Un lieutenant Français "binôme" du prince Morimasa décoré par celui ci en 1907

1°/ Georges Antoine François Ludovic de la Vergne de Tressan (1877/1914) :
est issu d'une très vieille famille aristocratique militaire, et tout comme son père (1845/1911) capitaine au 21è chasseur, il choisit d'embrasser la carrière militaire.
C'est en visitant le pavillon japonais lors de l'exposition universelle de 1900 que le jeune St Cyrien se découvrit une passion dévorante pour l'art et la culture japonaise. Cette exposition sera pour lui la révélation de sa courte vie. Il décide donc de se consacrer en parallèle de sa carrière militaire à la connaissance de cette civilisation jusqu'alors inconnue des Français. Le désir d'ouverture du Japon à l'occident prôné par l'empereur Meiji dans le but de sortir de l'ère féodale des samouraïs et d'aller vers l'ère moderne et industrielle se trouva relayé par quelques intellectuels, collectionneurs, artistes, japonistes et tout simplement "curieux" français.





Notre jeune lieutenant décide donc d'apprendre en autodidacte la langue du pays du soleil levant qu'il maitrise dès l'année 1913. Dès lors, reconnu par l'ensemble des experts, lettrés, intellectuels et japonistes il est fréquemment sollicité pour apporter son expertise sur des objets japonais.
Il collabore aussi avec les musées nationaux pour des expositions et écrit de nombreux ouvrages de référence :
Exposition de gardes de sabre japonais Palais du Louvre 1910
Exposition de sabres et d'inro japonais musée des arts décoratifs 1911
Exposition de laques japonaises musée des arts décoratifs 1912 etc... etc...
                (NB : Il obtiendra après sa mort le prix de l'académie française (en 1916) pour son livre "l évolution de la garde de sabre japonaise" écrit sous le pseudonyme de Tei-San)

On ne citera pas ici l'ensemble de son oeuvre, notons simplement que plusieurs numéros du bulletin de la société franco-japonaise lui rendent hommage (dès 1912) et plus récemment l'universitaire japonaise Asuka Minami (univers. Sagami) lui a consacré un article (Cf : minami_asuka@isc.sagami-wu.ac.jp).

2/ Le Prince Nashimoto Morimasa :
A l'instar des princes de sang le prince doit faire une carrière militaire. Il est nommé sous lieutenant au 39è régiment d'infanterie de l'armée impériale japonaise en 1899
En 1903 il intègre St Cyr pour parfaire sa formation d'officier mais doit quitter l'école en 1904 pour faire la guerre contre la Russie (1904/1905). Il revient en France en 1906 avec le grade de commandant, ce 2è séjour durera de 1906 à 1909.

3/ Rencontre entre Georges Antoine et le Prince Nashimoto Morimasa :
En 1906 notre jeune lieutenant est au 39ème régiment d'infanterie de Rouen. Sa connaissance de la culture, de la civilisation et des us et coutumes nippones fait que tout naturellement il est affecté par l'état major à l'accompagnement du prince Morimasa. Le lieutenant de Tressan nouera des relations d'amitié avec le prince Morimasa et raconte même que celui ci l'aida à  déchiffrer des Kanji en japonais ancien sur des tsubas.

4/ La décoration du soleil levant de 5è classe :
C'est pour le prosélytisme dont il fit preuve pour faire connaitre et reconnaitre la culture nippone que le prince Nashimoto Morimasa (futur maréchal, membre de l'état major de l'armée impériale sous Hiro Hito) décorera en 1907 (année grégorienne) le 28 décembre le lieutenant de Lavergne de Tressan de l'ordre du soleil levant de 5è classe.
diplôme Japonais de Georges de la Vergne de Tressan :

Médaille de 5ème classe dans écrin de type "tamatébako miyaké" pour nobles étrangers, évoqué dans un post précédent :



Le 28 décembre 1907 étant pour le japon la 40ème année de règne de l'empereur Meiji et la 2567è année depuis le règne de l'empereur Jimmu.... ce n'est que bien plus tard que le Japon adoptera le calendrier grégorien... mais ceci est une autre histoire.
Traduction de l'ambassade du Japon 28/12/1907 et régularisation ? du 22 février 1910

Autorisation de port d'ordres étrangers par la grande chancellerie de la légion d'honneur du 27 février 1911.


Ainsi, la première décoration que reçoit notre lieutenant français est donc une décoration étrangère. Les années passent 1908... 1914 notre lieutenant devient capitaine breveté d'état major. Il est affecté au 41ème régiment d'infanterie lors de l'entrée en guerre.
Après avoir été encerclé par l'ennemi, il est tué à la tête de son régiment le 4 octobre 1914 à Neuville-Vitasse (Pas de Calais) à 37 ans.
Il est cité à l'ordre de l'armée "A repoussé toutes les attaques ennemies pendant 4 jours et 4 nuits et n'a pas perdu un pouce de ses positions".
Il est fait chevalier de la légion d'honneur à titre posthume. Il avait cependant pendant les quelques mois de combat été fait croix de guerre avec palme par 2 fois.  

Showa Tenno

bonjour,

merci de ce superbe partage , entre l'histoire et les superbes documents; étonnamment son livre "notes sur l'art japonais" se trouve assez facilement,

collectionnement

Bonjour miliww,

Merci pour l'intérêt que vous portez à ce témoignage.
Quand on s'intéresse à un personnage que l'on fait (modestement) en quelque sorte sortir de l'ombre et que l'on en découvre sa richesse, on ne peut être que humble et respectueux devant certaines vies très bien remplies.
Georges de Tressan a aussi eu le temps de publier un ouvrage toujours réédité qui lui valu les félicitations de son état major :

Que serait devenu ce personnage s'il n'avait pas été fauché par la guerre de 1914/1918 ??

