Epée de l’administration centrale de la marine IIe Empire

Bonjour !

Cette épée a la première singularité d'avoir la fusée portant deux plaquettes ET un filigrane, je l'ai déjà écrit.
En effet, pour assurer une bonne prise, la fusée d'une arme blanche a aux plaquettes des rainures, voire des croisillons : sabre an XII, épée pour tous corps 1816 (en long, mais ce n'est plus une arme fonctionnelle,) sabre 1837 et suivants, ou bien un filigrane : épées de tout modèles an XII, épée 1837 et suivantes jusqu'à 1891 compris...

L'administration centrale choisit...les deux. Je ne connais pas d'autre modèle règlementaire dans ce cas.
Je pense que cette redondance compense l'absence de dragonne, réservée à ceux qui ont des attributions militaires, même s'ils ne commandent pas : médecins, commissaires, ingénieurs.

Cette épée a comme deuxième singularité de porter l'aigle impériale au pommeau.
C'est la seule arme règlementaire dans ce cas dans la Marine.
Dans son premier ouvrage, Éric SCHERER écrit que les officiers généraux de Marine ont "vraisemblablement" fait de même, le décret de 1853, comme tous les textes sur leur tenue depuis l'Ancien Régime, les assimilant aux généraux de l'Armée, y compris pour l'arme blanche.
Je ne partage pas son opinion car personne n'en montre, même lui. J'en appelle à CHAPE48.
Or il a dû y avoir une centaine d'amiraux entre 1853 et 1870, et la planche S du décret mentionne "Épée du service général" ce qui n'exclue formellement pas ces derniers.
Si ça a existé, c'est resté exceptionnel.
Je pense que le tout nouveau promu contre-amiral s'enquière de sa nouvelle arme. Dans les grands ports de guerre- dont le principal est Paris, au nombre des étoiles de mer qui y brillent- existent des fourbisseurs attendant le client, avec dans leur vitrine les armes dont ils ont la vente .
Le marin étoilé gardera évidemment l'ancre au plateau; mais dans ce cas, il lui faut exiger le changement du pommeau, pour remplacer la coquille Saint-Jacques par l'aigle.
Donc, au lieu d'empoigner aussitôt l'épée dont il rêve depuis l'École Navale au moins, il devra attendre, et si sa promotion entraine mutation, rallier sans son épée ?
L'aigle napoléonienne regarde bien sûr à SA droite, nous sommes d'accord CHAPE48
(je connais un colonel qui fait une fixation sur le "tête à droite" de cette aigle ; j'ai beau lui dire que Napoléon en conseil d'État avait d'abord choisi un lion, représenté sur la carte de France avec sa patte prête à défendre la rive gauche du Rhin et que son aigle choisie au dernier moment conservait la pose, rien n'y fait cf [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] l'aigle nazie regarde aussi à sa droite ;Goebbels a justifié ce mauvais sens et ce contre-sens héraldique, là aussi par un argument géographique, en disant qu'elle fait front au péril bolchevique, à l'Est)

La troisième singularité de cette épée est d'avoir TROIS branches de garde, du moins l'amorce de deux rejoignant la principale,; la n°2 part de l'échancrure entre plateau et contre-plateau, la n° 3 de ce contre-plateau.
L'épée Marine du type 837 et toutes ses suivantes ont une garde réunissant deux branches, peut-être pour renforcer la principale, augmentation introduite en 1816 dans l'Armée pour les généraux et officiers d'état-major, alors que les sabres à trois branches de garde sont légion.

Une dernière singularité de cette arme, dont le rang des porteurs, le luxe et le câble sur la branche la mette au niveau de celles des officiers généraux, est d'avoir sur le plateau deux pavillons de chaque côté de l'ancre, comme celle de tous les officiers de LA Marine, alors que les amiraux posent leur ancre (généralement rapportée) sur un faisceau de six drapeaux depuis 1844.
Le rédacteur du premier texte a d'ailleurs écrit drapeaux sans pique ; ce rat de cave de la rue Royale n'avait jamais dû lever les yeux sur le toit de son ministère, mais les graveurs ont bien détaché le guidant de l'étoffe du mât surmonté de sa pomme.

Cordialement.

LaurentXII a écrit:

Bonjour !


Dans son premier ouvrage, Éric SCHERER écrit que les officiers généraux de Marine ont "vraisemblablement" fait de même, le décret de 1853, comme tous les textes sur leur tenue depuis l'Ancien Régime, les assimilant aux généraux de l'Armée, y compris pour l'arme blanche.
Je ne partage pas son opinion car personne n'en montre, même lui. J'en appelle à CHAPE48.

Cordialement.

