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| Compagnie spéciale des troupes métropolitaines | |
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+4Yeng-Wang-Yeh clem Raider30 Pandore08 8 participants | Auteur | Message |
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Pandore08 Caporal
Nombre de messages : 100 Age : 62 Localisation : Meuse Thème de collection : Armée française post 1945 Date d'inscription : 27/11/2020
| Sujet: Compagnie spéciale des troupes métropolitaines Mer 19 Juin 2024 - 16:39 | |
| Bonjour, J’aborde aujourd’hui un aspect peu reluisant et très mal connu de l’armée française avec cette tenue de « disciplinaire » de la Compagnie spéciale des troupes métropolitaines (CSTM). Si l’infanterie légère d’Afrique accueille, pour leurs obligations militaires, les hommes ayant été condamnés à des peines de prison durant leur vie civile, il existe aussi une autre catégorie de punis qu’on appelle les « camisards », ou « disciplinaires ». Ces derniers sont des engagés ou des appelés ayant commis des fautes répétées pendant leur temps de service. Ils sont alors affectés après jugement par un tribunal militaire, pour une durée plus ou moins longue, en section ou compagnie de discipline. À l’issue de leur peine, ils sont mutés à l’infanterie légère d’Afrique où ils terminent leur temps d’armée. Ces compagnies et sections de discipline, pour la plupart installées en AFN, sont traditionnellement connues sous le nom générique de « Biribi ». Elles ne doivent pas être confondues avec les fameux Bat’ d’Af’. Durant la Guerre d’Algérie, l’unité à la réputation la plus sinistre est la Compagnie spéciale des troupes métropolitaines (CSTM). Celle-ci quitte Fort Mac-Mahon en 1957 pour s’établir au Bordj Fouchet à Tinfouchy, un lieu-dit situé dans la région désertique de la Saoura, à l’ouest du Sahara algérien, à environ 270 km au nord-est de Tindouf et à 70 km de la frontière marocaine, sur le territoire de la commune de Oum el Assel. Y sont affectés les cas disciplinaires habituels, mais aussi les « soldats du refus », une quarantaine de communistes, appelés du contingent, ayant refusé entre juillet 1956 et mai 1959 de participer à la Guerre d'Algérie, des intellectuels et des renvoyeurs de livrets militaires, lorsque se développe l’objection de conscience, ou encore, de l’autre côté de l’échiquier politique, des sympathisants ou acteurs de l’ombre de l’OAS. Après les accords d’Évian, la CSTM est discrètement transférée en septembre 1962 au Fort d'Aiton, un ouvrage fortifié alpin, près d’Aiguebelle, en Savoie. On y reçoit dès lors des gens présentant dans leur régiment un danger certain pour la discipline. Les éléments irréductibles sont mutés à la section de rééducation, dans des cellules isolées où ils subissent des arrêts simples, mais permanents. En 1972, encadrés par 73 officiers, sous-officiers et hommes du rang pour les surveiller, les « disciplinaires » ne sont plus qu’au nombre de 37. Ils ont été mutés à Fort-Aiton, après trois mois de service national au minimum, pour des fautes ou manquements réitérés : depuis l'absence illégale répétée ou prolongée jusqu'à des violences sur la personne d'un camarade ou celle d'un cadre d'active, en passant par le vol. Il n'y a pas à Fort-Aiton de condamnés de droit commun, ceux-ci étant affectés à la Compagnie d’infanterie légère d’Afrique (CILA) à Obock, près de Djibouti. Les sections spéciales, auxquelles la CSTM est assimilée, possèdent des distinctives particulières : - Les personnels militaires du cadre portent les tenues des corps auxquels les sections spéciales sont rattachées. Toutefois, lorsqu’une section spéciale s’administre isolément, cas de la CSTM, les personnels du cadre conservent les tenues de leur subdivision d’arme, mais sur les écussons de bras et les pattes de collet, le numéro du corps est remplacé par une grenade à neuf flammes. - Les disciplinaires portent les tenues du modèle général avec le bonnet de police en drap kaki en remplacement du bonnet de police de tradition. - L’écusson de bras en drap bleu ciel est entouré d’une soutache blanche et porte comme attribut une grenade à neuf flammes écarlate. - Les disciplinaires ne portent pas de pattes d’épaules en drap de distinction. - L’insigne de la CSTM, plutôt