratégies - et vous savez combien il est pénible de rester prêtre dans une Eglise à laquelle on ne croit plus. Cela m'en fait l'effet à l'Ecole de Guerre ou autre part de même ordre, du Pierre de Zola avant qu'il ne se fut résolu à jeter le froc. Dans l'armée je crois au "Rôle social" , à la formation des hommes, et enfin au "Rôle colonial". J'aime, ici, mon uniforme à cause des commandements et des moyens d'action qu'il me procure, et puis c'est tout.

* George-Joseph Toutée, officier et explorateur






L'ensemble de la correspondance que je n'ai pour l'instant que survolée, montre que Max Leclerc a été la plupart du temps extrêmement fidèle au texte d'origine, sauf dans les attaques ad hominem (qui parfois 30 ans plus tard lors de la publication n'avaient plus trop de sens pour le lecteur ...) ou dans le cas d'attaques trop frontales envers l'armée. Il était peut être ici dans cet ouvrage de 1937 un peu rude de montrer un Lyautey - qui entre temps fut conquérant du Maroc, ministre de la guerre pendant la grande guerre puis icône militaire - anti-armée, dépourvu de doctrine militaire au dépend d'un intérêt pour la chose civile toujours plus grand !

Je vous partagerai prochainement d'autres passages, eux aussi tronqués, ou Lyautey écrit notamment qu'il ne sera décidément "jamais un militaire" !

Amicalement,
Clément

Bonjour, ma petite collection de livre sur et de Lyautey. Bonne journée.

Bonjour,

Merci beaucoup de votre partage, pourriez vous joindre le sommaire de "Choix de lettres de Lyautey" s'il vous plaît ?

Amicalement,
Clement

Bonjour, il n'y a pas de sommaire, c'est un ensemble de feuillets indépendants allant de 1882 à 1925. Une lettre par année.

Correction, il y a plusieurs lettres par année et toutes les année ne sont pas représentées.

bonjour,

Belles trouvailles à lire pour se mettre dans l'esprit de l'époque