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 Le Berghof Residence du Fuehrer

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Setenza
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MessageSujet: Re: Le Berghof Residence du Fuehrer   Le Berghof   Residence du Fuehrer - Page 2 EmptyMar 20 Nov 2018 - 9:13

Bonjour à tous,

Je suis trés intérréssé par tous documents et petits objets de Berchtesgaden et du Berghof de 1934 à 1945.

Comme je suis nouveau, je n'arrive pas à joindre en message privé VDH1944 qui vend quelques documents de cette période. Merci beaucoup VDH1944 de me contacter en mp.
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Manloser
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MessageSujet: Re: Le Berghof Residence du Fuehrer   Le Berghof   Residence du Fuehrer - Page 2 EmptyDim 6 Aoû 2023 - 14:12

J'aimerai préciser que la photo publiée sur le site (dont voici une copie) n'est pas le Berghof mais bien l'hôtel Zum Tuerken qui servit aux services de sécurité du Chancelier.

Le Berghof   Residence du Fuehrer - Page 2 Deutsc12
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MessageSujet: Re: Le Berghof Residence du Fuehrer   Le Berghof   Residence du Fuehrer - Page 2 EmptyLun 17 Juin 2024 - 14:34

bjr la tenue des serveurs qui etaient au berghof ont etaient dessinnes par eva braun voila
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Tirli30
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MessageSujet: Re: Le Berghof Residence du Fuehrer   Le Berghof   Residence du Fuehrer - Page 2 EmptyLun 17 Juin 2024 - 20:11

Post très instructif merci !!!
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lcd
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MessageSujet: Re: Le Berghof Residence du Fuehrer   Le Berghof   Residence du Fuehrer - Page 2 EmptyMar 18 Juin 2024 - 18:00

Bonsoir les Passionnés

Tombant sur ce post en ce jour anniversaire du 18 Juin, je me permets de glisser ici un témoignage sur l'action de la 2° DB pour la prise de Berchtesgaden (j'avoue préférer le terme "prise" à celui de "libération" !)

Pour ceux qui sont pressés : allez au 4 mai 1945

Pour ceux qui en veulent plus :
souvenirs ,
et
le livre


Cordialement

LCD



Témoignage épistolaire
1944-45

Le Capitaine Pierre DEBRAY quitte le commandement de la 1° Compagnie du 80° Régiment d’Infanterie fin juin 1939. Il est alors affecté à l’état-major de la 42° Division d’Infanterie. Bien que le travail d’officier d’état-major l’intéresse au plus haut point, il demande en janvier 1940 le commandement d’une compagnie au contact. La 5° Compagnie du 94° Régiment d’Infanterie lui est alors confiée.
À l’époque il est marié, père de cinq enfants dont un qui vient de mourir dans un accident domestique. Habitant à Metz à la mobilisation, sa famille est évacuée dans l’Yonne, fief de sa belle-famille.
Au sein de l’état-major de sa division il sera témoin de l’impréparation des chefs à affronter la tourmente dans laquelle les politiques ont jeté leurs pays. Il verra des généraux ne pas vouloir être « le premier à tirer contre l’adversaire » comme le prévoient les plans. Les mêmes, après ordres/contre-ordres, s’arrangeront pour faire déplacer leur unité …. Ces comportements participeront largement à la débâcle de nos Armées !
Il aura la surprise d’arriver sur l’Aisne, avec sa compagnie, sur les positions de tout un régiment que le colonel a replié avant la « relève » !!!
Enfin après avoir marché quasiment de Reims à Tonnerre, il est fait prisonnier « sur parole » le 17 juin 1940.
Prisonnier, il envisage de s’évader. Un prêtre – officier de réserve – l’en dissuade « Pour votre famille vous n’avez pas le droit de mettre les vôtres en danger ! », ce prêtre s’évadera du train qui les transporte ; plus tard il se portera volontaire pour le STO et mourra à Dachau suite à une dénonciation !
Prisonnier il ronge son frein. S’il est incorporé « en bonne santé » en juin 1940, en octobre 1943 son état le fait rapatrier sanitaire à l’hôpital militaire Begin. Il passe ses convalescences dans l’Yonne, maigre compensation il y est promu Chef de Bataillon. C’est là qu’il apprend et suit les premiers combats de la libération. Il essaye d’intégrer la résistance, mais les responsables locaux trouvent qu’il est trop galonné pour l’accepter parmi eux… Avec l’accord de son épouse il monte à Paris dans l’espoir de pouvoir rejoindre une unité combattante. À partir de ce moment il entretient une correspondance avec son épouse.