sinistre, est de forme circulaire. Il représente une baïonnette au bout d’un fusil au premier plan, devant des piquets et des barbelés, en arrière-plan des montagnes. Ce paysage austère est inclus dans un croissant jaune portant en arabe la phrase « Que Dieu ait son âme », le tout surmonté d’un scorpion dans un ovale. Au cours des années 60 et 70, plusieurs organes de la presse de gauche s’insurgent contre le maintien d’un « bagne militaire » à Aiton. Des parlementaires, tel Michel Rocard (PSU), s’expriment devant leurs collègues au Palais bourbon, en octobre 1970 et en mai 1972. Des critiques sont émises, notamment par la Ligue des Droits de l’Homme et par des associations d’objecteurs de conscience en France, en Suisse, au Canada. Le gouvernement, par l’intermédiaire de Michel Debré, ministre d'État chargé de la Défense nationale, se voit obligé de réagir. Le nouveau Code du service national, adopté en 1971 par le Parlement, prescrit que désormais, le cas de ces condamnés de droit commun (à au moins un an de prison sans sursis) sera examiné par une commission juridictionnelle, composée de magistrats et de militaires. Si cette commission décide d'exempter le condamné civil de ses obligations militaires, celui-ci sera confié pendant deux ans (le double du temps de service) au juge d'application des peines et au comité d'assistance chargés de la surveillance éducative en milieu ouvert. Ces mesures entrainent la dissolution de la Compagnie d’infanterie légère d’Afrique le 1er avril 1972, ainsi qu’un assouplissement du régime en cours à Fort-Aiton. L’établissement est alors débaptisé, et la CSTM devient 50e Compagnie d'instruction – c'est la nouvelle dénomination de ce camp très spécial – une unité de l'infanterie destinée à recevoir des hommes du rang, appelés ou engagés, des trois armées et des services communs qui « par des fautes réitérées contre le devoir militaire ou pour leur mauvaise conduite persistante, compromettent la discipline et sont une menace pour la valeur morale des autres personnels ». Dans sa nouvelle organisation, l’unité comprend : • une section de commandement et des services – Les officiers, sous-officiers et hommes du rang qui assurent la vie de l'unité et la sécurité du casernement « doivent être bien notés sous tous les rapports et présenter des garanties réelles de conduite, de moralité et de caractère ». Ces cadres et ces gradés sont affectés, en principe, pour deux ans. • des sections d'instruction – Ce sont dans ces sections que sont affectés les hommes du rang « disciplinaires » qui entrent pour la première fois à la 50e compagnie, et ceux qui ont eu une mauvaise conduite en section de combat. Les visites des proches parents sont autorisées ; des permissions de courte durée peuvent être accordées par le commandant du fort, seulement en cas de décès ou de maladie grave de proches parents ou de naissance d'un enfant. Sauf avis médical contraire, les convalescences se passent à la 50e compagnie. Les « disciplinaires » ne reçoivent aucune boisson alcoolisée. Il leur est interdit de recevoir des lettres ou des paquets autrement que par l'intermédiaire d'un vaguemestre. En outre, les soldats des sections d'instruction ne peuvent détenir aucune somme d'argent. Leur pécule est conservé par un officier auprès duquel ils sont en droit de le réclamer pour des achats au foyer du camp. • des sections de combat – Y sont affectés les hommes du rang qui, au cours d'une période de deux mois en section d'instruction, ont fait preuve de bonne conduite. « Le passage en section de combat, précise l'instruction ministérielle, prépare à la réaffectation dans un régiment. » En plus des permissions à titre exceptionnel, le commandant peut accorder des sorties en quartier libre et une permission normale – à titre d'épreuve – avant une proposition de réaffectation dans un régiment classique. Un certificat de bonne conduite peut même être délivré. Les soldats des sections de combat peuvent, en cas de mauvaise conduite, être renvoyés en section d'instruction, après une décision de l'officier commandant la 50e compagnie. C'est en dernier ressort le ministre de la défense qui décide d'envoyer, quel que soit le temps qui lui reste à faire, un soldat au fort d'Aiton, sur la proposition