UN CASQUE REVOLUTIONNAIRE MODELE 1791 avec NOM du fournisseur !!!!

Bonjour à tous,

Révolutionnaire, oui, ce post l'est dans son entier.

Je m'en vais vous raconter une belle histoire, une belle histoire qui vous ravira tous - j'en suis sûr - mais surtout prouvera bien des choses pour les initiés mais aussi les Béotiens, tout en clôturant et matérialisant mon travail universitaire sur les coiffures militaires de l'infanterie de ligne française au XIXe siècle (1791-1884), travail soutenu en Sorbonne l'an passé, et auquel je vais parfois me référer dans ce post sans en faire mention.

Souhaitant poursuivre ce sujet en thèse, je ne compte pas communiquer l'ensemble de mes sources ni mes conclusions, qui, à ce sujet, sont absolument inédites. Un choix, que vous comprendrez, du moins je l'espère.

Voici l'objet de ce sujet :




L'on dit dans le milieu collectionneur que fut retrouvé, en 2011 à Wurtzbourg, en Bavière, par des charpentiers travaillant à la rénovation d'une chapelle privée dans un château, un lot tout à fait extraordinaire de casques empilés (une bonne trentaine environ, formant à eux seuls une sorte de capsule temporelle) qui auraient été pris sur le champ de bataille éponyme - affrontements tenus le 3 septembre 1796 par Jourdan face à Charles-Louis d'Autriche-Teschen - où les Français furent défaits. Les chenilles ainsi que les lattes de laiton durent être récupérées par l'ennemi, ne laissant que la bombe et le bandeau de toile léopardée, dont la valeur n'était pas interessante.
Toutes les coiffures étaient semblables- ou presque- et l'on vint, évidemment, à douter de l'authenticité de la trouvaille tant ces couvre-chefs étaient des plus rares sous nos latitudes ; voir les exemplaires d'officiers, conservés au musée de l'Imperii et celui de Douai, dont parle Joseph Margerand.

Petite incursion de l'histoire :

Au mois d’avril 1791 fut publiée une instruction provisoire sur l'habillement et l'équipement des troupes, dont les dispositions régissaient encore l’armée un an plus tard lors des premiers temps de guerre qui suivirent la déclaration du 20 avril 1792, et restaient en fait majoritairement tributaires du dernier grand règlement passé en la matière sous l’Ancien Régime, en date du 1er octobre 1786. Ce texte de transition entre l’armée royale et nationale décidait de changer le type de coiffure de guerre allouée aux troupes d’infanterie de ligne, en substituant un modèle de casque à chenille au traditionnel chapeau de feutre et dont voici une illustration :

D'après : P. , SELLIER, « Uniformes des armées de Sambre-et-Meuse et Rhin-et-Moselle, fac-similés dessiné d’après
les gravures allemandes du temps » , in : Jacques, FRICASSE, Journal de marche du Sergent Fricasse de la 127e
Demi-Brigade, 1792-1802, Paris, Lorédan Larchey, 1882, 228 p. , planche n° IX « Volontaire du 1er Bataillon de
Paris, d’après les Abbidung franzosischen, Leipzig, 1794. »



Le casque à chenille, qui se piquait d’être le digne héritier d’un casque antique absolument fantasmé, entre autres par le maréchal de Saxe, fut donné à l’infanterie de ligne en
1791, compagnies de grenadiers exceptées. Ce couvre-chef avait une forme de cuir bouilli ou de feutre de laine teinte en noir à laquelle on venait coudre une visière. Cette bombe était lattée de lamelles de laiton et entourée d’un bandeau de toile peinte qui reproduisait l’aspect d’une peau de panthère ; une demie-crinière de fourrure la surmontait.