Voici ce qu’il écrit de Paris qui a été libéré le 25 Août par la 2° Division Blindée du Général LECLERC :



28 Août 1944
.......Tout de suite la grande, la bonne, l'inespérée nouvelle : je pars avec la division Leclerc. Deo gratias ! Alléluia ! Et tout et tout ! ... Mais que de déceptions avant d'en arriver là. C'est ta pensée, Toi et nos petits enfants qui m'avez soutenu au milieu de ces jours gris et noirs que j'ai subis. C'est pour vous, que vous n'ayez pas à rougir de moi que j'ai continué les démarches jusqu'à ce dénouement imprévu et inespéré.

Dès qu’il peut, il écrit. Il écrit comme hier on téléphonait et aujourd’hui « on chatte ».
Il a lui-même extrait de ses lettres ce qu’il a estimé être un témoignage sur ce qu’il a vécu, afin que « nous sachions ».
Ces premiers mots montrent la place de choix qu’occupent dans son cœur : Dieu, sa famille et son désir de revanche.
Les extraits racontent au jour le jour – dans la mesure où les combats le lui permettent – sa vie, ce qu’il pense des uns ou des autres, et ce qu’il ressent des événements.
Après de nouveaux problèmes de santé, il rejoint la 2° DB, et donne ici ses impressions après sa première affaire au sein de la division.

Le 02 octobre 1944
Hier j'ai pris part à ma première opération avec le groupement G.T.V. sans aucun rôle actif, mais je ne le regrette pas, car je ne sais si j'eusse été capable de le remplir. J'étais spectateur, mais pas de loin, j'ai vécu tout le déroulement auprès d'un camarade exerçant un commandement qui peut-être un jour sera le mien, et non seulement ce camarade est fort compétent mais encore il est fort aimable et il n'a cessé non seulement de me tenir au courant, mais de m'expliquer, j'avais vraiment l'impression d'être aux manœuvres, surtout que les habitants ne sont pas évacués et que, au début au moins, les boches semblaient évanouis, ensuite ce devint plus sérieux.
J'eus aussi mon premier contact avec le Général Leclerc...il ne me connaissait pas, j'étais en képi, ne sachant pas qu'il avait fait une note la veille : imposant le casque en opérations. Heureusement un commandant puis le colonel en personne arrivèrent également en képi et l'algarade fut collective. Je me demandai tout de même si je ne risquais pas d'être envoyé au bataillon d'instruction à St Germain. Le Colonel, surpris que je n'aie pas encore été présenté au Gal me réconforta et me dit qu'à la première occasion il le ferait. Cet après-midi il m'emmena avec lui voir une Cie au contact. L'atmosphère rappelle un peu "la drôle de guerre" mais situation renversée. Cependant les boches restent combatifs, au moins certaines unités.
Sur nos troupes mon impression est excellente et me rappelle tout à fait la Légion. Tout évidemment n'est pas parfait, c'est inévitable ou alors nous ne serions plus sur terre, mais les défauts ne sont pas dans la troupe, comme presque toujours d'ailleurs. Il y a des questions de personnes...comment en serait-il autrement ? Tous ces chefs sont jeunes, beaucoup plus en tous cas que ce que nous connaissions, ils ont, pour la plupart, vécu depuis 4 ans une épopée extraordinaire, souffrant certainement de se sentir isolés moralement du Pays, et presque tous d'être séparés, coupés des leurs depuis 4 ans et plus. Certains ont accompli des choses vraiment extraordinaires, alors comment s'étonner que leur orgueil, leur susceptibilité, soient quelquefois exacerbés ? Mais tout cela n'est pas bien grave, il s'agit de ne pas se formaliser, et surtout de bien comprendre la mentalité de tous ces camarades, et de tout faire pour ne pas les blesser, ce à quoi je m'efforce. Et puis tous paient de leur personne. Depuis mon retour j'ai déjà vu, dans un même détachement, 2 capitaines tués, un autre blessé. De leur côté nos Alliés me surprennent ou plus exactement je suis heureux de ce que je vois, toujours à l'échelon troupe : des gens qui se battent très bien, avec cran, un peu comme des amateurs peut-être, mais pas "en amateurs". Sans passion à l'égard des boches ils avaient du mal à comprendre nos sentiments. Certains spectacles et nos récits les y aident. Et, j'insiste, toujours à notre échelon, les rapports sont excellents.
….
Le 06 Octobre 1944
… … … On a vraiment actuellement l'ascendant sur le boche et cela permet des choses inouïes. C'est ainsi qu'un peloton de spahis, soit 5 automitrailleuses, appuyé par quelques fantassins a pu subir une contre-attaque de troupes d'élite : 2 bataillons de panzers soutenus par une dizaine de chars, et si nos spahis durent plier ils infligèrent à leurs assaillants des pertes considérables permettant à d'autres unités de mettre finalement les boches en déroute. Cela, grâce à ce facteur moral de l'ascendant qui donne à nos gens toutes les audaces, alors que le boche lui, tout en se battant très bien toujours est dominé et en partie paralysé.
Or l'ensemble du Pays, je crois, reste sous le coup des souvenirs de 40 et de 4 ans d'occupation, donc dans un état d'esprit à l'opposé du nôtre, à la Division. C'est pour cela qu'il eût été excellent que le plus grand nombre possible pût prendre part à cette lutte finale, susceptible de créer une ambiance toute différente.
En tous cas je crois qu'il est bon que le plus de Français possible sachent que des soldats Français, en toutes circonstances, et même parfois en infériorité numérique, ou de moyens, ont partout et toujours l'ascendant sur le boche. Mais il faut bien comprendre que ce n'est pas l'effet du hasard, c'est parce que ces Français-là ont retrouvé le goût du risque, l'audace, ne rechignant pas à l'effort, acceptant de manger des conserves qu'ils n'aiment pas beaucoup, de ne pas avoir de "pinard"- car ils ne pensent qu'à se battre.