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Bjr LaurentXII,
Je me sens flatté que l'on fasse appel à ma collection pour déterminer la présence de l'aigle sur le pommeaux des épées des officiers généraux de la marine. Malheureusement, je ne possède que 2 épées de vice-amiraux mais 3e Rep et celles-ci ont le pommeau avec un demi-foudre pour l'une et une coquille st jacques pour la seconde.
Il y a 2 ans j'ai pu photographier en banlieue parisienne une importante collection d'épées de marine, dans laquelle il y avait 9 épées d'officiers généraux dont 3 avec  une ancre surmontée d'une couronne plus large que la couronne "bonnet de nuit" impériale et dans ces 3 une épée de grand amiral de la flotte (équivalant à la distinction de maréchal). Tout cela pour dire que je n'y ai vu aucun aigle sur le pommeau.
Mais en passant en revue mes épées de marine  du Mle 1837, j'en ai trouvé une qui bien qu'ayant une couronne de type royal, est ornée de l'aigle impérial sur le pommeau. Compte tenu de la qualité et de l'aspect de la rivure, on ne peut suspecter  un changement  de pommeau.
Pour la petite histoire, j'avais vendu cette épée  en l'an 2000 à un ami, car je ne m'étais pas encore intéressé au thème de la marine. Celui-ci étant décédé, les héritiers ont mis en vente la collection chez SUDUCA à Toulouse, j'ai donc racheté cette épée en 2021, justement parce qu'elle avait cet aigle sur le pommeau.
CDT
Attention : je peux vous assurer que la différence de teinte de la dorure du pommeau tient à l'éclairage, la teinte de la monture est bien homogène.

Bonjour, CHAPE48.

Encore une passionnante énigme à résoudre!

Pouvez-vous poster une photo du plateau de garde bien à plat, que la couronne soit bien visible ? En effet, l'ancre semble être sommée d'une couronne étalée, mais sous cet angle les fleurons sont indiscernables.

Par ailleurs, la guirlande sur la branche de garde est réservée aux armes des officiers généraux de LA Marine, dans les services : Commissariat, Santé, Génie maritime, Artillerie navale etc. ce qui la fait appeler "épée de directeur", car les postes en activité sont ceux de directeur du service de leur corps dans les grands ports de guerre, ou de Directeur central à Paris.

De plus, la fusée est alors en écaille de tortue, alors que celle-ci semble en corne.
Donc, puisque la rivure est d'époque et exclue un réassemblage, ce serait un phénomène réunissant un plateau, un pommeau, une branche de garde et une fusée inconciliables.

Attendons le détail de la couronne.

Cordialement.

LaurentXII a écrit:

Bonjour, CHAPE48.

De plus, la fusée est alors en écaille de tortue, alors que celle-ci semble en corne.
Donc, puisque la rivure est d'époque et exclue un réassemblage, ce serait un phénomène réunissant un plateau, un pommeau, une branche de garde et une fusée inconciliables.

Attendons le détail de la couronne.
Cordialement.

Bjr Laurent,
Je confirme: fusée en corne
Voici la photo de la couronne évasée, elle est royale mais je ne vois des fleurs de lys plutôt des fleurons. Dès que je monterai à mon studio je ferai une meilleure photo, celle -ci a été faite avec mon portable.
Une précision la bouterolle ne me parait pas d'origine, elle est lisse, donc décorée semble collée car l'agrafe au verso a disparu, les trous sont vides.
CDT

Bonjour CHAPE48.

Merci de cette photo en gros plan.
Indubitablement, il n'y a pas de lys : c'est donc la couronne de Louis-Philippe.
Bien que prince du sang de France, et titulaire du blason des Orléans, aux trois lys d'or sur champ d'azur brisé, comme branche cadette, d'un lambel de gueules, il a mené une chasse impitoyable au lys, pour fonder sa propre dynastie.
Dans le domaine qui nous passionne, il a autorisé l'épée de Marine 1819. Curieusement et heureusement pour elle, elle n'a d'autre symbole des Bourbons que le lys du pommeau, alors que ce "meuble" fleurit partout ailleurs, et pas seulement dans l'uniforme. Il a donc suffi de changer ce pommeau monté sur vis, pour une ancre passe-partout et assez pataude.

Mais alors, comment concilier sur votre épée :
- couronne du roi des Français au plateau de garde et aigle de l'empereur des Français au pommeau;
- corne à la fusée et câble à la branche de garde ?

Faut-il imaginer un modèle précoce assemblé alors que l'aigle est adoptée mais la couronne pas encore définie ?
Louis-Napoléon, prince-président, replace l'aigle  sur les drapeaux et les schakos dès le 31 décembre 1851, mais sans couronne puisque nous étions toujours en République...pour 11 mois et 2 jours.
Une épée confectionnée en urgence juste après la proclamation de l'Empire le 2 décembre 1852 ?

CHAPE48, couchez-vous sur cette arme atypique, mais ne dormez pas   avant d'avoir résolu cette énigme .
Cordialement