Confraternellement
Showa Tenno

bonjour ,
superbe post, très instructif ,
bravo j' adore cette partie de l' histoire de l' ouverture du japon a l' occident
a+

Bonjour Suji-baji,

Merci... nous avons le même intérêt pour cette période passionnante de l'histoire du Japon.
Meiji a fait émerger le japon de l'ère féodale pour l'ouvrir à l'ère industrielle...
Je ne connais pas assez bien la littérature de source japonaise pour savoir la place exacte que lui accordent les japonais, mais pour avoir négocié ce changement avec ce succès, ce fut vraiment un grand empereur.
@+

Bonjour,

Merci pour la présentation intéressante de ces deux personnages ! Les médailles et les écrins présentés sont très beaux.

Excellent article une fois de plus, des objets mais surtout un destin exceptionnel. J'aime beaucoup la présentation. J'ignorais l'existence de ce personnage, dans la lignée de Jules Brunet, qui fait honneur à l'amitié franco-japonaise.

Les expositions auxquelles il a participé devaient être incroyables. Le bouquin sur l'Art japonais est intéressant ? Celui sur l'évolution des tsuba doit valoir le coup d'œil aussi.

Bonjour "Shining"

Merci pour ce message sympathique

Bonjour "Hiroo Onoda"

Merci aussi pour ce commentaire amical.

Pour en savoir un peu plus sur le personnage, ci joint le lien (que peut être vous avez déjà consulté ?)
vers l'article de :
Nimani Azuka
dans la revue "Art Asiatiques" 2010 tome 65 p.167 à 180 dans Persée :
Un précurseur de l'histoire de l'art japonais en France : Georges de Tressan (1877-1914)

https://www.persee.fr/doc/arasi_0004-3958_2010_num_65_1_1713

Cordialement

Bonjour,
tout simplement superbe! L'histoire, le personnage, les objets, on peut se demander en effet ce que cet homme serait devenu s'il avait survécu à la guerre.
Cordialement.

Super un grand merci pour le lien. Le premier lien que tu as partagé est l'adresse universitaire de l'auteur. Et j'ai pas pensé à regarder sur Persée.

J'ai bien fait une recherche sur lui ceci dit, mais orientée sur ses œuvres littéraires. J'ai trouvé son traité sur l'évolution des tsuba, dans le bulletin de la Société Franco-Japonaise. Le sommaire dudit bulletin est alléchant mais le prix demandé pour le tome a quelque peu refroidi mes ardeurs.

Et notes sur l'Art japonais, il est vrai qu'il y a quelques résultats eBay. Un exemplaire est en vente actuellement mais l'état laisse à désirer.

Bonsoir Showa tenno, et merci pour ce reportage agrémenté de superbes photos !
Il est vrai qu'a cette époque , il ne devait pas y avoir beaucoup de français à s'intéresser à ce point au Japon... Georges De Tressan a eu un honorable parcours (à part cette fin tragique bien sur)
Il a même appris le japonnais de façon autodidacte !!
a+

Bonjour Showa,
Je découvre ce super poste d'une qualité égale à tes autre publications.
Possèdes - tu tous les éléments photographiés ? Hâte de les admirer.

Bonjour "rorog40"
et bonjour Daniel,
merci pour vos commentaires.

Oui Daniel, je possède tout ce qui est photographié. Je ne possède malheureusement pas le portrait grandeur nature de Georges de Tressan (voir ci dessous) ni la photo ci jointe.
Cette photo est une copie d'une photo de famille ou l'on voit Georges de Tressan pris en photo alors qu'il posait pour son portrait, c'est assez curieux et peu commun.



Cordialement
Patrick

vraiment super.
A dimanche.

SU-PER-BE !!!!!!

Bonjour,

Quel plaisir de voir relater un pan de notre histoire familiale !
Mon arrière-grand-père était en effet un sacré personnage. En sacrifiant sa vie, il laissa 5 enfants en bas âges et une veuve éplorée comme beaucoup d'autres femmes de l'époque...

Merci,

Sincèrement vôtre,

Bonjour

Superbe ,merci pour ce partage

Bien cordialement
Luc

Bonjour "de Riper"

Très content d'avoir fait sortir de l'ombre (dans laquelle il dormait depuis longtemps) votre grand père.
Je n'ai malheureusement pas pu trouver d'autres photos de votre aïeul.
Si toutefois vous avez de votre côté des photos, n'hésitez pas à nous les présenter pour illustrer ce petit post,

bien cordialement,
Showa tenno

Bonjour

Merci de cette présentation documentée et très intéressante. Décidément cette famille a toujours été très ouverte aux idées nouvelles, un de ses ancêtre Louis-Élisabeth de La Vergne de Tressan était l'ami de Buffon et de Voltaire et a écrit un des premier traités sur l'électricité. Militaire, physicien et écrivain il est entré à l'académie des sciences et à l'académie française.
Originaire du Languedoc c'est une vielle famille dont voici le blason. Une branche collatérale, de La Vergne-Montenard de Tressan, porte le blason ci-dessous brochant sur un écartelé de Béarn et de Mirepoix