Il fait part de ses pensées face aux événements qui troublent le pays alors que les combats sont loin d’être finis bien que Paris soit libéré …

Le 18 Octobre 1944
Il y a un an... mes premières heures de liberté, ou presque. J'étais dans le train sanitaire m'emmenant vers la France... Je repense à tous les événements qui ont rempli ces 12 derniers mois... toutes nos préoccupations pour la France... Nous avons eu la joie de voir les boches décamper, mais c'était prévu. Quoiqu'il ne faille pas les sous-estimer. Il reste à résoudre le problème qui domine tous les autres : refaire la France. La question de la reconnaissance par les Alliés est secondaire : elle se fera d'elle-même quand ces Alliés s'apercevront que NOUS SOMMES. En ce moment ils considèrent que nous n'existons pas : nous sommes paralysés, les diverses parties du Pays ne semblent pas d'accord, le gouvernement n'est soutenu franchement par personne, c'est bien triste mais c'est normal. Seulement une chose est de ne pas s'en étonner, une autre serait de l'accepter. Il faut, au contraire, réagir et en ce moment, comme toujours en soutenant à fond le gouvernement, pour cela expliquer que les difficultés matérielles sont telles, qu'il est injuste de lui reprocher lenteurs, carences etc.
... Calmer ceux qui réclament exécutions, vengeances, représailles.
Nous sommes dans une situation analogue à celle d'Henri IV ou du Consulat et on peut s'inspirer de ce qui fut fait et d'abord apaisement et recrutement du personnel de gouvernement dans tous les bords.

Le 19 Octobre 1944
Nous sommes dans la boue, il y en a partout, les maisons en sont envahies. On ne sait plus comment s'en défaire...
… … … …

En novembre les combats reprennent après avoir marqué le pas pour permettre à la logistique de rejoindre les premières lignes.

Le 30 Octobre 1944
Veillée d'armes... Atmosphère bien connue... et tellement différente de celles d'il y a 4 ans ½... Cette certitude d'être le plus fort... Difficile de donner des précisions. Quand cette lettre te parviendra l'affaire sera jouée depuis longtemps - et j'y aurai eu une toute petite, petite part... Joie de retrouver
Demain, dans quelques heures l'action, la vraie. Celle pour laquelle je suis fait ! En ce moment je refais mon instruction. Je m'astreins à réfréner un peu mes ardeurs qui ne seraient peut-être pas très orthodoxes... je suis un peu comme ces vieux chevaux retirés depuis longtemps de l'entraînement et qui, lorsqu'ils y sont remis ont tendance à vouloir galoper comme antan. Il y a une chose au moins que j'apprécie dans la guerre moderne : la motorisation et faire des opérations de jour et dormir la nuit !
Nous avons l'espoir d'un vrai repos dans quelques jours. Le matériel s'use terriblement, c'est le revers des unités actuelles qu'il y faut un soin, des révisions, un entretien qu'on ne peut donner en ligne, même si le boche en face n'est pas très mordant.