de son chef de corps, après un examen médico-psychologique et après l'avis d'un conseil de discipline, puis du général commandant la région militaire sur laquelle est cantonné son régiment. Un « disciplinaire », après deux mois en section de combat ou après quatre mois de « conduite satisfaisante » à la 50e compagnie, peut être réaffecté dans un régiment autre que celui où il avait commencé de servir. Peuvent être envoyés à Aiton les hommes du rang totalisant au moins cent vingt jours d'arrêts ou arrêts de rigueur ou bien ayant encouru trois punitions pour un ou plusieurs des motifs qui touchent expressément « à des fautes tendant à soustraire leur auteur à ses obligations militaires ; à des fautes contre l'honneur, le devoir ou la probité ; à des fautes contre la discipline militaire ; à des manquements aux consignes ; à des fautes concernant la tenue et la conduite et à des atteintes aux bonnes mœurs ». La tenue des disciplinaires est celle de l’infanterie. L’insigne, homologué G 2330 et fabriqué par Drago Paris, est constitué par une « rondache d’azur cerclée d’or à trois coupeaux d’émail blanc. En pointe, écusson de Savoie brochant une ancre de marine et soutenant deux ailes et une grenade d’or. Inscription sur la trabe « 50 CI » en bas-relief ». La 50e Compagnie d’instruction n’aura qu’une brève existence. Elle est finalement dissoute en mai 1976. La seule unité disciplinaire subsistant encore au sein de l’armée française est alors la Section d’épreuve de la Légion étrangère, au Domaine Saint-Jean à Corte. Elle sera elle-même dissoute en 1978. |
| | | Raider30 Général de Division
Nombre de messages : 1202 Localisation : Martinique Thème de collection : Scoutisme Date d'inscription : 16/10/2020
| Sujet: Re: Compagnie spéciale des troupes métropolitaines Mer 19 Juin 2024 - 16:49 | |
| Bonjour.
Merci pour cette intéressante présentation. |
| | | clem Aspirant
Nombre de messages : 423 Localisation : Bordeaux Thème de collection : Commandos marine Date d'inscription : 14/12/2022
| Sujet: Re: Compagnie spéciale des troupes métropolitaines Mer 19 Juin 2024 - 17:07 | |
| Merci pour ces informations. Il reste à Djibouti un scorpion réalisé par assemblage de pierre et ressemble très fortement à celui du BILA. Enfin vu avant 95 dernier passage pour moi sur zone |
| | | Yeng-Wang-Yeh Général d'Armée
Nombre de messages : 1885 Age : 30 Localisation : Bordeaux Thème de collection : Militaria Français et asiatique, US Corée Date d'inscription : 11/05/2014
| Sujet: Re: Compagnie spéciale des troupes métropolitaines Mer 19 Juin 2024 - 17:14 | |
| Bonjour,
Merci pour cet intéressant article sur une unité très méconnue. Avec une belle tenue pour illustrer. |
| | | LDC Général d'Armée
Nombre de messages : 1881 Age : 35 Localisation : RENNES Thème de collection : Indo, Gendarmerie et 12ème Cuirassiers Date d'inscription : 03/11/2006
| Sujet: Re: Compagnie spéciale des troupes métropolitaines Mer 19 Juin 2024 - 22:27 | |
| Salut Eric,
Comme toujours un sujet peu connu exposé avec maitrise et détail.... J'en redemande !!!
Amitiés.
Mathieu |
| | | roro771089 Je fais partie des murs
Nombre de messages : 12940 Age : 57 Localisation : 3 frontieres 77/10/89 Thème de collection : 501 RCC , 2DB Date d'inscription : 01/07/2010
| Sujet: Re: Compagnie spéciale des troupes métropolitaines Jeu 20 Juin 2024 - 7:22 | |
| bonjour merci de ce partage tres interessant et peu connu |
| | | merlin Général de Division
Nombre de messages : 1417 Localisation : AGEN Date d'inscription : 13/03/2011
| Sujet: Re: Compagnie spéciale des troupes métropolitaines Jeu 20 Juin 2024 - 7:35 | |
| une super explication!! merci à vous merlin |
| | | PARTISAN21 Général d'Armée
Nombre de messages : 1659 Age : 70 Localisation : Occitanie Thème de collection : EMP Autun et Troupes de Marine Date d'inscription : 10/05/2019
| Sujet: Re: Compagnie spéciale des troupes métropolitaines Lun 5 Aoû 2024 - 17:31 | |
| Avec retard , merci pour le partage Excellent article |
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| Sujet: Re: Compagnie spéciale des troupes métropolitaines | |
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| | | | Compagnie spéciale des troupes métropolitaines | |
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