Il se trouve qu'au cours de mes recherches, j'ai pu authentifier nombre de fournisseurs/fabricants de ce type de casques, dont le fameux DELPONT, très connu, et bien d'autes, notamment ledit MERLE, qui a au moins conçu la visière de mon casque (en cuir), et peut-être la bombe qui est en feutre.
Voici l'agrandissement de la signature :



Ceci devrait donc refroidir les sceptiques qui doutaient soit de l'authenticité de ce lot, soit de l'origine française de ces coiffures, d'autant que j'ai pu identifier un autre marquage de fabricant (assez effacé) sur un exemplaire que M. Malvaux à vendu sur son site. Mon casque et cet exemplaire en question sont les seuls, à ma connaissance, qui portent de tels marquages.

Voici le reste du casque :





















Les autres exemplaires vendus par Monsieur Bertrand Malvaux, eux aussi retrouvés dans le même lot :











Bien à vous,

Alexandre.

Merci du partagehttps://1er-empire.com/fr/archives/173-casque-de-chasseurs-a-cheval-modele-1791-revolution.html

Bonjour Alexandre.

Sujet déplacé au bon endroit.

Que dire de l'état de cette coiffure, à part bien sûr c'est rare.

Merci pour cette étude. Hâte de lire l'ensemble de vos travaux.

Amicalement

Bonjour Alexandre,

Un superbe travailleur d'enquêteur du passé qui fait remonter une histoire parmi l'Histoire des plus intéressantes !
Bon courage pour la suite et comme dit précédemment hâte de lire tout ça !

Amicalement,
Clément

Bonjour,
Merci pour cet exposé.
ZP

Bonjour
merci pour ce très beau partage.
JC

Très intéressant. Merci du partage.

Bonjour,
je salue le travail, la passion et la pièce......Merci pour cette présentation.
Cordialement.

hello
très interressant sujet ,félicitations

Bonjour,

Merci pour cette présentation érudite sur un sujet très peu abordé. J'espère que vous publierez , sous forme d'un ou plusieurs ouvrages votre travail sur "les coiffures militaires de l'infanterie de ligne française au XIXe siècle (1791-1884)".

merci pour le partage, à poursuivre!

bonsoir
Merçi pour ce partage - A suivre donc ......
@+++

Bonsoir.

Un grand Merci, et vivement la suite.

Bonjour
Sujet peu connu. Merci du partage!!!!

Belle histoire partagée donc

Merci du partage
sujet qui m'était totalement inconnu jusqu'ici.
Au plaisir de suivre votre post.

Bonsoir à tous,

Un grand merci pour l'ensemble de vos commentaires qui me confortent dans le projet de poursuivre et creuser ce sujet dans les années à venir.
Le casque est désormais bien au chaud dans ma vitrine, et je l'espère pour longtemps !

Bien à vous,

Alexandre.

Bonjour Alexandre,

Nous sommes heureux de le savoir chez vous.

Amicalement

Citation :

[…] une belle histoire qui vous ravira tous - j'en suis sûr - […] je ne compte pas communiquer l'ensemble de mes sources ni mes conclusions […]. Un choix, que vous comprendrez, du moins je l'espère.
Voici l'objet de ce sujet : […]

Fantastique trouvaille , et passionnante étude !
Certitude (du ravissement) et espérance (de compréhension) validées !

Bonjour,

Merci pour cette présentation !
C'est un bien rare couvre chef !
Je me souviens bien de l'annonce de cette découverte bavaroise qui a fait quelques heureux !
Bonne continuation dans les études.

Très cordialement.

Bonjour,

Un "JOB WEL DONE" pour cette présentation en attendant la suite bien sur ...

Cordialement

Bonsoir
Alors la comme piece psychédélique s en ai une ... J imagine que les Invalides et l Empery ont été consultés avant la dispersion de ces coiffures? parsque la ...On est dans la définition meme de la piece de musée
Je suis totalement passé à côté quand ils sont sortis
Sans être trop indiscret sur quelle base B.Malvaux à t il négocié ces casques?

Bonsoir et merci encore pour vos commentaires, j'ai pris beaucoup de plaisir à vous partager cette découverte.