A posteriori évidemment on sent approcher les combats pour Strasbourg, et on découvre le quotidien des combattants

Le 16 Novembre 1944
Metz connaît peut-être en ce moment les joies de la libération...et je n'y aurai pas été, c'est un de mes regrets, mais j'espère que nous aurons une belle compensation... Pour l'instant rien de nouveau, nous attendons, et il est certain que le temps n'est guère propice, mais ...mais ... nous espérons tout de même ! En ce moment nous jouissons de notre repos ! Pour nous pas grand-chose de changé, on dort toujours dans le "bed in roll" mais je mets un pyjama ! Et surtout nous ne sommes plus près de ces gros canons qui, il y a 3 nuits, tirèrent 6 000 coups en quelques heures. Cet après-midi j'ai pu prendre une douche. Maintenant je suis prêt à repartir, mieux vaudrait pourtant pour nos hommes que nous puissions rester un peu plus, qu'ils aient le temps de se laver, sécher leurs affaires et réviser le matériel qui en a bien besoin. Mais quoiqu'il en soit si jamais l'ordre arrivait de partir, surtout pour où nous espérons, dans quelque état que l'ordre nous trouve, nous bondirions avec plaisir.

Le 17 Novembre 1944
.....Nous croyions commencer une période de 5 ou 6 jours de repos et crac ! À midi ordre de foncer ! Je t'écris d'une petite ville ... où nous fûmes accueillis magnifiquement. Les boches filent comme des lapins ... hélas il y a tout de même des pertes, mais nos hommes sont épatants. Je n'ai pas encore été engagé directement, je le regrette d'autant plus que j'étais encore mon patron aujourd'hui, mais le lieutenant-colonel vient de rentrer ce soir... demain je ne serai plus qu'un brillant ( ?) second ! !
Aucune amertume je trouve déjà cela splendide. Nous allons du moins, ici, être plus tranquilles que ces jours derniers loin de nos canons... il est vrai que, en échange, nous avons les obus boches, c'est plus grave si ça tombe dessus, mais c'est plus rare ! A demain je tombe de sommeil.

OUI ! Strasbourg se profile !

Le 20 Novembre 1944, au soir
Je comptais sur une longue et bonne causerie ce soir, hélas ! 3 fois hélas ! Comme toujours c'est le moment choisi par nos grands chefs pour nous mettre sur pied ! Après avoir tout réglé pour demain -réveil 06h- me voici. Ce matin, reçu le Christ, puis émouvante inhumation de quelques uns de nos morts, ce fut pour les braves gens d'ici l'occasion de nous manifester leur sympathie, tout le village était là. Après-midi passé avec les civils, beaucoup réfugiés, pressés de rentrer chez eux. Obligé de les raisonner pour refuser, les routes ne doivent et ne peuvent être qu'aux Armées en ce moment. Nous pensions pouvoir souffler un peu mais...ça redémarre dès demain... Dur, mais au fond tous bien contents parce que on bourre et qu'à l'horizon nous espérons tous voir la flèche -la seule- celle de Strasbourg. Et alors ça devient vraiment la course au clocher !
… … …

Le 22 Novembre 1944
Arrivés hier soir dans cette Alsace. Tu sais tout ce que nous pensons à ce sujet... Ce matin j'ai libéré une délicieuse petite ville ! Tu sens ce que ça peut être... quel accueil partout...drapeaux, fleurs .... baisers (de la main) ! ! Et demain. Demain.... Dieu nous bénisse c'est la grande estocade finale où chacun rêve d'arriver le premier... Moi, je ne le mérite pas spécialement, mais mes hommes ont tant fait, tant des leurs sont tombés, et au 1er rang leur chef, mon prédécesseur, que, pour eux, je voudrais que nous soyons les premiers à entrer à l'ombre de la flèche prestigieuse... que nous avons tant aimée ensemble et ce magnifique palais des Rohan... peut-être est-ce un mot de triomphe que je t'enverrai demain, au moins ce sera de joie d'avoir pris part avec de tels soldats à une telle chose.


Le 23 Novembre 1944
...... Que dire.... comment exprimer, raconter une telle journée. Cette marche triomphale depuis 7h ce matin à travers la plaine d'Alsace, notre Alsace ....... Un temps épouvantable, une pluie cinglante presque sans arrêt, et une boue terrible, et partout, dans tous les villages, aux tournants toute le population nous criant, nous hurlant sa joie dans une explosion folle, malgré la pluie du ciel et la boue dont nous les éclaboussions. Et puis des boches que nous n'avions pas même le temps d'arrêter, mitraillant ceux qui résistaient, désarmant les autres à toute vitesse avant de remonter pour filer plus loin. Et une chance invraisemblable : pas un pont sauté, arrivant 2 fois juste au moment où la mise à feu allait se faire, réduisant fortins, défense des villages, détruisant une colonne d'autos et de camions, prenant un dépôt de 200 véhicules, tout cela à peu près au même endroit, ce qui nous occupa tout de même près de 3h, puis ce fut le déboulé à 60, 70 à l'heure des derniers kilomètres avant l'arrivée dans les faubourgs de Strasbourg. Et là une chance inouïe : à 75m environ une batterie de pièces de 88 antichars. L'arme la plus terrible. J'ai eu un petit frisson et puis, à part un obus passé à 50cm de mon pare-brise (sa flamme arrière brûla la peinture du capot de ma jeep) rien. Notre vitesse les avait ahuris et nous n'avons eu qu'à ramasser les....240 artilleurs ! ! Confiés aux F.F.I. alsaciens. Puis l'installation, la fouille des maisons du faubourg où nous sommes.
Une bonne vieille -60 ans au moins- voulait absolument me donner sa chambre et finalement n'a eu de cesse que je mette mon "bed" dans sa salle à manger. Elle a tenu à m'emmener dans sa cave où d'un tas de charbon elle tira un carton d'où elle sortit, en pleurant, un drapeau bleu blanc rouge d'au moins 2m. Et quand je montai me coucher elle l'avait mis sur un fauteuil près de mon lit.........

… … …

Le 26 Novembre 1944
...encore une interruption hier soir. Je reprends. J'ai l'espoir de faire partir ce petit mot demain matin, espérant qu'il te parviendra plus vite. Alors au cas où il t'arriverait avant les deux précédents je te redis mon inexprimable joie d'être arrivé un des tout premiers à Strasbourg, et pas n'importe comment à la suite, non, en tête de mon sous-groupement - où j'avais remplacé deux jours avant un camarade tué- dans un déboulé fou et le fracas de mes chars et de mon infanterie culbutant les boches atterrés par notre vitesse, n'ayant d'alternative que de se faire tuer ou de se rendre..............................
Les 10 derniers kilomètres furent en grande partie parcourus dans les rues des faubourgs sous les acclamations délirantes de tout un peuple : hommes, femmes, enfants, dont la joie explosait, que l'on sentait hors d'eux-mêmes au sens strict du mot. Et cela paye de tout, tu sais, de tout un passé de garnison fastidieux, de 3 ans ½ de captivité même. Et sur mon char de tête, guidant cette course échevelée, un aspirant, originaire d'ici, et le hasard voulut qu'à un arrêt imposé par un char boche, qu'il liquida d'ailleurs, il se trouvât juste en face d'une tante et de sa marraine.
Ma mission actuelle me tient hélas éloigné du cœur de la ville, je suis aux lisières, en dehors, et comme je te le disais hier, en commençant cette lettre, je le regrette surtout pour mes hommes qui, constamment, ont eu la tâche la plus dure, la plus ingrate et continuent à avoir un rôle difficile ; mais par ailleurs cela leur évite peut-être bien des bêtises, et .... aux strasbourgeoises aussi !
Ce n'est guère que ce matin que j'ai pu, en auto, faire un tour rapide en ville : que de ruines hélas ! ...semées par un bombardement il y a 3 mois ½, et ce ne furent pas les objectifs militaires qui furent atteints, mais bien ces vieux quartiers qu'ensemble nous avons aimés.... la cathédrale elle-même n'a pas été épargnée : 3 bombes ont crevé la toiture. Ce majestueux palais de Rohan – le musée - a reçu 11 bombes et des plaies béantes trouent sa façade, une charmante vieille maison voisine du XVIème a été rasée... Cette vieille halle aux grains, ou aux poissons, un peu plus bas, le long de l'Ill., et qui semblait sortir tout droit de notre gouache de Breughel, ne dresse plus que des pans de murs aussi tristes à voir qu'un moignon et partout à l'entour ce ne sont que pâtés d'immeubles renversés... Et puis 2 400 victimes...
Je suis rentré de là le cœur serré, navré.
Pauvre chère Alsace douloureuse que son cœur français fait haïr aux Allemands et que son parler allemand rend parfois suspecte à des Français superficiels. Cet après-midi un pénible spectacle. Une de mes sentinelles, suivant sa consigne d'arrêter tout passant pour demander des papiers, en arrêta un qui prit mal la chose, refusa d'obtempérer et me fut amené. Or c'était un vrai brave homme condamné à mort par les boches, qui à cause de cela ne pouvait souffrir d'être suspecté, se fâcha puis éclata en sanglots ne pouvant que répéter :"des Français me faire ça à moi, me traiter comme les boches m'ont traité, je ne pourrai jamais l'oublier", et j'avais beau essayer , aidé d'un autre alsacien F.F.I, de lui expliquer que ne le connaissant pas nous étions bien forcés de lui demander ses papiers, car rien n'était plus facile à un vrai boche que de raconter des histoires, il n'y eut rien à faire et le malheureux partit, tout ulcéré. Susceptibilité, nervosité excessive dans ce cas particulier, peut-être, mais tout de même signe certain qu'il n'y a pas une faute à commettre si nous voulons garder l'affection de ces Français d'Alsace.