C'est effectivement la traçabilité géniale de ce casque qui en fait tout l'intérêt, de la fabrique parisienne attestée au champ de bataille bavarois.
Je me répète encore, mais aucun autre couvre-chef de ce lot n'a un tel marquage, mis à part un exemplaire que j'ai pu authentifier ailleurs, et qui correspond également à la liste des fabricants que j'ai consultée dans mes archives.

Pour vous répondre moimeme, je doute que les deux musées aient été consultés directement, la découverte ayant été faite en Allemagne, et les inventeurs s'étant rapidement délestés des coiffures auprès d'un antiquaire du coin.
Je pense que c'est par ce biais-là que M. Malvaux a pu acquérir les exemplaires qui sont archivés sur son site et qui, de souvenir, se monnayaient autour de 1500 euros. Toutefois, il n'est pas impossible qu'il en ait fait bénéficier les Invalides, tout n'est pas exposé.
Du côté de mon exemplaire, il provient de la collection d'une autre personne qui était en relation avec l'antiquaire allemand au moment de la découverte, il lui en avait acheté tout un lot.

Bien à vous,

Alexandre.

Bonjour

Bravo pour ces recherches et informations.

Et bien .. à ce prix la il ne fallait pas les laisser passer!
vous avez prit des précautions particulières pour le conserver dans de bonnes conditions?
je vous proposer une thèse pour l'absence systématique des chenilles, leurs couleurs ne seraient elles pas un signe distinctif pour les régiments? Donc fournies à part à chaque régiment. (Surtout à l’époque des sans culotte ou le grand n'importe quoi était la règle en uniformologie sous la constituante)

Bonjour,

Superbe casque, effectivement peu courant!
Belle histoire, que cette découverte. J'étais passé à côté, et je ne découvre que maintenant!

C'est vraiment super d'avoir pu en trouver un, et d'avoir effectué l'ensemble des recherches dessus!

Ce casque est fortement représenté dans le fascicule Chasseurs à cheval (tome 1) de 1779 à 1815 (Histoire & Collection - 2011), par Ludovic Letrun et Jean-Marie Mongin. (voir ici: https://www.passionmilitaria.com/t224098-livre-sur-les-uniformes-chasseurs-a-cheval-tome-1 )




On remarquera, d'ailleurs, que la disposition des plaques de laiton n'est pas la même:

(source: https://1er-empire.com/fr/archives/173-casque-de-chasseurs-a-cheval-modele-1791-revolution.html )

Lienhart et Humbert représentent aussi ce casque avec les plaques de laiton en "V":

(édition originale de Leipzig réalisée de 1897 à 1906)

Exeptionel un plaisir pour les yeux !!

ceux présenté sont visiblement bien du Mle d infanterie aucun ne présente de traces des renforts en laiton ni de la cocarde présents sur le Mle de chasseur à cheval pas plus que de trace de porte plumet

Bonjour à tous,

    Tout d'abord, je ne suis pas très convaincu par l'authenticité des garnitures que présente l'exemplaire vendu sur le site 1er empire.com. A dire vrai, je ne serais pas étonné même qu'il provienne du même lot que le mien et les autres ci-dessus présentés ; retirez mentalement les éléments qui le distinguent du mien et vous conviendrez que la confection est exactement similaire. Sans parler de la cocarde dont l'aspect ne me séduit absolument pas (et encore moins celui des fils qui la fixent..) il est incohérent qu'une chenille ainsi bouclée, apanage des coiffures d'officiers ou de sous-officier fortunés, se retrouve sur une bombe à la fabrication si fruste, nécessairement destinée à la troupe. Pour bien faire, il aurait fallu que la toile d'indienne figurant la peau de panthère soit un bandeau de fourrure. Si l'on suit mon raisonnement, la latte de laiton n'est sans doute pas non plus d'origine.