Des pensées sur l’avenir

Le 19 Janvier 1945
Dieu veuille que vraiment nous touchions à la fin de cette guerre, qu'on puisse travailler à la remise en ordre du Pays, de notre France. Hélas ! D’autres, beaucoup d'autres, vont avoir maintenant à souffrir, cruellement, effroyablement. Si du moins ce pouvait leur être une leçon...Il est à craindre que ces maux n'engendrent que des haines. De plus en plus il nous faut prier que la Paix soit chrétienne, que ce soit une Paix de Justice et de Charité. Mais dans l'ordre temporel gardons-nous de prendre nos désirs pour des réalités, ne soyons pas à nouveau des moutons bêlants capables seulement de nous faire égorger quitte à devenir enragés s'il nous reste un peu de vie, pour redevenir bêlants une fois guéris.
Il y a des coupables, il y a des responsables à cette catastrophe qui nous broie depuis 4 ans. Il est juste qu'ils payent, il est impossible d'éviter les vengeances, comment en vouloir à tous ceux qui auront souffert dans leurs affections les plus chères, d'être maintenant acharnés à se venger ?

Les combats continuent bien que Paris et Strasbourg soient libérées. Ces combats seront pour la prise/libération de Colmar par la 1° Armée Française, en effet le général De Lattre de Tassigny a voulu entrer en Alsace par le Sud et non pas en utilisant la percée des Vosges …

Le 29 Janvier 1945
Ce ne sera encore qu'un mot très court, je t'en demande pardon - mais vraiment je suis à bout. Le commandement a d'ailleurs été très chic nous sommes au repos mais ces 48h ont été les plus fertiles en émotion que j'ai vécues, et les plus dures. Dures à tous points de vue : pertes, fatigue. Mais probablement aussi les plus glorieuses, pour mes gens- et les boches ont largement payé les pertes que nous avons subies et il est probable que ce succès si chèrement acquis aura une influence capitale, dans les jours à venir.

Le 31 Janvier 1945
Encore impossible hier de mettre le moindre mot...Il est possible que notre repos ne dure pas très longtemps. Le boche f... le camp grand train et il n'est plus question que de les poursuivre l'épée dans les reins quel que soit notre état à nous. Et tout cela arrive très probablement parce que, il y a 3 jours, malgré ses pertes, le Sous-groupement renforcé par la Légion a atteint ses objectifs.

Le 1er Février 1945
.....Une nouvelle magnifique que je sentais depuis hier : les boches f...le camp de l'Alsace, du moins dans notre coin entre Strasbourg et Marckolsheim. Les boches sont pris au piège, plus de pont pour franchir le Rhin. Ce matin c'est le nettoyage en grand. Je n'y participe pas : il y a des impossibilités matérielles nous avons eu trop de casse, les 28 et 29, mais le lieutenant-colonel de Guillebon qui commande le Groupement a bien voulu me faire dire ce matin que "nous n'étions pas oubliés et que si un tel résultat était obtenu c'était grâce à nous".
Cela ne fait pas oublier nos morts ni moins les déplorer mais la satisfaction est grande que leur sacrifice n'ait pas été vain...............
Le Général sort de mon bureau...te rends-tu compte....il s'est déplacé exprès pour nous féliciter et me dire qu'il me donne le commandement du Bataillon en remplacement du pauvre lieutenant-colonel Putz.

Après ces combats, la division part au repos, une partie de la division est mise à la disposition du général Koenig pour la réduction de la poche de Royan.
Puis c’est l’hallali !
Le général Leclerc reçoit la mission de mettre sa division à la disposition de la 12°DB-US en Allemagne.

Le 26 Avril 1945
Le miracle s'est réalisé je suis en Allemagne...que d'impressions diverses dans cette journée...notre malheureuse Lorraine cassée, vidée de ses habitants, champs incultes...on s'y est battu si longtemps...et puis les villages allemands, eux n'ont pas subi le même vide, là chacun s'affaire, déblaie, range, nettoie. Cet après-midi suis allé voir mon ancienne garnison (Ludwigshafen). Assez impressionnant une ville de 100 000 habitants dont RIEN n'est intacte. Les populations des villes au moins sauront ce que c'est que la guerre et en garderont un souvenir durable. Pour les campagnes la guerre terrestre aura été trop rapide, dans l'ensemble

Et le 2 mai la 2°DB reçoit la mission de prendre … BERCHTESGADEN !!!

Le 04 Mai 1945 (25h)
C'est fou...devine où je suis BERCHTESGADEN......
Ahurissant ! Depuis 2 jours c'était notre objectif, nous avions trouvé quelques faibles résistances mais surtout des ponts coupés (que seuls les U.S. pouvaient réparer mais...s'en réservaient l'usage, et il fallait ruser pour passer...) Cet après-midi, me déplaçant avec tout le P.C. j'arrivais à Bad-Reichentel (le Maréchal Kesserling venait d'en partir !) quand le Colonel m'envoyait un câble me disant qu'IL était ICI. Immédiatement je bondissais sur Barbastine et à pleine vitesse j'arrivai en me demandant encore si je ne vivais pas un rêve.
Quelle revanche ! je me rappelle ce n° du "Matin" reçu à Mailly du 16 ou du 17 Juin 40, je crois, et qui montrait une vue de Paris prise de Montmartre avec 2 soldats boches au 1er plan. C'avait été vraiment un coup au cœur...
Aujourd'hui ce sont 45 hommes de chez nous qu'on pourrait photographier de l'Obersalzberg (la résidence d'Hitler) contemplant Berchtesgaden, en vainqueurs....

Le 05 Mai 1945
Dormi jusqu'à 10h ¼
Tout splendide !
Des gens de chez nous sont allés hisser au sommet de l'Observatoire d'Hitler – à quelques 1 800m d'altitude- le Drapeau... Nos trois couleurs flottent sur le Nid d'Aigle...quelle revanche, mais pour cela, que de sacrifices, d'énergie, d'endurance. Nous avons des gens qui depuis 6 jours ont eu 6h de sommeil et tout le reste du temps ont conduit, nuit et jour, des camions chargés à 6 tonnes pour assurer notre ravitaillement en essence, ne s'arrêtant que pour manipuler leurs bidons de 20l ou réparer les pneus crevés, et repartant aussitôt, tantôt en pleine neige, tantôt dans la poussière...sur des chemins souvent très mauvais.
(…) mes officiers m’ont offert un magnifique souvenir pris dans le bureau d’Hitler …

Le 06 Mai 1945
Ce soir j'ai enfin pu monter à l'Obersalzberg, la maison d'Hitler, la maison de Göring...tout est en ruines, un bombardement du 25/IV je crois, n'a laissé que des décombres. Mais restent les souterrains, des kilomètres, recelant les trésors d'Ali Baba : tableaux, livres de prix, marbres, objets d'art de toute sorte à côté de centaines de paires de draps, des placards pleins...de balais, et des caves où sont rangées - ou plutôt "étaient" ! ! ! - des milliers de bouteilles de tous les grands crus d'Europe.
Tout cela est un peu remué par nos hommes, beaucoup par les U.S. Cela me fait penser, lorsque je vois tel ou tel de nos braves types partir avec une tasse d'argent frappée aux armes de Göring, au pillage du camp de Charles le Téméraire par les suisses après Morat ou Grauçon....C'est la guerre !

Et enfin il y a la Victoire, elle le réjouit mais il ne peut s’empêcher de penser au futur …