    Pour répondre à moimeme, les chenilles sont systématiquement absentes sur les exemplaires issus de ce lot car elles durent être récupérées lors du désossage des casques après la bataille, tout comme les lattes de laiton.
Il y avait effectivement de graves soucis dans l'habillement des militaires des premières guerres de la Révolution, et l'on essayait de pallier ce manque d'organisation en établissant des magasins locaux en charge d'habiller 1000 hommes, à l'aide bien souvent de réquisitions locales ; ces soldats-ci touchèrent majoritairement des chapeaux de feutres, fabriqués sur place. D'autres, plus proches de Paris, pouvaient recevoir par livraison ce genre de casque à chenille. Car en revanche, la fabrication des casques étant centralisée et sous la surveillance de la Commission du commerce et approvisionnements. De plus, elle me semble avoir été assez uniforme. J'ai retrouvé plusieurs amendes adressées à des fabricants peu scrupuleux car la toile employée dans la confection de leur casque, par exemple, n'était pas similaire à celle qu'ils avaient utilisée dans leur modèle-type.

Quant aux précautions d'usage pour la conservation, j'ai placé le casque dans une vitrine bien hermétique, et l'ai surtout surélevé afin de soulager les coutures de la visière grâce à un présentoir de ma fabrication qui ne s'appuie pas non plus sur la coiffe intérieure.

    Pour répondre maintenant à Quentin et à moimeme, à propos de l'épineuse question des lattes de laiton, il faut convenir que sur le "vrai" modèle 1791, il était prévu qu'elles soient en patte de canard, en V. A preuve ce document on ne peut plus réglementaire : PLANCHES relatives au règlement concernant l'exercice et les manœuvres de l'infanterie du 1er août 1791

Les soldats d'infanterie s'entrainent, et l'on distingue fort bien leur coiffure :




De plus, l'iconographie suivante montre ce type de latte, ainsi 1793 d'après une gravure de Seele dans le Margerrand :


MAIS VOYEZ PLUTÔT CECI : il s'agit d'une gravure réalisée d’après les Abbidung franzosischen, qui sont des scènes croquées lors d'un passage en revue des troupes à Mannheim en 1795. On y voit se côtoyer les deux types de lattes !





Comme vous pourrez le constater plus bas, il existe bien des modèles authentiques avec une seule latte (exemplaire de Douai disparu, exemplaire de l'Emperi).

Je n'ai donc pas la réponse à cette question, mais formule tout de même une l'hypothèse d'un changement de fabrication par mesure d'économie de laiton, à l'appui d'un document inédit que je ne pourrais malheureusement pas vous communiquer. Je regarderai plus attentivement si j'en trouve une trace sur mon casque afin de savoir de quel type de latte il était affublé.

Pour finir, mon exemplaire, tout comme d'autres (regardez plus haut) possèdent un porte-plumet, un gousset plus précisément, car le port de la houppe en laine ronde était prévu par le règlement de 1791 :


Ci-dessous deux casques d'officiers, conservés aux Invalides et à l'Emperi, qui étaient les seuls exemplaires que l'on connaissait jusqu'alors ; vous pourrez ainsi comparer :

-Invalides d'après Pétard :


-Emperi : Chasseur à cheval


-Planche de Margerrand, où il est dit que le dernier exemplaire a sa chenille reconstituée...




-Exemplaire de Douai, aujourd'hui disparu :



Bien à vous,

Alexandre.

Bonjour,

Merci Alexandre pour ces précisions!
Effectivement, on rencontre différentes versions au niveau des plaques de laiton.

ma remarque n'avait absolument par pour but de dénigrer votre (superbe) casque, mais de relever ce que j'ai pu constater sur les différentes iconographies d'époque, consultées.

Les scènes croquées sont, à mon avis, une source bien plus interessante que les planches officielles, car elles témoignent de la réalité du terrain (en plus des pièces authentiques qu'on retrouve, et qui, bien souvent, confirment ces croquis).
J'ai, en tête, l'exemple des étuis simplifiés pour revolver de la marine, du XIXe siècle, qui n'apparaissent sur aucun règlement, mais qu'on voit pourtant bien sur des croquis et gravures (voir ici: https://www.revolver1873.fr/1873-marine.php#etui-douille-marine ), et qui à nécessité le même genre de travail de recherche.

D'où l'intérêt (et je vous en félicite) de votre travail de recherche et vulgarisation!