Le 08 Mai 1945
Je pense qu'il doit y avoir, ce soir, beaucoup de joie dans toutes les familles de France, et d'Europe. La guerre est terminée, cette horrible guerre qui, depuis presque 6 ans a tout bouleversé amenant ruines et deuils dans tous les pays.
Avant de quitter Berchtesgaden je suis allé faire un petit tour en ville ; J'ai eu la curiosité de compter les morts des dernières guerres :
12 en 1870 - 86 en 14/18 - 153 de 1939 à septembre 1944. Ce sont des chiffres éloquents.
Voilà maintenant résolue la 1ère partie du problème, la partie négative : l'Allemagne ne nous empêchera pas de vivre. Reste à résoudre la 2ème partie, la plus difficile. Comment userons-nous de cette faculté de redressement, de résurrection qui nous est donnée ? Dieu veuille, comme nous le lui demandons, que ce soit une paix de Justice et de Charité, de vraie Charité. Mais ne nous leurrons pas, il faudra lutter pour y parvenir.
Ce que nous pouvons savoir des difficultés soulevées par les Russes à San Francisco n'est guère encourageant. Je n'ai malheureusement pas entendu ce soir les discours de de Gaulle et de Churchill.
Ce qui me semble très ennuyeux pour la France c'est le retour de Pétain. Les conditions dans lesquelles il s'est effectué sont inadmissibles. Que l'avance alliée l'eût libéré eût déjà été inopportun mais que son retour ait été dû à l'initiative allemande rend le fait encore plus regrettable et ne peut que lui mériter le verdict le plus sévère, car si les boches l'ont permis, c'est qu'ils espéraient en tirer un dernier profit. J'ai appris là-dessus, et de très bonne source, des choses très précises qui interdisent toute indulgence. C'est navrant mais je crois qu'il est des situations qui ne se peuvent délier que par l'extrême sévérité ; et la situation actuelle est de celles-là. Le plus inconcevable n'est pas que Pétain se soit laissé faire, il est trop vieux, mais que son entourage ne l'eût pas mieux conseillé ; ou ces gens sont fous, ou ce sont de mauvais Français. Car tout ceci ne peut qu'aboutir à diviser les Français ce qui, en ce moment, est la pire des choses qui puisse arriver !


Je voudrais bien arrêter ces extraits à cette date, mais je pense qu’il est de mon devoir de rapporter l’ultime témoignage de mon père.

Le 24 Mai 1945
Je suis tout de même allé aujourd'hui à Dachau, sur la proposition du Colonel de Guillebon de l'y accompagner. A la sortie de la ville une bifurcation où un poteau indicateur en bois indique à droite "Koncentration lager" illustré d'une image en bois découpé et peint, personnage de 50 à 60cm environ représentant un policier ou un S.S acheminant un groupe d'hommes et de femmes vers le camp. Bien révélateur cette indication illustrée au seuil d'une petite ville cossue, en plein milieu d'un faubourg bourgeois....
Entrée du camp somptueuse : c'est le quartier des gardiens : les Waffen S.S. C'est là que nous descendîmes de voiture devant une baraque transformée en hôpital français avec un médecin de la D.B. qui estime que sur 200, 50 au plus pourront regagner la France. Il en meurt 40 par jour. Deux sœurs franciscaines de Marie sont là qui se dévouent sans compter.
Le Docteur, que je connais, sérieux irréprochable, a retrouvé un document où des "savants" allemands enregistraient les résultats de leurs expériences de "vivisection" ... un trait entre beaucoup d'autres qui me semble-t-il dépasse tout en monstruosité : des femmes étaient en même temps fécondées artificiellement puis tuées les unes après les autres, de semaine en semaine pour faire des coupes histologiques de l'embryon.....Nous avons pu parler avec un prêtre de Nancy, parfaitement bilingue, il avait été placé au fichier du camp, il put ainsi être le témoin de disparitions massives. Il y a quelques semaines était attendu un convoi venant d'autres camps : partis 16 000, ils arrivèrent 3 900 ; l'ordre ayant été donné d'abattre tous les traînards. Pendant plusieurs mois ce prêtre avait dû partager sa paillasse avec 2 droits communs allemands, l'un voleur et assassin, l'autre ayant violé sa fille de 12 ans.
Ensuite nous allâmes voir ce qui, dans les camps de prisonniers que j'ai connus, correspond aux douches. La salle de douche n'offre a priori rien d'extraordinaire mais les pommes de douche sont fixées au plafond sans tuyauterie et les portes ferment de façon parfaitement étanche sur des joints en caoutchouc ; à terre d'honnêtes grilles pour l'évacuation de l'eau. Mais aucun tuyau n'amène de l'eau aux pommes et par contre par les grilles d'écoulement arrivent les gaz dont rien ne filtre à l'extérieur grâce à l'étanchéité due aux joints de caoutchouc des portes, la mort doit donc être assez rapide. Les cadavres sont apportés dans la pièce voisine : de grands fours cylindriques et des pelles comme en ont les boulangers pour enfourner la pâte - mais ce sont des civières, où on pose les corps et « hop ! » dans le four. Dans un coin un honnête lavabo et, au-dessus, en très gros caractère de 15cm cette recommandation :
"Ici comme partout soyez propres lavez-vous les mains après le travail".
Toutes ces horreurs dépassent tellement par leur raffinement et leur intelligence perverse tout ce que les hommes ont connu que je veux apporter mon témoignage : je ne rêve pas, je n'exagère rien, c'est la vérité.
* *
*
Pierre DEBRAY

Extraits présentés par
Didier DEBRAY



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